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L'Afrique à l'écart des investissements

Centre d'appel au Sénégal. La mondialisation profite peu à l'Afrique. 

		(Photo: AFP)
Centre d'appel au Sénégal. La mondialisation profite peu à l'Afrique.
(Photo: AFP)
La Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement a publié son rapport annuel sur l’investissement dans le monde qui met en exergue la place prépondérante du secteur des services. Les flux d’investissements étrangers directs sont en progression, mais les pays en développement et ceux d’Afrique en particulier n’en sont pas les principaux bénéficiaires.

Le rapport de la Cnuced table sur une reprise des investissements étrangers directs (IED) dans la plupart des pays développés à mesure que la croissance économique s’accélère. Ces dernières années, la tendance était plutôt à la baisse dans les pays développés pour s’établir à 560 milliards de dollars, soit une chute de18% par rapport à la fin des années 80 et début des années 90. En revanche, l’IED à destination des pays en développement est en progression de 9%, passant de 158 milliards de dollars en 2002 à 172 milliards en 2003. La Chine, principale destination de l’IED en 2003, n’a pas été intégrée au calcul des experts de la Cnuced.

En Afrique le courant de l’IED a progressé de 28% pour atteindre 15 milliards de dollars en 2003. Les investissements ont surtout été dans les ressources naturelles. Ces apports proviennent des sociétés transnationales (STN) des pays développés. Les politiques nationales favorables à l’investissement étranger et la signature de plusieurs accords bilatéraux, des accords de libre-échange entre pays africains et zones économiques en particulier les Etats-Unis et l’Union européenne ont permis à plus d’une vingtaine de pays africains de profiter de cette manne étrangère à raison de 0,1 milliard de dollar. Mais quatre pays africains, l’Angola, la Guinée équatoriale, le Nigeria et le Soudan, ont enregistré des entrées d’IED supérieures à 1 milliard de dollars. Par ailleurs, le principal bénéficiaire en Afrique est le Maroc qui a connu une fulgurante évolution des IED:  0,5 milliard de dollars en 2002 à 2,3 milliards de dollars en 2003. Cette progression est essentiellement due au programme de privatisation conduit par le gouvernement marocain.

Ces chiffres profitent surtout à plus de 50 sociétés transnationales des pays développés contre seulement 7 sociétés africaines toutes implantées en Afrique du Sud. Cette évolution «peut aider les pays en développement à participer aux chaînes mondiales de valorisation dans le secteur des services», précise le rapport de la Cnuced qui pense aussi que l’accès aux marchés internationaux des produits africains passe inévitablement par ce biais. En ce sens, la Cnuced rejoint les réflexions du Nouveau partenariat pour le développement en Afrique (Nepad) qui met un accent particulier sur les exportations de produits et non plus seulement de ressources naturelles pour assurer une place à l’Afrique dans les transactions mondiales.

Mais cette recherche de conformité aux normes internationales pour gagner un marché extérieur dans le but d’attirer des capitaux étrangers peut conduire à des situations de monopole qui exposeraient les pays «à des abus de position dominante». Pour pallier ce risque, la Cnuced invite les pays africains à définir «une panoplie de politiques qui convient le mieux» au développement des pays. Autrement dit, la captation des IED devrait correspondre à un ensemble de programme qui participe à l’essor du pays bénéficiaire. Dans cette optique le secteur des services expose moins les pays en développement aux risques liés au monopole, semble observer la Cnuced.

La délocalisation qui accompagne l’activité de production, surtout dans le domaine des services est une voie d’avenir «qui est encore à ses débuts», précise la Cnuced. Mais l’évolution du phénomène concerne en premier lieu les pays développés. La tendance Nord-Sud est encore marginale. Les plus grands bénéficiaires de la délocalisation des services (banque, assurances, télécoms, etc.) sont l’Irlande, le Canada, Israël et l’Inde qui cumulent plus de 70% de part de marché. Les pays développés prennent également, dans ce secteur, plus des deux-tiers de l’IED. C’est en Europe que le taux de progression le plus important des délocalisations de services a été noté passant de 0,5 milliard de dollar à plus de 10 milliards de dollars, soit une évolution de 37% en 2002 à 51% en 2003.Selon la Cnuced, «l’absence de reconnaissance internationale des qualifications professionnelles (…), l’absence de règles convenues au niveau mondial concernant la protection de l’information confidentielle» sont des obstacles dont pâtissent les pays en développement.

Or, de nombreux avantages sont liés à ce phénomène: emploi, progrès technique, amélioration des compétences et des infrastructures, mais l’Afrique reste le dernier du peloton des destinations privilégiées par la délocalisation des services. Les guerres et autres instabilités politiques ne sont pas étrangères à ce désintérêt pour le continent africain.



par Didier  Samson

Article publié le 23/09/2004 Dernière mise à jour le 23/09/2004 à 16:26 TU