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Otages français en Irak

La version de Mohammed al-Joundi

Mohammed al-Joundi, le chauffeur syrien des deux journalistes français retenus en otages en Irak, a lancé «<EM>un appel</EM>» pour leur libération. 

		(Photo: Philippe Couve/RFI)
Mohammed al-Joundi, le chauffeur syrien des deux journalistes français retenus en otages en Irak, a lancé «un appel» pour leur libération.
(Photo: Philippe Couve/RFI)
Accompagnateur en Irak des journalistes français Christian Chesnot (RFI) et Georges Malbrunot (Le Figaro), Mohammed al-Joundi a tenu une conférence de presse à Paris, 9 jours après son arrivée en France.

Mohammed al-Joundi s’exprime en langue arabe et il s’avoue fatigué. Ses presque trois mois de détention en Irak l’ont marqué. «J’ai perdu du poids», avoue-t-il tout en précisant immédiatement qu’il n’a jamais été victime de mauvais traitements de la part de ses ravisseurs et qu’il a été nourri comme ils se nourrissaient eux-mêmes.

Sur le sort de Christian Chesnot et Georges Malbrunot, Mohammed al-Joundi ne peut pas dire grand chose et pour cause: les deux journalistes français et leur fixer (accompagnateur que les journalistes emploient en raison de sa connaissance du pays) ont été séparés au bout de 15 jours de détention. Mohammed al-Joundi affirme toutefois que leur «situation n’est pas mauvaise et que nous pouvons espérer les revoir bientôt».

Un premier groupe de ravisseurs

L’enlèvement des journalistes français et de leur accompagnateur a eu lieu le vendredi 20 août. «Nous allions à Najaf et nous étions sur la route de Kerbala lorsque nous avons été arrêté par un groupe armé qui circulait en voiture», raconte Mohammed al-Joundi, «ils nous ont bandé les yeux, lié les mains et ils nous ont mis dans le coffre des voitures». Sur la suite des événements, le témoignage de Mohammed al-Joundi devient confus, les dates se mélangent un peu. Il explique que les ravisseurs les ont remis ensuite à un autre groupe armé: l’Armée islamique en Irak.

Les nouveaux geôliers des trois hommes les retiennent dans une maison à la campagne. Les deux journalistes français et leur fixer ne voient jamais leurs visages. «Ils se comportaient de manière amicale» affirme Mohammed al-Joundi, «ils nous ont remboursé pour les objets que le premier groupe de ravisseurs nous avait volé (téléphone, ordinateur) et ils nous ont rendu nos montres».

Ensuite, les deux journalistes français sont contraints de participer à la première vidéo tournée par l’Armée islamique en Irak. Mais tout se passe de manière «calme et amicale», selon Mohammed al-Joundi qui ajoute qu’à l’issue du tournage les trois hommes sont transférés dans une autre pièce de la maison, «une cellule ˝trois étoiles˝ comme ils disaient», précise l’ancien otage.

Séparé des deux journalistes au bout de 15 jours

Au bout de 15 jours, Mohammed al-Joundi est séparé des deux journalistes français dont il n’aura plus de nouvelles directement jusqu’à ce jour. Les seules rumeurs qui parviennent à lui sont ces «confidences» d’un gardien qui lui laisse entendre «vers le milieu de ma période de détention» que ses amis «vont être libérés en Syrie». Tout au long de sa détention, Mohammed al-Joundi affirme n’avoir jamais su quelles étaient les motivations de ses ravisseurs, mais il avance pourtant qu’il s’agissait d’un enlèvement politique et il qualifie l’Armée islamique en Irak de «groupe de résistance contre l’occupation».

Mohammed al-Joundi dit qu’il n’en sait pas plus. Alors il raconte les conditions de sa rencontre avec les deux journalistes français chez un ami commun, quelques semaines après la chute de Bagdad. Les deux journalistes décident d’employer ce réfugié politique syrien qui vit en Irak depuis 30, qui est membre du parti Baas (parti de Saddam Hussein) et qui se définit comme un «nationaliste arabe» afin d’enquêter, dans un premier temps, sur les dessous de la chute de Bagdad. Mohammed al-Joundi, qui ne parle pas français, leur sert à rencontrer les hommes qui comptent dans les structures du parti Baas et de l’armée. C’est ainsi que débute leur collaboration, témoigne Mohammed al-Joundi.

Après avoir été transféré à six reprises d’une cache à une autre, il est finalement libéré le 17 novembre à la suite de l’offensive américaine sur la ville de Falloujah, Mohammed al-Joundi raconte que les soldats américains qui l’ont libéré lui ont lié les mains et l’ont conduit à l’hôpital de Falloujah («un hôpital-prison») où Mohammed al-Joundi précise qu’il n’a été examiné par aucun médecin. Après 24 heures, nouveau transfert vers le camp de l’armée américaine en dehors de Falloujah. Il y restera une semaine et sera interrogé une seule fois, durant deux heures, sur sa détention. Ensuite il sera relâché en compagnie de plusieurs centaines d’autres prisonniers irakiens. Mohammed al-Joundi devra ensuite regagner Bagdad par ses propres moyens.

C’est une fois parvenu dans la capitale irakienne qu’il prend contact avec l’ambassade de France. L’ex-otage et sa famille ont pu gagner la France le 20 novembre. Depuis lors, Mohammed al-Joundi n’a aucun contact avec la presse. La rencontre organisée durant une heure ce lundi «sera la seule et l’unique», a précisé son entourage.



par Philippe  Couve

Article publié le 29/11/2004 Dernière mise à jour le 30/11/2004 à 13:46 TU