Justice
Jean-Christophe Mitterrand et la pêcherie de Mauritanie
(Photo : AFP)
Jean-Christophe Mitterrand convoquée à la brigade financière de Paris pour être entendu sur le financement de sa société de pêche basée en Mauritanie a immédiatement été placé en garde à vue par le juge financier Philippe Courroye. Dans le cadre de la même enquête un avocat, Rémy Wilner a également été mis en garde à vue. L’actuel président-directeur-général de la pêcherie mauritanienne Iwik, Laurent Fouchet a été également convoqué et entendu dans la même affaire.
L’affaire est partie de l’ancien associé de Jean-Christophe Mitterrand et actionnaire de la pêcherie Iwik, Olivier Collonge qui a été entendu par le juge Philippe Courroye sur les transactions financières liées à la création de la pêcherie. Le juge veut en savoir plus sur les transferts de fonds et en espèces qui ont permis le fonctionnement de la pêcherie alors que Jean-Christophe Mitterrand, mis en examen depuis fin 2000 dans une autre affaire de commerce illicite d’armes vers l’Angola, ne peut justifier de revenus conséquents puisque tous ses comptes bancaires sont bloqués. Or selon Olivier Collonge, entre 2001 et 2003, Jean-Christophe Mitterrand lui aurait versé entre 500 000 et 600 000 euros.
Jean-Christophe Mitterrand est soupçonné d’avoir reçu d’importantes sommes d’argent de l’homme d’affaires, Pierre Falcone pour faciliter des ventes d’armes en Angola. Le même juge en charge de ce dossier a été saisi de cette nouvelle affaire. C’est lui qui avait signifié au fils aîné de l’ancien président sa mise en examen pour «trafic d’influence, recel d’abus de biens sociaux et complicité de trafics d’armes». Il avait été écroué le 21 décembre 2000 avant de recouvrer la liberté le 11 janvier 2001 après le versement d’une caution de 5 millions de francs. Danièle Mitterrand, la mère avait alors parlé de «rançon», alors que son fils accusait le juge «d’hostilité poisseuse, avec une véritable expression de haine» à son égard. Gilbert Mitterrand, l’autre fils du président défunt, parle de «délit du patronyme».
Suspicion légitimeLe clan Mitterrand retrouve sur son chemin le même juge Philippe Courroye qui a ordonné une perquisition le 30 mars dernier au domicile de l’ancien président, rue de Bièvre à Paris. Quelques documents ont été saisis de même qu’aux cabinets des avocats Jean-Pierre Versini et Rémy Wilner perquisitionnés à la même date. Dès le 8 avril, un autre avocat de la famille Mitterrand, Patrice Spinosi a saisi la Cour de cassation d’une requête «en suspicion légitime» visant à obtenir le dessaisissement du juge Philippe Courroye. L’ancien bâtonnier Paul-Albert Iweins a apporté son soutien aux plaignants en critiquant les méthodes du juge qui a consulté «des éléments de défense» frappés du sceau du secret entre un avocat et son client. Finalement, le juge des libertés a ordonné la restitution des documents appréhendés parce qu’ils n’apportent aucune preuve d’implication des avocats dans le blanchiment présumé, mais la saisie des documents procèdent de la violation du secret professionnel. Le conseil de l’ordre des avocats de Paris a aussi condamné la perquisition effectuée aux cabinets des avocats de Jean-Christophe Mitterrand.
Pour défendre son fils, Danièle Mitterrand, âgée de 80 ans affirme avoir hypothéqué son appartement de la rue de Bièvre à Paris, ancienne résidence du président François Mitterrand, pour faire un prêt de 300 000 euros et a également mis en vente des meubles. «J’ai fait cela pour que cette usine (pêcherie Iwik) marche. Je veux que mon fils retrouve sa liberté de travailler et de vivre heureux. Moi, je n’ai plus besoin de rien, un lit et une assiette me suffiraient», a-t-elle déclaré.
Par ailleurs, l’ex-associé dans l’entreprise de pêcherie, Olivier Collonge a porté devant les tribunaux de Mauritanie le différend qui l’oppose qui à ses anciens partenaires. Il détenait 40% d’Iwik contre 57% à Jean-Christophe Mitterrand. En octobre 2003 un tribunal départemental de Nouakchott avait le nouveau PDG d’Iwik à verser une somme 935 000 euros Olivier Collonge. La Cour suprême de Mauritanie qui examine le recours des dirigeants d’Iwik a renvoyé au 21 juillet sa décision. A Paris, Jean-Christophe Mitterrand a bénéficié de la levée de la garde à vue, le 23 juin et a regagné le domicile familial dans le courant de l’après-midi.
par Didier Samson
Article publié le 23/06/2004 Dernière mise à jour le 24/06/2004 à 06:56 TU