Tsunami et séisme en Asie
Les rescapés toujours dans l’attente de l’aide
(Photo: AFP)
Des militaires indonésiens portent des colis d'aide pour la région d'Aceh, au nord de Sumatra. (Photo: AFP) |
Une semaine après la catastrophe, le flot continu de témoignages et de reportages diffusés par les médias mais également par des particuliers via internet génère un flux de dons privés sans précédent qui dépasse parfois le montant des aides publiques dans certains pays (au Royaume-Uni notamment).
Les Etats cependant n’entendent pas être en reste. Les Etats-Unis ont annoncé vendredi soir la multiplication par dix du montant de leur aide qui est passée de 35 à 350 millions de dollars. Washington figure désormais en tête des pays donateurs et, pour confirmer que les Etats-Unis ne sont pas « pingres » comme l’avait estimé dans un premier temps un officiel des Nations unies, le président Bush a annoncé la mobilisation des militaires présents dans la zone qui ont mis 20 avions de patrouille au service des secours pour l’évaluation des dégâts et la livraison de l’aide d’urgence. Le porte-avions Abraham Lincoln a également été envoyé sur zone pour participer à l’effort d’assistance humanitaire. En outre, le chef de la diplomatie américaine, Colin Powell et le frère du président, le gouverneur de Floride, Jeb Bush, doivent entamer ce dimanche une tournée dans les pays sinistrés. Avant son départ, le secrétaire d’Etat américain s’est entretenu avec Kofi Annan au siège de l’ONU à New York et les deux hommes ont indiqué que ce sont les Nations unies qui dirigeront l’effort de coordination de l’aide internationale.
Les pays européens se mobilisent également. Le Royaume-Uni a promis 96 millions de dollars d’aide. La Suède annonce 55 millions d’euros. La France a promis plus de 40 millions d’euros. La Chine se mobilise de manière spectaculaire en annonçant le déblocage de plus de 120 millions de dollars. Dans la zone Asie-Pacifique, l’Australie s’engage à débloquer 47 millions de dollars. Le Canada pour sa part offre 32 millions de dollars.
Du côté des institutions internationales, la Banque mondiale va débloquer 1,6 milliards de dollars tandis que la Banque asiatique de développement s’apprête à verser 325 millions de dollars. Les chiffres des dons restent toutefois inférieurs à l’estimation des besoins faite par l’ONU : 1,6 milliard de dollars.
Pour coordonner cette aide, les bailleurs de fonds ont prévu de se retrouver le 6 janvier en Indonésie à l’occasion d’un sommet élargi de l’Asean (Association des nations d’Asie du Sud-Est). Dans la foulée, une conférence des donateurs doit être organisée à Genève le 11 janvier prochain. Mais l’urgence se fait chaque jour un peu plus pressante pour les rescapés du séisme et du tsunami qui sont encore sans doute des centaines de milliers à ne pas avoir pu bénéficier d’une aide tangible une semaine après la catastrophe. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) fait état d’une menace sanitaire également pressante avec la multiplication « des maladies diarrhéiques dans les camps de déplacés en Inde et au Sri Lanka ».
Le casse-tête de l’acheminement de l’aide
- Indonésie : des rescapés hors d’atteinte au nord de Sumatra
Sur l’île de Sumatra, dans la province d’Aceh, l’entrée dans la nouvelle année a été marquée par des répliques du séisme du 26 décembre qui ont fait naître la crainte de voir une nouvelle vague géante déferler sur une région déjà totalement dévastée. L’OIM (Organisation internationale des migrations de l’ONU) estime que 80% de la province d’Aceh (au nord de Sumatra) a été détruite et qu’environ 500 000 personnes sont sans abri alors que « l’air est saturé de l’odeur des cadavres en putréfaction » comme le rapporte Jocelyn Grange, l’envoyé spécial de RFI dans la capitale de la province, Banda Aceh. Sur place, les rescapés sont fréquemment frappés par des affections respiratoires liées à l’eau de mer qu’ils ont ingérée au moment du raz-de-marée.
