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Forum social européen de Londres

En quête d’un second souffle

Les participants du 3ème Forum social européen ont défilé, dimanche 17 Octobre, dans les rues de Londres. 

		(Photo : AFP)
Les participants du 3ème Forum social européen ont défilé, dimanche 17 Octobre, dans les rues de Londres.
(Photo : AFP)

Le 3ème Forum social européen s'est achevé dimanche à Londres par un appel des mouvements sociaux en faveur de la paix et d'une Europe sociale, proposant aux militants altermondialistes un calendrier de mobilisation. L'événement, organisé sur trois jours, a réuni près de 20 000 personnes provenant de quelque 65 nationalités différentes, les délégations françaises et italiennes étant les plus importantes.


De notre correspondante à Londres

«C'est un grand succès», pour les organisateurs du FSE, épuisés mais soulagés, la mission est accomplie, mieux, ils ont tenu à préciser que «Londres n'avait en fait jamais vu quelque chose de cette taille». Et pour cause: altermondialistes anonymes, écologistes, syndicalistes, pacifistes et membres de la classe politique venus de toute l'Europe et du reste du monde se sont retrouvés dans la capitale britannique pour partager leurs vues lors de pas moins de 500 conférences, ateliers et séminaires. Pourtant le Forum n’avait pas débuté sous les meilleurs auspices: organisé en terre libérale par le très gauchiste maire de Londres, Ken Livingstone, surnommé «Ken le Rouge», le Forum se voulait un pied-de-nez à la City. Or, le soir même de l’ouverture de ce grand rendez-vous, des milliers de participants se retrouvaient sous une pluie battante à faire la queue pendant des heures devant un bâtiment trop petit afin de pouvoir s’inscrire... Pire la soirée inaugurale durant laquelle monsieur le Maire, mais surtout Aleida Guevara, la fille du Che et le président du Sinn Fein Gerry Adams ont prononcé des discours enflammés, avait été organisée dans une chapelle trop petite pour laisser rentrer tout le monde et nombre de militants amers ont dé rebrousser chemin...

Malgré tout, une fois le forum lancé, beaucoup ont souligné la qualité des débats qui ont tourné autour de six grands thèmes: guerre et paix; démocratie et droits fondamentaux; justice sociale et solidarité; mondialisation des multinationales et justice mondiale; contre le racisme, la discrimination et l'extrême droite, pour l'égalité et la diversité; crise environnementale et développement durable. Le Forum s’est terminé dimanche par une manifestation contre la guerre en Irak, où entre 15 et 20 000 protestataires sont venus réclamer l’arrêt immédiat des bombardements en Irak et la restitution de la souveraineté au peuple irakien.

Manifestation le 19 mars à Bruxelles

En effet le Forum social européen se tenant cette année dans la capitale d'un pays dont le gouvernement soutient activement la politique américaine en Irak, la dénonciation de la guerre et l'Irak ont été, plus encore qu'à Florence ou à Paris (où s’étaient tenus les deux premiers FSE), au cœur des débats. Mais pas seulement, ainsi le thème des «syndicats et des droits des travailleurs à l'ère de la mondialisation» a également été abordé, de nombreux responsables syndicalistes européens faisant le constat que les syndicats européens «restaient trop enfermés sur leur horizon national», selon les termes du Français Alain Baron (Sud-PTT).

Enfin, autre thème de débats important, celui-là ne faisant pas l'unanimité: la question d'approuver ou non la Constitution européenne à l'occasion d'un éventuel référendum, a profondément divisé les altermondialistes. Certains ont appelé à voter non, estimant que le texte adopté par les 25 pays de l'Union européenne érige en principe «le néolibéralisme» auquel s'opposent, justement, les militants altermondialistes.

D'autres interlocuteurs au contraire ont mis en avant la stratégie consistant à «utiliser la Constitution comme instrument pour améliorer l'Europe sociale». D’où l’appel à une journée de mobilisation dans tous les pays européens le 19 mars prochain, avec une grande manifestation à Bruxelles.

Un calendrier de mobilisation ou peut-être même de re-mobilisation à un moment o le FSE semble chercher un second souffle. Certes, trois ans après le premier Forum social mondial de Porto Alegre au Brésil et après les FSE de Florence et de Paris, l'organisation peut se flatter de voir certains thèmes repris par les dirigeants à travers le monde. On a ainsi entendu le président français Jacques Chirac et son homologue brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva plaider en faveur d'un impôt mondial contre la pauvreté, la dette des pays pauvres a été réduite, les modèles agricoles sont discutés au niveau européen aussi bien qu'international, et l'Organisation mondiale du commerce autorise les pays en développement à recourir aux médicaments génériques en cas de crise sanitaire.

Mais malgré les succès, le mouvement, extrêmement hétérogène en raison des multiples formations qui le composent, a aussi atteint des limites: les impressionnantes marches pacifistes n'ont pas empêché la guerre en Irak, les multinationales continuent de considérer le social comme accessoire et les paradis fiscaux existent toujours.

Le FSE doit donc remobiliser ceux qui seraient tentés de baisser les bras par découragement ou satisfaction, et gagner de nouveaux «alters» pour assurer sa pérennité.



par Muriel  Delcroix

Article publié le 18/10/2004 Dernière mise à jour le 18/10/2004 à 08:26 TU