France
Le procès Papon enfin à la télévision
(Photo : AFP)
Après les procès du nazi Klaus Barbie et du milicien Paul Touvier, la chaîne de télévision Histoire diffuse, du 2 février au 14 mars 2005, une sélection des heures les plus marquantes du procès de Maurice Papon. Le haut fonctionnaire de Vichy a été condamné en avril 1998 à dix ans de réclusion criminelle pour complicité de crimes contre l'humanité pour avoir facilité la déportation de quelque 1 600 juifs lorsqu’il était secrétaire général de la Préfecture de la Gironde de 1942 à 1944, peine confirmée définitivement en juin 2004 par la Cour de cassation. Libéré pour raisons médicales, Maurice Papon âgé aujourd’hui de 94 ans, est placé sous contrôle judiciaire.
Contrairement aux Etats-Unis où les caméras sont autorisées dans un très grand nombre de prétoires, elles sont interdites de tribunaux en France. Mais la loi Badinter du 11 juillet 1985 autorise l'enregistrement audiovisuel d’un procès, de l’accusation au verdict, lorsqu’il «présente un intérêt pour la constitution d’archives historiques de la justice». C’est dans ce cadre que les procès de Klaus Barbie, Paul Touvier et de Maurice Papon ont été filmés. Dès le début des audiences en octobre 1997, les avocats de Maurice Papon opposés à l’enregistrement, se sont élevés contre un «procès spectacle». Le tournage a été a été maintenu par le président du tribunal.
Un document exceptionnelLa bataille s’est ensuite portée sur la diffusion. Les avocats de Papon ont ainsi fait interdire une première diffusion en janvier 2003. Ce n’est qu’en 2004 que la chaîne a obtenu l’autorisation du tribunal de grande instance de Paris de diffuser en une seule fois sur une période déterminée les images. Mais aucune cassette ne pourra être fournie par la chaîne ni avant ni après la diffusion. Ce procès sera par ailleurs mis en ligne sur le site web de la chaîne jusqu’au 30 juin, sous un format qui ne permettra pas la copie.
Philippe Chazal, ancien directeur général de la chaîne Histoire, qui avait lancé le projet, estime «important» que les images soient diffusées «du vivant de Maurice Papon». Ce procès qui s’est étalé sur 100 jours d’audiences, a été le plus long de l’histoire judiciaire de l’après-guerre. Sur les 470 heures qui ont été enregistrées, la chaîne ne diffusera qu’une quarantaine d’émissions de deux heures suivies d’un débat.
Comme précédemment pour les procès de Klaus Barbie en 2000 et de Paul Touvier en 2002, le montage a été réalisé sous la responsabilité de trois historiens. Le professeur des Universités Jean-Claude Lescure a dirigé le visionnage des audiences, la sélection et le montage des images avec deux autres historiens, Agnès Chauveau et Frédéric Attal, sous la houlette d’un comité éditorial dirigé par Jean-Noël Jeanneney, président de la Bibliothèque nationale de France. Comme pour les deux autres procès, les trois historiens ont choisi de respecter la chronologie des audiences, l’équilibre des temps de parole et de n’autoriser aucun plans de coupes ou de zoom qui accentuent la dramatisation. Un document exceptionnel qui –ironie du sort– est diffusé au moment des commémorations de la libération des camps dans lesquels Maurice Papon a contribué à envoyer des Français.
par Myriam Berber
Article publié le 03/02/2005 Dernière mise à jour le 03/02/2005 à 13:31 TU