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Fespaco 2005

Le documentaire fait sa révolution numérique

Tournages légers, rapides, à budget réduit : pour les documentaristes africains aussi, la vidéo élargit le champ des possibles.

Un œil rivé vers le Nigeria, où la vidéo démultiplie la production, les réalisateurs accompagnent les évolutions de leurs sociétés. Une nouvelle énergie parcourt le documentaire, comme en témoigne @frodigital de Balufu Bakupa-Kanyinda (2003). Le cinéaste congolais (RDC) y expose la question du numérique comme tremplin à de nouvelles tentatives de discours. Des auteurs s’essaient à des courts métrages plus audacieux que ceux des documentaires traditionnels. Les Sénégalais s’activent autour du Media Centre de Dakar. Ceux qui s’y forment tournent volontiers des petits sujets qui alimentent le Festival des films de quartier. Le Burkina n’est pas en reste puisque la demande de documentaires de sensibilisation, de sujets d’information, y est toujours forte. Mais la légèreté des caméras numériques engage les cinéastes à d’autres approches.

Le Sénégalais Ousmane William M’Baye a accompagné, de longs mois durant, le musicien Seydina Insa Wade pour Xalima La plume (2003). La comédienne nigérienne Zalika Souley a inspiré Al’lèèssi, une actrice africaine (2003) à sa compatriote Rahmatou Keita. En Algérie, Yamina Bachir saisit le portrait à vif d’une photographe d’actualité avec Louisa Sid Ammi (2004). De même, les séjours répétés de la Sénégalaise Katy Léna Ndiaye au Burkina la conduisent à filmer le quotidien des villageoises dévolues à la décoration des cases : Traces, empreintes de femmes (2003).

La proximité, favorisée par l’emploi des petites caméras numériques, permet au cinéaste de filmer seul, engageant un face-à-face d’où surgissent de nouveaux dialogues. Dans Nous sommes nombreuses (2003), le Sénégalais Moussa Touré recueille les confidences de Congolaises victimes de viols pendant les affrontements qui ont déchiré le pays. La possibilité de filmer de manière discrète incite des cinéastes à investir le champ social. Malgré les résistances du régime, Michael Raeburn tourne à la sauvette Zimbabwe Countdown (2003). Il arpente rues et campagnes, accumule des images d’archives pour dénoncer et expliquer les dérives du gouvernement. Dans Contes cruels de la guerre, Karim Miské (Côte d’Ivoire) et Ibéa Atondi (Congo-Brazzaville) tracent le portrait d’une région décomposée par des affrontements « ethniques ». Plus au Sud, deux volets de Steps for the future, série initiée en 2000 pour sensibiliser au sida, prennent respectivement pour cadre un township d’Afrique du Sud (Wa N’Wina de Dumisani Phakathi) et pour sujet les prostituées en Namibie (House of love de Cecil Moller). Ces réalisateurs signent des documentaires rythmés, vibrants de témoignages. Comme si grâce à la vidéo, les documentaires africains répondaient à une nouvelle urgence : ancrer l’identité africaine dans les flux d’images mondiaux.


par Michel  Amarger

Article publié le 23/02/2005 Dernière mise à jour le 23/02/2005 à 17:40 TU