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Otages français en Irak

Faux espoirs de libération pour Christian Chesnot et Georges Malbrunot

Philippe Brett, l'émissaire de Didier Julia, affirme être en contact direct avec les ravisseurs et les captifs. 

		(Photo : AFP/France2)
Philippe Brett, l'émissaire de Didier Julia, affirme être en contact direct avec les ravisseurs et les captifs.
(Photo : AFP/France2)
Vendredi, le député français de l’UMP Didier Julia avait convié la presse à Damas promettant, pour dix-huit heures trente, l’arrivée dans la capitale syrienne des deux journalistes français, Christian Chesnot et Georges Malbrunot, et de leur chauffeur syrien. Quelques heures plus tôt, son émissaire auprès des ravisseurs, Philippe Brett, avait affirmé, sur la radio française Europe 1, qu’il se trouvait déjà auprès des captifs et se préparait à rejoindre Damas avec eux. Le convoi n’est pas arrivé et Didier Julia accuse l’armée américaine de l’avoir attaqué, tuant six gardes irakiens. Il dénonce aussi l’intervention croisée d’ «émissaires disant agir au nom de la France». Il affirme que «les otages sont terrés et mis en sécurité», en Irak.

«Les forces américaines veulent absolument éliminer les gens qui les gardent et les protègent», en l’occurrence «les résistants irakiens», a déclaré Didier Julia pour expliquer l’échec de son opération. «Depuis l'annonce du retour des journalistes, les Américains ont multiplié les bombardements…Ils ont installé vingt barrages sur la route et j'ai la douleur de vous faire savoir que l'équipe qui sécurise les journalistes a eu six tués, les cinq maisons où nos amis ont habité ont été pilonnées et détruites», a-t-il poursuivi, mais les otages seraient sains et saufs. «Rien de cela n'est vrai…je ne suis au courant d'aucun rapport disant que ces informations soient correctes ou avérées», a immédiatement répliqué à Bagdad le porte-parole américain, le vice-amiral Greg Slavonic. Côté français, la circonspection reste de rigueur.

Jacques Chirac «inquiet de l’immixtion» du député Julia

«J'attendais un retour des journalistes aujourd'hui, ce retour ne s'est pas fait pour des raisons de sécurité et des types qui disent agir au nom de la France sont descendus dans la région, porteurs de valises de billets de banque. Le Conseil national de la résistance a exprimé son dégoût et sa répulsion pour de tels agissements», affirme aussi Didier Julia, alourdissant la confusion qui entoure le chassé-croisé d’interventions traditionnellement plus discrètes, qu’elles soient officielles ou parallèles. Fort de ses amitiés bassistes, en Irak et en Syrie, Didier Julia, veut toujours croire à ses chances de succès. Arrivé jeudi à Damas, il assure qu’il a rencontré vendredi des responsables de la «résistance irakienne» et qu’il va rester ce samedi sur place pour «faire progresser les choses». «Si je pensais que l'affaire pouvait capoter, je vous aurais donné des preuves concrètes sur notre action, mais comme je ne le pense pas je ne vous en donnerai pas», a-t-il dit à la presse réunie à Damas.

Du côté des autorités françaises, l’Elysée, les ministères des Affaires étrangères et de la Défense ainsi que l'Assemblée nationale, ont publiquement marqué leurs distances ces derniers jours vis-à-vis de l’entremise parallèle du député de la majorité. Le chemin de Damas n’a rien d’attractif pour la diplomatie française où Didier Julia tente de l’entraîner. En outre, selon le quotidien français Libération, habitué du Moyen Orient mais aussi des réseaux de la «Françafrique», Didier Julia aurait impliqué un président en quête de respectabilité, l’Ivoirien Laurent Gbagbo, qui aurait fourni un avion à son équipe, via «Aziz, un marchand d’armes saoudien vivant à Paris». L’entreprise Julia met d’autant plus la diplomatie française dans l’embarras que nul n’a intérêt à faire capoter la libération des otages. Vendredi soir en tout cas, le Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin reconnaissait que les nouvelles sur les otages «ne sont pas aujourd'hui complètes». Il ajoutait quand même que «nous sommes dans une hypothèse favorable de libération, mais les conditions sont particulièrement difficiles dans un pays particulièrement chaotique».

Samedi, le président français, Jacques Chirac a fait savoir qu’il est «inquiet de cette immixtion dans un processus délicat». Il «espère surtout» que l’initiative de Didier Julia «ne sera pas négative» pour les otages, captifs depuis le 20 août. Dépêché à Amman dans la nuit de jeudi à vendredi, le secrétaire général du ministère français des Affaires étrangères, Jean-Pierre Lafon estime qu’il faut faire preuve de «patience, de persévérance et de discrétion». «Aujourd'hui, il semble qu'il y ait eu beaucoup de choses erronées ou mensongères», explique l’Elysée où l’entourage de Jacques Chirac souligne qu’il ne fallait négliger aucune chance, si faible soit-elle, pour obtenir la libération des otages.



par Monique  Mas

Article publié le 02/10/2004 Dernière mise à jour le 02/10/2004 à 12:25 TU