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«Chat»
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Gérard Dreyfus face aux internautes
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Gérard Dreyfus s'est livré au jeu des questions-réponses en direct avec les internautes.
Photo: Nathalie Guillemot/RFI
Une heure de «chat» à la veille du coup d'envoi de la CAN 2004.
Photo: Nathalie Guillemot/RFI
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A la veille du coup d’envoi de la Coupe d’Afrique des nations de football qui se déroulera jusqu’au 14 février en Tunisie, Gérard Dreyfus, journaliste de RFI et grand spécialiste du football africain, s’est livré le 23 janvier 2004 au jeu des questions-réponses avec les internautes. Une expérience qu’il renouvellera dans quinze jours, le vendredi 6 février 2004 entre 9 h et 10 h TU.
Bonjour à toutes et tous, nous avons le plaisir d'accueillir Gérard Dreyfus !
Gérard Dreyfus : Bonjour, bienvenue à Tunis.
gullit : Quels sont les joueurs qui pourraient se révéler pendant la CAN ?
Gérard Dreyfus : Il est difficile de répondre à cette question. Cette année, il y a beaucoup de jeunes éléments, la moyenne d'âge se situe pour les seize équipes entre 23 et 28 ans. On attend de voir les pros qui ne sont pas connus, les joueurs venus d'Afrique, qui sont hélas de moins en moins nombreux.
warf* : La Tunisie peut-elle gagner son premier match contre le Rwanda ?
Gérard Dreyfus : Naturellement, mais les Tunisiens ont en mémoire le match contre le Mali en 1994. Le Rwanda n'est pas à négliger. Il a éliminé le Ghana. La pression se trouve du côté tunisien, et la sérénité côté rwandais. Allez savoir.
valou : Comment se porte le football africain ? Pensez-vous qu'on va assister à une super CAN ?
Gérard Dreyfus : Le football africain se porte de mieux en mieux au niveau de son élite. Il ne va pas bien au niveau des compétitions nationales, par la faute de dirigeants -ne globalisons tout de même pas- qui pensent davantage à eux qu'au développement du football, et en particulier du football des jeunes.
stan : Je suis béninois et j'écris depuis Parakou. Que pensez-vous des chances de l'équipe Béninoise ?
Gérard Dreyfus : La modestie et l'humilité sont des vertus. C'est déjà formidable pour elle de s'être qualifiée. Le pêché de gourmandise est l’un des sept pêchés capitaux et il faut prendre garde à ne pas tomber dans le piège. Dans sa poule se trouvent l’Afrique du Sud, le Maroc, le Nigeria, trois monstres sacrés pour les petits Ecureuils béninois. Ne rêvons pas.
gt : Votre pronostic Gérard ? Les trois premiers ?
Gérard Dreyfus : Cameroun, Nigeria, Sénégal, Tunisie, Mali. Voilà mon cinq de tête, sans ordre précis.
luccio : Comment se passe l'ambiance à Tunis ? Est-ce que tout le pays est mobilisé pour la compétition ?
Gérard Dreyfus : Elle est à l'image du temps, pluvieux, venteux et frisquet. Les Tunisiens font des rêves à domicile, sans les manifester dans la rue. Peut-être est-ce pour mieux déborder de joie et de passion plus tard. Très bonne nouvelle, il n'y a plus une seule place pour le match d'ouverture. Les Tunisiens se méfient tout de même du syndrome Tunisie-Mali de 94.
cast : Les joueurs africains évoluant dans les championnats étrangers ont-ils eu suffisamment de temps de préparation pour arriver à la CAN, je pense notamment aux joueurs du championnat français ?
Gérard Dreyfus : Non, on bricole quinze jours, parfois moins avant la compétition. Ce qui peut favoriser les surprises lors de la première journée. L'équipe la mieux préparée est la Tunisie. Elle compte un nombre raisonnable d'expatriés. C'est un des problèmes de l'exode massif des footballeurs vers les euros ou toute monnaie plus forte que celles qui existent en Afrique.
joel : Pensez-vous que Santos puisse s'adapter rapidement au football africain ?
Gérard Dreyfus : Il a joué en Tunisie à l'Etoile du Sahel . L'entraîneur d'alors l'a emmené avec lui à Sochaux (Jean Fernandez). Le football africain, il connaît.
farouk : Combien de journalistes sur place ?
Gérard Dreyfus : Officiellement 1200 ou 1300, y compris les techniciens. Disons 700 journalistes, dont 200 Tunisiens.
jja : Quel est le programme de RFI pour couvrir la CAN ?
Gérard Dreyfus : Tous les matches en direct, plus les différents journaux de la CAN, plus les chroniques de Joseph Antoine Bell. Au total entre 80 et 90 heures de football africain sur RFI.
hamed : Issa Hayatou vient d'être à nouveau reconduit à la tête de la CAF. Comment expliquez-vous ce plébiscite ?
