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Sommet de la francophonie: Ouagadougou 2004

La Francophonie entend marquer sa place sur la scène internationale

Le Xe sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), en novembre 2004 à Ouagadougou, est l’occasion de réaffirmer les ambitions de ses pays membres, du Nord comme du Sud. Et notamment celle de jouer un rôle important sur une scène internationale en proie aux aspirations hégémoniques des États-Unis et aux pressions des chantres de la mondialisation à tout crin.

 Le secrétaire général de l’OIF, l’ancien président sénégalais Abdou Diouf, l’a souligné à l’occasion de la journée mondiale de la Francophonie en mars 2004. « Etre francophone aujourd’hui, c’est placer la solidarité au centre de notre action, c’est montrer au monde que la voie que nous avons choisie, celle d’un "humanisme de la différence", doit permettre de mieux répondre aux injustices et aux inégalités, au besoin de paix et de développement », a-t-il dit. Le sommet a d’ailleurs pour thème « La Francophonie, espace solidaire pour un développement durable ». Dans ce cadre, la Francophonie cherche à participer activement aux processus politiques et économiques internationaux. Elle possède pour ce faire à la fois des atouts et des faiblesses, qu’elle essaie de surmonter par le dialogue et à travers notamment des accords de partenariat ou des actions conjointes avec des organisations internationales ou régionales.

L’OIF compte en effet pour le moment 56 pays et gouvernements membres, dont deux pays membres du G8 (France et Canada), huit gouvernements membres de l’Union européenne (UE), cinq pays membres de l’Organisation de coopération et de développement (OCDE), trente pays membres des Etats d’Afrique et des Caraïbes et du Pacifique (ACP, liés à l’UE par les accords de Cotonou) dont 27 appartiennent à l’Union africaine. Elle compte près de 10 % de la population mondiale (580 millions d’habitants) et contribue pour près de 12 % au PIB mondial (3 300 milliards d’euros). Mais 87 % de cette richesse est produite par les cinq entités les plus développées – France, Canada, Québec, Communauté française de Belgique et Suisse – qui comptent seulement 19 % de la population des pays francophones.

L’hétérogénéité de l’ensemble favorise un dialogue « ouvert et fécond »

L’ensemble francophone est donc hétérogène ce qui, selon les experts, rend parfois difficile l’élaboration de positions communes tout en favorisant un dialogue « ouvert et fécond » entre les cultures. Ils soulignent que l’OIF a pour ambition de permettre à ses membres, unis par une langue et des valeurs communes, de mieux s’intégrer dans la communauté internationale, tout en conservant leur autonomie d’action et leurs identités propres. L’organisation n’est pas un bailleur de fonds au sens strict mais elle finance des opérations, toujours ciblées, ses moyens étant essentiellement destinés à organiser et suivre la concertation, la formation et l’information de ses membres.

Les Francophones ont pris l’habitude de se réunir en marge des grandes négociations internationales pour définir une position commune, même s’ils restent plus actifs sur le plan politique qu’économique. Ainsi, au sein de l’Union africaine, les Anglophones se sont toujours montrés plus dynamiques. Cela pourrait changer avec la nomination de l’ancien président malien Alpha Oumar Konaré, un francophone, à la tête de la Commission de l’UA. Konaré a indiqué, à l’issue d’une rencontre avec Abdou Diouf en janvier 2004, qu’il souhaite élaborer une stratégie visant à renforcer l’utilisation de la langue française au sein de la Commission et des autres organes panafricains.

Abdou Diouf a d’ailleurs pris des initiatives dans le même sens pour assurer que la mondialisation n’écarte pas le français du concert international. Il a ainsi mandaté un « grand témoin francophone », Hervé Bourges, aux Jeux olympiques d’Athènes (août 2004) pour vérifier que le principe d’équité linguistique était respecté, le français étant langue officielle du mouvement olympique au même titre que l’anglais. Auparavant, Abdou Diouf a rencontré, le 12 juillet à Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères des pays européens membres de la Francophonie ou candidats à l’adhésion, pour évoquer avec eux la place du français dans les institutions européennes et la diversité culturelle et linguistique. L’Autriche, la Grèce et la Hongrie, appartenant déjà à l’Union européenne, ont officiellement déposé leur candidature à l’OIF. Cinq nouveaux membres de l’UE élargie, dont la Pologne, sont déjà membres observateurs de l’OIF et deux membres de l’organisation, la Bulgarie et la Roumanie, devraient se joindre à l’UE en 2007.

Renforcer le fonctionnement du système multilatéral

La Francophonie s’efforce par ailleurs de développer sa coopération avec les organisations qui cherchent à renforcer le fonctionnement du système multilatéral pour parvenir à une équité croissante dans les relations économiques internationales. L’OIF est déjà bien introduite auprès des Nations unies, en particulier dans le cadre de médiations que l’une ou l’autre a entreprises pour régler crises ou conflits. Elle collabore depuis longtemps avec une série d’organismes de l’Onu tels que l’Unesco, l’Unicef, la FAO ainsi que le Pnud et la Cnuced.

L’organisation entretient aussi des relations étroites avec les institutions financières internationales dont le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, et s’est également assuré un accès régulier auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Cela lui a permis d’alerter ses membres sur l’évolution des grandes questions, notamment agricoles. L’OIF a assuré un suivi soutenu de l’initiative des producteurs africains du coton pour obtenir un traitement équitable de leurs exportations face aux restrictions américaines.

Elle a en général favorisé la concertation entre pays francophones, par exemple à la Conférence ministérielle de l’OMC à Cancun (septembre 2003). Elle a surtout travaillé pour le renforcement de leurs compétences à la fois dans le cadre de programmes propres et en association avec l’Institut de l’OMC et le Centre du commerce international. La Francophonie accorde en effet une attention particulière à l’insertion de ses membres les plus pauvres dans le commerce mondial, afin qu’ils puissent accueillir les investissements indispensables, développer leurs capacités et renforcer leurs entreprises pour qu’elles puissent se défendre face à la mondialisation grandissante.

Pour atteindre ses objectifs, l’OIF collabore désormais également avec des groupements régionaux comme la Cedeao (Afrique de l’Ouest) ou la Ligue des Etats arabes mais également l’Organisation de la conférence islamique et même son aîné et rival linguistique, le Commonwealth, qui réunit les anciennes colonies britanniques.



par Marie  Joannidis

Article publié le 16/11/2004 Dernière mise à jour le 16/11/2004 à 13:43 TU