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Eglise catholique

Les hommes du Vatican

Le pape Jean-Paul II, entouré de plusieurs évêques et cardinaux, le 14 janvier 2005 dans la cathédrale Saint-Pierre de Rome.(Photo: AFP)
Le pape Jean-Paul II, entouré de plusieurs évêques et cardinaux, le 14 janvier 2005 dans la cathédrale Saint-Pierre de Rome.
(Photo: AFP)
Si la deuxième hospitalisation, en moins d’un mois, du pape Jean-Paul II à la clinique Gemelli de Rome a relancé les spéculations sur sa succession, elle ne pose, en revanche, pas de réels problèmes en ce qui concerne la gestion des affaires courantes de l’Eglise. Confronté à la dégradation de son état de santé, le souverain pontife a, depuis des années, en effet pris l’habitude de déléguer à ses proches collaborateurs un certain nombre de ses pouvoirs. Qui sont ces hommes qui dans l’ombre gèrent la marche du Vatican ?

A la différence de Paul VI, qui mettait un point d’honneur à intervenir dans les moindres détails de la gestion des affaires courantes du Vatican, Jean-Paul II a très tôt accordé une très large confiance à ses collaborateurs. Son hospitalisation ne devrait donc pas, comme l’ont prouvé ces dernières années à mesure que son état de santé se dégradait, empêcher la curie romaine –le gouvernement du Vatican– de fonctionner normalement. Le souverain pontife ne s’est d’ailleurs jamais vraiment intéressé à la gestion ordinaire des affaires de l’Eglise et a toujours préféré concentrer son immense énergie à ses voyages à l’étranger et aux grandes questions de morale et de doctrine. Depuis longtemps déjà, les affaires administratives sont entre les mains du secrétaire d’Etat Angelo Sodano, qui fait office de numéro deux institutionnel du Vatican et qui a vu progressivement son pouvoir considérablement se renforcer. Au point où ce cardinal, dont les ambitions se sont récemment révélées au grand jour, s’est cru autorisé à évoquer publiquement la question, naguère taboue, de la démission de Jean-Paul II en affirmant qu’il fallait laisser l’éventualité de cette décision à «la conscience du Pape». 

Mais si les affaires courantes du Vatican peuvent encore continuer à être assurées par le cardinal Angelo Sodano, personne ne peut en revanche se substituer au souverain pontife pour tout ce qui relève des compétences exclusives de l’évêque de Rome. Le Pape est en effet le seul à pouvoir procéder à des nominations et à pouvoir publier des documents relatifs aux grandes questions de morale et de doctrine dont il est l’unique arbitre. Toutes les décisions papales prises depuis le début du mois –comme la désignation du nouvel archevêque de Paris– sont en réalité, aiment à le rappeler les spécialistes du Vatican, bien antérieures à son hospitalisation. Et dans ce contexte, l’Eglise catholique pourrait bien être très vite confrontée à une crise institutionnelle.

Un secrétaire très particulier

En attendant, cette ambiance de fin règne est plus que jamais propice aux jeux des alliances qui se font et se défont autour de certains personnages qui au fil des ans sont devenus incontournables. Outre le cardinal Sodano, le puissant préfet de la Congrégation pour la doctrine et la foi, Joseph Ratzinger, est l’un de ceux qui ont aujourd’hui leur mot à dire dans la marche des affaires de l’Eglise. Aucun texte doctrinal d’importance n’a été publié sans son assentiment et certains murmurent qu’il a toutes ses chances d’être élu par le conclave à la mort de Jean-Paul II. Et cela d’autant plus que ce cardinal, souvent présenté comme ultra-conservateur –ses détracteurs l’ont surnommé Panzer Kardinal–, a bien pris soin de garder depuis la première hospitalisation du Pape un silence très remarqué alors qu’en 2002 il avait pourtant lui-même évoqué la question de la démission du Souverain Pontife.

Mais le déclin de la santé du Pape a surtout considérablement renforcé les pouvoirs de son plus proche collaborateur Stanislaw Dziwisz au point où certains aujourd’hui jugent que ce dernier a acquis un poids démesuré. Secrétaire particulier de Jean-Paul II qu’il suit depuis 1964 –date de sa nomination à la tête de l’archevêché de Cracovie– il est en effet chargé non seulement d’exécuter la volonté du Saint-Père mais aussi de gérer au quotidien les problèmes physiques d’un vieil homme malade rongé par la maladie de Parkinson. Stanislaw Dziwisz dort ainsi dans la pièce qui jouxte celle de Jean-Paul II, assiste à tous ses repas mais aussi à toutes les rencontres ou audiences que ce dernier accorde. Depuis que les difficultés d’élocution du Saint-Père se sont aggravées, c’est lui qui se charge de déchiffrer ses paroles la plupart du temps exprimées dans sa langue natale, le polonais. C’est enfin lui qui filtre de façon intransigeante les visites. Le cardinal Sodano en a fait les frais. Depuis qu’il a tenu ses propos jugés sacrilèges sur l’éventualité d’une démission du Pape, le secrétaire d’Etat serait devenu persona non grata et ne ferait plus partie du cercle rapproché des visiteurs du Saint-Père.


par Mounia  Daoudi

Article publié le 25/02/2005 Dernière mise à jour le 25/02/2005 à 18:46 TU