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Soudan

L’armée dénonce la «déclaration de guerre» de l’ONU

Dans le camp de Mornay, les enfants sont les premières victimes des maladies et de la malnutrition. 

		(Photo : Olivier Rogez/RFI)
Dans le camp de Mornay, les enfants sont les premières victimes des maladies et de la malnutrition.
(Photo : Olivier Rogez/RFI)
L’armée soudanaise dénonce la résolution de l’ONU qui lui accorde 30 jours pour mettre fin aux atrocités dans le Darfour. Dans le même temps, la France mobilise 200 soldats pour une opération humanitaire au Tchad le long de la frontière soudanaise.
La résolution adoptée vendredi soir par le Conseil de sécurité de l’ONU n’en finit pas de faire des vagues au sein du pouvoir soudanais. Après avoir rejeté la résolution dans un premier temps et évoqué une « mobilisation générale » contre toute intervention étrangère, le gouvernement de Khartoum a indiqué samedi qu’il se conformerait au texte du Conseil de sécurité. Dimanche, sans revenir sur son accord, le gouvernement annoncé qu’il « regrettait » la résolution de l’ONU tout en y relevant des aspects positifs. Les autorités de Khartoum critique l’ONU pour « avoir passé sous silence » le rôle de la rébellion dans le déclenchement de la situation.

Lundi matin, c’est par l’entremise de la presse que l’armée soudanaise a fait entendre sa voix pour qualifier la résolution de « déclaration de guerre ». Dans une déclaration rapportée par le quotidien officiel Al-Anbaa, le porte-parole de l’armée, le général Mohamed Béchir Souleimane, affirme que « le Soudan est visé par des forces étrangères » et il accuse les Etats-Unis et d’autres puissances occidentales de se préparer à attaquer militairement le Soudan. Il appelle d’ores et déjà les médias soudanais à préparer le peuple « à une guerre non conventionnelle ».

30 jours pour faire cesser les exactions

Le texte de la résolution adoptée par 13 voix sur 15 (abstention de la Chine et du Pakistan) vendredi soir par le Conseil de sécurité de l’ONU donne à Khartoum un délai de 30 jours pour faire cesser les exactions dans la région du Darfour. Le texte stipule que le Soudan doit honorer les engagements qu’il a pris le 3 juillet dernier devant le secrétaire général de l’ONU concernant notamment le désarmement des milices janjawid qui sont à l’origine de la plupart des exactions perpétrées contre les populations noires du Darfour. Il est également demandé à Khartoum d’arrêter et de juger les responsables d’exactions. Si le régime soudanais ne se conforme pas à ces demandes, le Conseil de sécurité envisagera « d’autres mesures », notamment celles prévues à l’article 41 de la charte des Nations unies, c’est-à-dire « des mesures n’impliquant pas l’emploi de la force armée ».

En attendant que le délai de 30 jours accordé à Khartoum expire, la France, sur ordre de Jacques Chirac, a mobilisé 200 soldats de son contingent basé au Tchad pour une « opération humanitaire » destinée à porter assistance aux 180 000 réfugiés du Darfour qui se sont installés dans l’est du Tchad. Les soldats chargés de « sécuriser la frontière » tchado-soudanaise sont déployés pour le moment sur l’aéroport d’Abéché où ils aident à l’acheminement de l’aide humanitaire. Le gouvernement soudanais a fait savoir qu’il ne voyait « aucun mal à la présence de troupes françaises à la frontière pour accomplir une tâche humanitaire tant que cette action est menée en coordination avec le gouvernement tchadien ».

Khartoum accuse l’Erythrée

L’ONU estime que 30 000 personnes ont déjà trouvé la mort depuis le début de la crise au Darfour et que le nombre de personnes déplacées sur le territoire soudanais atteint 1 million tandis que 200 000 autres ont trouvé refuge au Tchad.

Autre signe de tension croissante au Soudan: les accusations lancées contre l’Erythrée par le gouverneur de l’Etat soudanais de Kassala, frontalier de l’Erythrée. Le général Farouk Hassan Mohamed Nour accuse le régime d’Asmara de soutenir les rebelles du Darfour. Dans une déclaration publiée par le quotidien soudanais indépendant Akhbar al-Youm, le gouverneur assure posséder des informations « sur un complot subversif appuyé par le gouvernement érythréen » et qui viserait à faire exploser les oléoducs, à couper l’autoroute entre Khartoum et Port-Soudan et à détruire d’autres installations situées à l’est du Soudan.

Déjà samedi, l’ambassadeur soudanais à Addis Abeba avait accusé l’Erythrée d’« entraîner les combattants des deux mouvements rebelles du Darfour » et d’« intervenir directement dans la prise de décision de leurs chefs ». Quoi qu’il en soit du rôle de l’Erythrée, une chose semble évidente: aujourd’hui, les mouvements rebelles du Darfour ne semblent avoir aucune raison de négocier du moins tant que la pression s’exercera uniquement sur Khartoum.

par Philippe  Couve

Article publié le 02/08/2004 Dernière mise à jour le 02/08/2004 à 11:28 TU

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Roland Marchal

Chercheur au CNRS et rédacteur en chef de la revue Politique Africaine

«Il y a beaucoup de travail à faire du côté de Karthoum.»

[02/08/2004]