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Proche-Orient

Arafat inhumé dans la ferveur

Une foule compacte de Palestiniens accompagne la dépouille de Yasser Arafat, le 12 novembre. 

		(Photo : AFP)
Une foule compacte de Palestiniens accompagne la dépouille de Yasser Arafat, le 12 novembre.
(Photo : AFP)
Une foule dense et débordante d’émotion a submergé les services de sécurité de Ramallah pour pénétrer dans l’enceinte de la Mouqataa où un caveau a été aménagé jeudi. La ferveur populaire de Ramallah tranche avec les obsèques officielles du Caire réservées au dignitaires étrangers.

Une marée humaine débordante d’émotion a accueilli l’hélicoptère qui ramenait Yasser Arafat du Caire après les obsèques internationales organisées vendredi matin non loin de l’aéroport de la capitale égyptienne où il est né en 1929. Aux cris de «avec notre âme, avec notre sang, nous te soutiendrons Abou Ammar», le nom de guerre de Yasser Arafat, la ferveur  palestinienne a même retardé la sortie du cercueil, difficilement tiré de l’hélicoptère militaire égyptien par les bérets verts de la sécurité palestinienne. Recouvert d'un drapeau palestinien, placé sur une plate-forme roulante vite submergée par la foule, le cercueil de Yasser Arafat a rejoint le caveau de béton aménagé jeudi à côté de la Mouqataa, son dernier quartier général où Israël l’avait reclus ces trois dernières années, un ancien fort britannique de Ramallah, en Cisjordanie. Enveloppé d’un linceul blanc, Yasser Arafat a été placé en début d'après-midi dans ce que ses partisans espèrent ne pas être sa dernière demeure. Pour rappeler son voeu d'être inhumé à Jérusalem, le chef des tribunaux religieux palestiniens, Cheikh Tayssir al-Tamimi a versé dans la tombe «de la terre de Jérusalem» apportée à la demande des autorités palestiniennes.

L'armée israélienne avait déployé des renforts considérables pour boucler la Cisjordanie. En Israël, la police avait été placée à son niveau d'alerte maximum et des restrictions draconiennes réservaient aux résidents agés de plus de quarante-cinq ans l'accès à l'esplanade des Mosquées de Jérusalem-est. Malgré les interdictions et les obstacles à leurs déplacements, des dizaines de milliers de Palestiniens (100 000 selon l'agence France presse) ont tenté d'embrasser le cercueil de Yasser Arafat, emportant la sécurité palestinienne dans la même émotion, les bérets verts dressés sur le cercueil brandissant la bannière jaune-blanc-vert-noir un instant remplacée par un keffieh noir et blanc. Au rythme des clameurs de douleur et de fierté, au son des rafales tirées au ciel, en hommage au défunt ou pour contenir la foule, les Palestiniens de Ramallah ont offert à Arafat le cérémonial funèbre populaire exclu des obsèques officielles du Caire. Ils l'ont fait en débordant le service d'ordre palestinien, mais dans une immense dignité.

Honneurs militaires

Vendredi matin, dans un mosquée proche de l’aéroport international du Caire, en zone militaire, une cérémonie solennelle fermée au public avait rassemblé une quarantaine de dirigeants étrangers, parmi lesquels de nombreux chefs d'Etat et des monarques arabes. Le cercueil, couvert du drapeau palestinien, est arrivé dans la petite mosquée Al Galaa porté par huit officiers égyptiens. La prière des morts a été prononcée par le recteur d’Al-Azhar, Cheikh Mohammed Sayyed Tantaoui, la plus haute autorité de l’islam sunnite qui a salué Arafat pour avoir «rempli sa mission de défenseur de la cause palestinienne avec courage et honnêteté».

Les honneurs militaires sont rendus au leader palestinien. 

		(Photo : AFP)
Les honneurs militaires sont rendus au leader palestinien.
(Photo : AFP)

Debout et rangés selon un ordre protocolaire aux côtés d’un récitant du Coran, les responsables palestiniens ont reçu les condoléances de l’assistance. Le président de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Mahmoud Abbas, le chef du Fatah (le mouvement de Yasser Arafat), Farouk Kaddoumi, le président du Conseil législatif qui assure également l’intérim à la tête de l’Autorité palestinienne, Raouhi Fattouh ainsi que le proche conseiller du défunt, Yasser Abed Rabbo, ont ensuite assisté aux honneurs militaires rendus également en présence de la veuve, Souha Arafat et de sa sa fille Zahwa, accompagnées de l’épouse du président égyptien.

Une marche funèbre symbolique a vu les participants, triés sur le volet, suivre sur quelques centaines de mètres le cercueil de Yasser Arafat, placé sur un affût de canon et tiré par six chevaux noirs. L’absence de participation populaire, interdite pour raisons de sécurité, laisse néanmoins un goût amer, en particulier aux Palestiniens. La cérémonie avait du reste était annoncée comme devant être «officielle, limitée et militaire» par l’Egypte qui l’a organisée pour ceux des dignitaires étrangers qui ne peuvent pas se rendre dans les territoires palestiniens. Le Caire a donc accueilli le roi Abdallah II de Jordanie, le prince héritier saoudien Abdallah, le président syrien Bachar el Assad, mais aussi ses homologues algérien et tunisien, Abdelaziz Bouteflika et Zine Ben Ali, indonésien Susilo Bambang Yudhoyono ou sud-africain, Thabo Mbeki.

Aucun chef d'Etat occidental n'a en revanche fait le déplacement au Caire, la France ou l’Espagne délégant leurs ministres des affaires étrangères, l’Allemand Joschka Fischer ratant la cérémonie pour cause d’embouteillage aérien et les Etats-Unis se faisant représenter par leur secrétaire d'Etat adjoint chargé du Proche-Orient, Williams Burns.


par Monique  Mas

Article publié le 12/11/2004 Dernière mise à jour le 12/11/2004 à 13:58 TU

Audio

Dominique Roch

Envoyée spéciale permanente de RFI au Proche-Orient

«La foule a envahi tous les recoins de la Mouqataa.»

[12/11/2004]

Javier Solana

Haut représentant de l'Union européenne pour la politique étrangère

«Les Palestiniens perdent un leader.»

[12/11/2004]

Lakhdar Brahimi

Conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies

«Yasser Arafat était un homme marié à la cause palestinienne.»

[12/11/2004]