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Criquets

Questions sur une invasion

Cet agriculteur montre les dégâts causés par les criquets pèlerins à son verger de pommiers, près d’Ain-Beni Mathar, au Maroc. Il a perdu toute sa récolte de fruits, et sa femme et lui devront compter sur leurs enfants qui travaillent pour se nourrir l’année prochaine. 

		(Photo: FAO/G. Diana)
Cet agriculteur montre les dégâts causés par les criquets pèlerins à son verger de pommiers, près d’Ain-Beni Mathar, au Maroc. Il a perdu toute sa récolte de fruits, et sa femme et lui devront compter sur leurs enfants qui travaillent pour se nourrir l’année prochaine.
(Photo: FAO/G. Diana)
Tous les pays sahéliens subissent actuellement une invasion de criquets. Les pays sub-sahéliens craignent aussi «une descente» du redoutable insecte et prennent déjà des dispositions. En revanche, les scientifiques qui connaissent parfaitement les modes de reproduction et de migration des acridiens suggèrent une meilleure politique préventive en Afrique.

Qui sont les criquets ?

Il existe au moins 12 000 espèces d’acridiens (famille des criquets) dont environ 500 sont nuisibles à l’agriculture. Parmi eux un groupe appelé «criquets-ravageurs» est composé de 5 types différents : le criquet pèlerin, le criquet migrateur, le criquet nomade, le criquet arboricole et le criquet sénégalais. Ces différentes espèces sont les plus répandues en Afrique.

  • Le criquet pèlerin couvre l’Afrique au nord de l’équateur, le Moyen-Orient, les péninsules arabique et indo-pakistanaise. Cette espèce, lors des invasions, n’épargne aucune culture. Elle endommage gravement la végétation et l’agriculture, prive le bétail de pâturage et peut causer par sa voracité une famine.
  • Le criquet migrateur trouve ses souches au Mali, dans la zone d’inondation du fleuve Niger. On rencontre également d’importantes souches dans le sud-ouest de Madagascar, la partie la plus aride de l’île, dans le bassin du lac Tchad et dans la région du Nil bleu au Soudan. Il est également connu sur le pourtour méditerranéen européen, en Asie orientale et en Australie. Il sévit dans les steppes et savanes et se nourrit de céréales.
  • Le criquet nomade est une espèce plus largement répandue en Afrique australe (Zambie, Tanzanie, Malawi). L’espèce est connue sur l’île de la Réunion et à Madagascar. Au Sahel, le delta central du fleuve Niger au Mali, le pourtour du lac Tchad et dans une moindre mesure les îles du Cap-Vert abritent des souches du criquet-nomade. Il recherche les grandes étendues herbeuses, les bas-fonds et les plaines inondées par saison.
  • Le criquet arboricole se distingue par la composition d’essaims denses et sombres agglutinés de jour sur des arbres. En Egypte, en Afrique de l’est, en Arabie et en Afrique du Sud cette espèce est bien connue et regroupe une douzaine de sous-espèces. Les essaims se déplacent sur de petites distances et surtout de nuit. Les criquets arboricoles sont des ravageurs occasionnels d’arbres fruitiers, d’agrumes, de maïs, de sorgho, de manioc et de coton.   
  • Le criquet sénégalais se répand dans les zones sahéliennes, des îles du Cap-Vert à la corne de l’Afrique, en Arabie, en Inde, au Pakistan et au Moyen-Orient. Ils s’attaquent cultures céréalières dans les zones tropicales sèches.  

Quels sont les facteurs de reproduction ?

Les conditions climatiques favorisent la formation d’essaims. Pluies, humidité du sol en zones arides sont des facteurs qui favorisent la ponte de œufs, l’incubation et le renouvellement des générations qui peuvent monter à 3 par an. Le développement de l’agriculture et d’une certaine végétation en zone aride est un élément favorisant le développement des souches de criquets, du fait de l’irrigation des aires. En revanche, lorsque les conditions de productions sont contrôlées, on remarque un net recul du développement des souches de criquet. C’est le cas dans le delta central du fleuve Niger au Mali, où l’installation d’un barrage pour contrôler la crue et la décrue du fleuve, le développement des cultures attelées, la sédentarisation des troupeaux a réduit la pullulation du criquet.

Les invasions sont-elles prévisibles ?

«Oui», répond Michel Lecoq, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) basé à Montpellier en France. «Les conditions climatiques favorables sont connues et enregistrées, les périodes de ponte et d’incubation sont aussi connues, alors le développement des essaims n’est plus aujourd’hui une fatalité», précise le chercheur qui fait remarquer que le fléau est actuellement moins un problème de moyens que celui d’une «mauvaise organisation pour lutter contre le phénomène». En effet, les pays africains qui subissent le passage des criquets tirent la sonnette d’alarme afin d’obtenir de la communauté internationale des moyens dans l’urgence, alors que ces mêmes moyens auraient pu être mobilisés pour contenir l’invasion quelques mois plus tôt. Les essaims de criquets sont actuellement portés par des vents qui les poussent vers le sud du Sahara, «mais bientôt les vents tourneront et les criquets se retrouveront au Maghreb», précise Michel Lecoq. Dans la lutte anti-acridienne, le Maroc semble être le pays le mieux outillé pour lutter contre le phénomène.

Pour en savoir plus :

Les acridiens (sur le site du Cirad)

http://locust.cirad.fr/acridiens



par Didier  Samson

Article publié le 07/09/2004 Dernière mise à jour le 07/09/2004 à 13:21 TU