Gérard Dreyfus : Je suis un peu surpris par l’ampleur de sa victoire, 46 voix contre 6. Je n’ai pas le temps de tout vous expliquer. C’est une affaire avec beaucoup d’intervenants. Je crois surtout que Bhamjee, qui a plus d’ancienneté qu’Hayatou au sein de la CAF et qui est plus âgé que lui, était un mauvais candidat pour incarner le renouveau qu’il disait représenter. Pendant 16 ans, il a été associé à toutes les décisions, et ce n’est qu’au bout de tant d'années qu’il dit que les choses ne vont pas comme elles devraient aller!
saze : Comment expliquez-vous qu'il y ait autant d'entraîneurs français à la tête d'équipes nationales ? Le bon niveau du foot français ?
Gérard Dreyfus : Le complexe des dirigeants africains. En 96, le Néerlandais Bonfrere gagne l'or à Atlanta, en 2000, Akono gagne l'or à Sydney. Le premier est plus connu et apprécié que le deuxième. C’est bizarre, non ? Quant aux Français, c'est dû aux lointaines relations entre mon pays et le continent.
joel :Que pensez-vous de l'équipe malienne qui a un bon effectif sur le papier mais dont on parle peu? Et pourquoi le malien Bagayoko n'a pas été appelé ?
Gérard Dreyfus : Chaque entraîneur est libre de ses choix, à lui ensuite de les assumer. Stambouli a dit avoir averti Bagayoko qu'il n'était pas en mesure de lui assurer une place de titulaire. Personne ne comprend vraiment ce qu’il se passe. Quant à l'équipe, je pense que si elle est bien dirigée, elle a de grosses potentialités. C'est un champion possible.
saze : A votre avis, quel va être le groupe le plus difficile et le plus serré ?
Gérard Dreyfus : Tous les groupes sont équilibrés, les derniers résultats des matchs de préparation semblent le confirmer. La première journée dans chaque groupe va peser sur le reste du déroulement de chaque groupe. Il faudra s'imposer d'entrée.
thierno : Que pensez-vous des propos de Platini sur le football africain ?
Gérard Dreyfus : Honnêtement je n'ai pas lu son interview parue dans l’Equipe. Je sais qu'elle suscite beaucoup de réactions plutôt négatives. Voyez comment sont les Africains. Ils attachent plus d'importance à la parole de Platini qu'à celle des personnalités de leur football. On n'interroge jamais un Africain sur le football européen. Platini ne connaît pas le football africain, mais les Africains d'Europe et ne lui voue pas un intérêt particulier. J'en ai souvent parlé avec lui.
hamed : La CAN, c'est aussi des anecdotes, alors pensez à nous mettre sur votre site ces petites histoires qui font aussi le charme du foot africain.
Gérard Dreyfus : On fait le nécessaire, mais on ne peut pas être partout.
papa : comment jugez vous l'arrivée des néo-Africains Kanoute et Sakho ?
Gérard Dreyfus : Messieurs, soyez les bienvenus. Après tout, ils sont respectivement malien et sénégalais, même s'ils ne sont pas nés dans le pays de leurs parents ou arrivés très tôt en France. On ne peut qu'approuver leur choix.
hamed : Gérard, s'il y a une équipe que vous connaissez bien, c'est le Cameroun. Pensez-vous que les Lions pourront conserver leur titre avec les problèmes internes qui les divisent en ce moment ?
hatall : Les Camerounais ont-ils un joueur qui peut remplacer Foé ?
Gérard Dreyfus : Foé est irremplaçable, pas sur le terrain, mais pour toutes les vertus humaines qu'il recelait en lui et cet élan qu'il savait donner à ses partenaires. Mais son absence sur le terrain sera remplacée par sa présence dans le cœur de ses camarades.
kit : Pensez-vous que le Sénégal parvienne à se hisser dans le dernier carré ?
Gérard Dreyfus : Ici, le Sénégal représente pour tout le monde un point d'interrogation. A lui de retrouver l'état d'esprit qui a précédé la CAN de 2002, à savoir l’humilité devant l'adversaire. On ne craint personne, on respecte tout le monde. C’est le meilleur moyen d'arriver à ses fins.
Akim : Ne pensez-vous pas que l'absence de la Côte d'Ivoire abaisse le niveau de cette CAN ?
Gérard Dreyfus : Le terme « abaisser » est un peu fort. Son absence est malheureuse. Actuellement, c'est probablement une des meilleures équipes africaines. Elle était dans un groupe de 3. Son match contre l'Afrique du Sud à Abidjan a eu lieu au moment de la partition et le climat n'était pas vraiment propice à une telle rencontre. Aujourd’hui, la Côte d'Ivoire est supérieure à l'Afrique du Sud. C'est ainsi.
serges-thierry : Pourrait-on imaginer une CAN avec plus d'équipes ?
Gérard Dreyfus : C’est impossible, tout simplement parce qu'on a déjà du mal à trouver des pays capables d'en accueillir 16. Au-delà c'est matériellement impossible, sauf dans quelques pays qui sont toujours les mêmes.
marco :Va-t-on toujours assister à un jeu basé sur l'attaque et le spectacle ou pensez-vous qu'avec des entraîneurs européens, le jeu soit moins flamboyant ?
