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Jean-Paul II, servir l’Eglise même dans la souffrance

Le pape Jean-Paul II, le 6 février 2005, à la fenêtre de l'hôpital romain Gemelli.(Photo: AFP)
Le pape Jean-Paul II, le 6 février 2005, à la fenêtre de l'hôpital romain Gemelli.
(Photo: AFP)
Les bulletins de santé du pape diffusés par le Vatican sont rassurants. Ils affirment que l’état du Souverain Pontife s’améliore. Mais après la rude alerte qui a rendu indispensable son transport à l’hôpital Gemelli de Rome, il y a une semaine, les spéculations sur la capacité d’un homme affaibli par les ans et la maladie à poursuivre son sacerdoce vont bon train. Reste à savoir si Jean-Paul II, qui a toujours manifesté son désir de servir l’Eglise jusqu’au bout de ses forces, est homme à envisager une renonciation.

Il aura suffi d’une phrase du numéro deux du Vatican, monseigneur Angelo Sodano, pour que l’hypothèse d’une éventuelle renonciation du pape soit relancée. Répondant à des journalistes qui l’interrogeaient sur les incidences que la santé fragile du pape pouvait avoir sur sa capacité à diriger l’Eglise, le secrétaire d’Etat du Vatican a déclaré: «Laissons cela à la conscience du pape. Nous devons avoir une énorme confiance en lui. Il sait ce qu’il doit faire». A peine ces mots prononcés, ils ont été interprétés comme une brèche dans le tabou sur la possible retraite de Jean-Paul II, qui lutte depuis de longues années contre les effets de la maladie de Parkinson.

Peu importe que le cardinal Sodano ait ensuite nuancé ses propos en rappelant que, quelles que soient les déficiences physiques du pape, âgé de 84 ans, il était capable de continuer à diriger l’Eglise catholique. Le secrétaire d’Etat a ainsi expliqué que «contrairement à la société, l’âge est quelque chose de profitable dans l’Eglise» pour laquelle «la sagesse d’un homme est un cadeau». Et de poursuivre en exprimant son souhait de voir le Saint-Père continuer à gouverner l’Eglise pendant «de nombreuses années». Le seul fait d’avoir admis en public que la décision de renoncer revenait au pape, et à lui seul, est une manière de ne pas nier que la question se pose aujourd’hui.

L’apparition du pape n’a pas rassuré

Ce n’est certes pas la première fois que ce sujet est débattu. La santé déficiente de Jean-Paul II a fourni, ces dernières années, d’autres occasions d’évoquer le problème de la succession mais aussi de la retraite du pape. Lors des cérémonies organisées en 2003 pour le 25e anniversaire de son pontificat, durant lesquelles le Saint-Père est apparu particulièrement fatigué, notamment. Mais aujourd’hui, l’extrême faiblesse du Souverain Pontife lui donne un caractère encore plus préoccupant.

Malgré des bulletins de santé rassurants, il semble en effet que le pape ne récupère pas très rapidement depuis son hospitalisation d’urgence, il y a huit jours, à cause de graves problèmes respiratoires. Même si la fièvre a disparu, s’il n’est plus sous assistance respiratoire et s’alimente régulièrement, comme l’a indiqué Joaquim Navarro-Valls, le porte-parole du Vatican, Jean-Paul II est tellement faible que ce n’est plus seulement sa capacité à se mouvoir mais aussi son élocution qui sont handicapées. Son apparition à la fenêtre de sa chambre d’hôpital, dimanche, l’a démontré en direct. L’effort du Souverain Pontife pour rassurer les fidèles n’a pas eu l’effet escompté. Après quelques mots inaudibles, la voix du Pape a mué en un râle bientôt interrompu puis repris quelques instants plus tard, laissant un sentiment de désarroi dans l’assistance réunie pour l’écouter. La presse italienne a même estimé que les sons entendus provenaient en fait d’un enregistrement et que Jean-Paul II n’avait pas eu la force de parler en direct. Le Vatican a immédiatement démenti. Mais cela n’a pas empêché les observateurs de s’interroger sur la capacité du Souverain Pontife à continuer sa mission à la tête de l’Eglise.

Même sans parler, le pape peut guider l’Eglise

Le Saint-Siège a essayé de couper court à ces interrogations. Monseigneur Mario Francesco Pompedda, spécialiste du droit Canon, a expliqué au quotidien italien La Stampa que «même s’il ne parle pas, le Pape peut guider l’Eglise». Il lui suffit pour cela de se faire comprendre par écrit ou à l’aide de «gestes significatifs» qui permettront au cardinal Sodano, chargé de la gestion des affaires courantes, d’agir selon la volonté du Saint-Père. Il revient en effet exclusivement au chef de l’Eglise de procéder aux nominations, à la publication des documents, à l’arbitrage des questions morales et de doctrine. Tant que Jean-Paul II aura la capacité d’accomplir ces tâches, rien ne l’empêchera de rester au Vatican. Pas même le fait de ne pouvoir célébrer la messe lui-même.

Dans tous les cas, personne ne peut mettre le Saint-Père à la retraite. Il lui revient de faire part de sa décision de renoncer à sa charge s’il ne se sent plus capable de l’assumer. Ce cas de figure est d’ailleurs prévu par le droit canon, tout comme celui d’une éventuelle «vacance» du siège pontifical dans des circonstances, par contre, non précisées. Reste que pour le moment le pape ne semble pas être sensible à la tentation du renoncement. Le message lu par le substitut du secrétaire d’Etat du Vatican, monseigneur Leonardo Sandri, dimanche dernier, a plutôt donné le sentiment inverse. Le pape y affirmait, en effet: «Je continue à servir l’Eglise et l’humanité tout entière». Il n’est pas dit que Jean-Paul II sera le premier pape à déclarer forfait depuis Grégoire XII en 1415.

par Valérie  Gas

Article publié le 08/02/2005 Dernière mise à jour le 08/02/2005 à 16:16 TU