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France

Les «gueules noires» font grise mine

Des mineurs sortent d'une mine de l'est de la France après une journée de travail. La France a cessé l'extraction de la houille de son sous-sol en avril 2004. 

		(Photo: AFP)
Des mineurs sortent d'une mine de l'est de la France après une journée de travail. La France a cessé l'extraction de la houille de son sous-sol en avril 2004.
(Photo: AFP)
La dernière mine de charbon de France, situé à Creutzwald en Moselle, ferme définitivement ses portes vendredi 23 avril. Une fermeture qui marque la fin des «gueules noires» dans le pays, ces mineurs qui tout au long du siècle ont vu péricliter les Charbonnages de France. La fermeture du puits de la Houve sera marquée par de nombreuses expositions et rétrospectives historiques.

L’histoire industrielle du charbon français a commencé en 1720. Elle s’achève en 2004. Après la fermeture des Houillères du Nord-Pas-de-Calais en 1990 et celles des Houillères du Centre-Midi en 2003, l’arrêt des Houillères du bassin de Lorraine, met un point final à l’histoire du charbon en France. Le dernier bloc de houille noire doit être symboliquement extrait, vendredi 23 avril, au puits de Houve, à Creutzwald en Moselle, donnant le coup d'envoi à trois journées d'hommage à la mine et aux mineurs.

Quelque 2500 personnes sont attendues, tout au long du week-end, sous l'immense chapiteau dressé sur le site de La Houve, l'ultime survivant de l'épopée du charbon. Spectacle vivant, expositions et projections de films présenteront le travail des célèbres «gueules noires». Le site restera ouvert toute la semaine afin de permettre aux visiteurs qui le souhaitent de voir, pour la dernière fois, une mine en activité. Il fermera ensuite définitivement ses portes après avoir traité quelque 30 millions de tonnes de charbon au total.

Des emplois jugés «fragiles»

La fermeture du puits de la Houve signe la fin de trois cents ans d’exploitation du charbon en France. Depuis les débuts de l’exploitation en 1856, quelque 800 millions de tonnes de charbon ont été extraites en Lorraine. Avec les mines de fer, dont la dernière a été fermée en 1997, le charbon lorrain est à l’origine d’une industrie sidérurgique qui fut la richesse de la région, avant de la plonger dans les affres des restructurations industrielles.

La dernière mine de France met fin également à une épopée humaine. Bien que socialement préparé depuis vingt ans, l’arrêt de l’exploitation minière est plus que douloureuse pour les «gueules noires» comme l’explique Alain Rollet, directeur technique national des Charbonnages de France (CdF): «ça leur serre les tripes. C’est un arrachement pour les mineurs et on se doit de les accompagner dans ce travail de deuil». Aucun mineur n’a accepté avec enthousiasme la fermeture programmée des mines de charbon arrachée par le gouvernement en 1994 grâce au «Pacte charbonnier», signé par tous les syndicats sauf la CGT.

Ce pacte garantit notamment au mineur le congé charbonnier de fin carrière (CCFC) (80% du salaire jusqu’à la retraite dès 45 ans) sur la base du volontariat, et le reclassement pour les autres. L'arrêt de l'exploitation dans les bassins miniers pose des problèmes d’emplois qui n’ont pas trouvé de réponse satisfaisante, selon la CGT. Quelque 18 000 emplois ont été créés contre 22 000 supprimés depuis 1984, des emplois jugés «fragiles» selon le secrétaire général de la CGT, Yves Hockenberger: «ce sont des emplois au smic, avec de faibles qualifications». Dans leur majorité, les mineurs restent au sein des Charbonnages de France pour participer aux travaux de fermeture et de restauration des sites, jusqu’à leur départ à la retraite que la plupart atteindront d’ici 2008, date de l’extinction de l’entreprise publique.

Au plus fort de leur exploitation, après la Deuxième Guerre mondiale, les Charbonnages de France ont employé près de 360 000 mineurs et produit jusqu’à 60 000 millions de tonnes de houille. Le déclin est amorcé dès les années 60, le gouvernement socialiste de Pierre Mauroy tente un dernier plan de relance en 1981 qui se traduit par des milliers d’embauches. L’expérience est interrompue dès 1984, au vu des déficits croissants que doit subventionner l'Etat. Beaucoup trop coûteux à prospecter, la mort du charbon français est inéluctable. Le prix de revient du minerai national est, depuis 1960, supérieur au prix de vente, alors que les grands exportateurs comme l'Australie, l'Afrique du Sud et la Chine bénéficient de gisements plus accessibles (mines à ciel ouvert) et d'une main d'oeuvre bon marché.



par Myriam  Berber (avec AFP)

Article publié le 23/04/2004 Dernière mise à jour le 23/04/2004 à 14:32 TU