Gérard Dreyfus : Le foot africain a perdu de sa magie. Les Européens lui ont d'abord enseigné la rigueur défensive. Les joueurs sont moins talentueux que leurs aînés, formatés trop tôt. L'instinct n'a pratiquement plus de rôle à jouer. Le spectacle n'est plus aussi chatoyant. Et ici les conditions climatiques, terrains gras en particulier, risquent de peser sur la qualité du jeu.
joel : On parle beaucoup de la nouvelle tenue vestimentaire des Camerounais, en une seule pièce avec des ouvertures sur le côté. Est-elle réglementaire ?
Gérard Dreyfus : Si la CAF l'autorise, elle le sera. Je pense que l'équipementier a pris cette fois ses précautions.
Milod :Que pensez-vous du Maroc ?
enki :Voyez-vous le Maroc sortir de son groupe ?
Gérard Dreyfus : Le Maroc nous a tellement déçu en Coupe d'Afrique qu'on a tendance à l'oublier, mais sa qualification pour les quarts, avec le Nigeria, est peut-être la combinaison la plus probable.
djangui.com :Que pensez-vous de l’organisation de la CAN en début d'année, compte tenu de tout ce qu’il se dit autour.
Gérard Dreyfus : Quand elle était au mois de mars, les Européens ont dit de la faire en janvier. A l'époque, c'était la trêve. Mais les calendriers sont tellement surchargés qu'on a abandonné plus ou moins la trêve. Juin serait idéal les années impaires. Mais dans nombre de pays, la pluie rend à cette période les terrains impraticables.
stipe : L'objectif de Lemerre est d'arriver où ?
Gérard Dreyfus : En finale, naturellement. Il a eu la préparation pour cela. Mais dispose-t-il des joueurs, à part Hatem Trabelsi, qui est vraiment sorti du train-train du championnat tunisien. Choyés chez eux, les joueurs manquent d'ambition et n'ont pas la volonté de se remettre en question et d'étalonner leur valeur dans des championnats de meilleur niveau.
mbakhane4 : Est-ce que le but en argent de la fifa sera appliqué dans cette CAN ?
Gérard Dreyfus : Non. Prolongations et tirs au but en cas d'égalité, comme lors des deux dernières finales.
farouk : Comment sont les infrastructures en Tunisie ?
Gérard Dreyfus : Impeccables. Il y a dix ans déjà, la Tunisie avait proposé cinq sites. La CAF avait dit non. Rien qu'à Tunis il y a trois stades, mais le Zouiten n'est pas en service cette fois. Bien des pays d'Afrique s'en satisferait.
joel : La CAN est-elle une compétition rentable? Il se dit que pour la première fois, la CAF aurait un sponsor officiel ?
Gérard Dreyfus : Rentable, non, sinon pour le groupe Sportfive dirigé par Jean-Claude Darmon. La CAF gagne aussi des sous qui lui permettent de vivre entre deux CAN. Les équipes dépensent de l'argent et le pays organisateur plus encore. Mais les recettes du football africain ne sont pas miraculeuses. On est à des années lumière d'une Coupe d'Europe, et plus encore d'une Coupe du monde.
Akim : Votre pronostic sur l'équipe-révélation du tournoi? Moi, je vois encore les Etalons du Burkina.
Gérard Dreyfus : Pourquoi pas. J'ai une affection particulière pour les Etalons et leurs Aigles voisins. Ils ont travaillé pendant plus de dix ans et sont toujours présents. Maliens et Burkinabé donnent la leçon aux mieux nantis qu'eux. Ils sont un exemple de ce qu'il faut faire pour avoir sa place parmi l'élite. Les Etalons continuent leur chemin, toujours présents depuis 96. Bravo. Pourquoi ne sortiraient-ils pas du premier tour comme, chez eux, en 1998.
mickey : Et les Egyptiens avec Mido, comment les sentez-vous? Ont-ils leurs chances ?
Gérard Dreyfus : La restriction, c'est que les Egyptiens sont timorés généralement en attaque. Avec Mido et Ahmed Belal, ils ont de quoi bousculer les défenses adverses. Jusqu'en 98, on pensait que les Egyptiens ne savaient pas voyager. C'est l’un des meilleurs footballs d'Afrique. En tout cas dans son expression sur le terrain, c'est le football le plus européen. Pas souvent spectaculaire alors qu'ils en ont les moyens.
mbakhane4 : Que faut-il à la CAF pour propulser le football africain au plus haut niveau ?
Gérard Dreyfus : Davantage d’argent, et de vrais dirigeants à la tête des fédérations. Qui prennent des initiatives, qui organisent le football des jeunes, qui aident les clubs en dotation financière et matérielle. A quoi servent donc les 250.000 dollars qu'ils reçoivent chaque année de la FIFA, sans compter les 400.000 dollars qu'ils ont reçus du projet « Goal » ? Est-on sûr de leur bonne utilisation ?
Merci beaucoup Gérard Dreyfus, le mot de la fin ?
Gérard Dreyfus : L'Afrique va vibrer de tout son cœur et de toute son âme. RFI pense à tous ceux qui sont les plus éloignés du continent et va essayer de les faire participer à la CAN comme s'ils se trouvaient en Tunisie. Merci à tous et bons matchs.
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23/01/2004
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