Dans cette province, la ville de Meulaboh devrait rester encore inaccessible par la route pendant au moins 3 semaines, le temps de réparer les ponts qui ont été endommagés. Dans cette ville littéralement rayée de la carte par le séisme et le tsunami, les survivants qui errent pieds nus dans la boue n’ont pu bénéficier que vendredi d’un premier largage aérien d’aide humanitaire. Cette rareté de l’aide distribuée a été à l’origine de la prise d’assaut d’un hélicoptère américain dans la région d’Aceh. Des survivants ont tenté de monter à bord de l’appareil pour s’emparer de l’aide.
L’autre obstacle auquel doivent faire face les autorités indonésiennes est l’engorgement des aéroports de la province qui sont encore praticables sur lesquels des avions-cargo venus du monde entier sollicitent l’autorisation d’atterrir.
- Sri Lanka : après le tsunami, la pluie et les inondations
Après être venu de la mer, c’est du ciel que vient désormais le péril qui menace les rescapés du Sri Lanka. Depuis deux jours, la pluie tombe continuellement notamment dans les régions de l’est de l’île qui ont été les plus durement touchées par le tsunami. Des inondations sont signalées en différents endroits et les conditions de survie deviennent plus difficiles encore dans les camps de déplacés qui se sont mis en place. Les pluies diluviennes rendent les voies de circulation encore plus impraticables et l’urgence d’un approvisionnement en eau potable et en vivres est désormais extrême. « Ceux qui sont restés ont faim », témoigne Sophie Malibeaux, l’envoyé spéciale de RFI.
- Thaïlande : la recherche des disparus ne faiblit pas
En Thaïlande, où nombre des zones touchées par le tsunami étaient des régions très touristiques, les opérations de recherche des disparus et d’identification des cadavres se poursuivent dans une course macabre contre la montre. Après une semaine « il est devenu impossible de reconnaître le cadavre d’un Européen de celui d’un Thaïlandais », raconte Solenn Honorine, l’envoyée spéciale de RFI à Phuket « et on distingue à peine les hommes des femmes parmi les cadavres ». Sur place, les médecins légistes se sont lancés dans des opérations de collecte des échantillons de tissus qui devraient permettre l’identification ultérieure des cadavres grâce à l’analyse de leur ADN. Mais ces opérations d’identification « pourraient durer plus d’un an » selon l’envoyée spéciale de RFI. Parallèlement, nombre d’étrangers sont restés sur place et recherchent désespérément leurs proches accrochés parfois à l’espoir qu’un miracle, peut-être, les aura épargnés.
- Inde : solidarité avec les victimes
Alors que les répliques du séisme continuent à provoquer des mouvements de panique dans l’archipel des Andaman, l’Inde manifeste un élan de solidarité sans précédent en direction des victimes du tsunami au sud du pays alors que les autorités refusent de faire appel à l’aide étrangère assurant disposer de moyens suffisants pour faire face à la catastrophe. Dans tout le pays, les gestes de solidarité se multiplient. Les employés de plusieurs entreprises vont verser une journée de salaire à un fonds de solidarité pour les victimes.
- Somalie : le bilan s’alourdit
Pays le plus touché d’Afrique, la Somalie évalue à 176 le nombre de personnes qui ont péri le 26 décembre des suites du passage du tsunami.
- Birmanie : 90 morts selon l’ONU
La Birmanie semble avoir échappé au pire. Officiellement, selon les médias gouvernementaux, 53 morts ont été recensés après le passage du tsunami. L’ONU de son côté estime à 90 le nombre de personnes qui ont trouvé la mort dans le raz-de-marée mais plusieurs organisations non gouvernementales disent s’attendre à un « bilan plus élevé ».
par Philippe Couve
Article publié le 01/01/2005 Dernière mise à jour le 01/01/2005 à 18:06 TU