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Séisme en Asie

Frayeurs en Indonésie

L’intensité et la puissance du tremblement de terre du 28 mars ont rappelé aux habitants de l’île de Sumatra le cauchemar du raz-de-marée du 26 décembre dernier.(Photo : AFP)
L’intensité et la puissance du tremblement de terre du 28 mars ont rappelé aux habitants de l’île de Sumatra le cauchemar du raz-de-marée du 26 décembre dernier.
(Photo : AFP)
Trois mois après le tsunami du 26 décembre, le tremblement de terre de lundi représente un nouveau choc pour une population déjà traumatisée.

De notre correspondante à Djakarta

Deux jours auparavant, l’Indonésie commémorait dans la douleur le terrible tsunami qui avait ravagé la province d’Aceh, au nord de Sumatra. Ses plus de 220 000 morts, et ses cicatrices encore vives, notamment chez ce demi-million de personnes qui dépendent de l’aide humanitaire. Les habitants du nord de l’île de Sumatra étaient pourtant habitués aux tremblements de terre ; des répliques du séisme géant qui a eu lieu en décembre font trembler quasiment tous les jours le sol de l’île. Mais lundi soir, le réveil brutal s’est fait dans la terreur, car l’intensité et la puissance du tremblement de terre ont rappelé à tous le cauchemar du 26 décembre dernier. «Tout bougeait, les murs, le sol. Les secousses étaient tellement fortes que l’on avait du mal à se tenir debout, que l’on ne pouvait pas marcher sans tomber», se souvient Béatrice Walker, de l’Office pour la coordination de l’aide humanitaire, qui était dans sa chambre à Banda Aceh lorsque le séisme a frappé.

Immédiatement, les foules sont sorties des maisons, paniquées à l’idée qu’un raz-de-marée pourrait avoir été provoqué par le tremblement de terre. Alors elles sont parties, grimpant dans des pick-up ou à l’arrière des mobylettes familiales pour gagner au plus vite la sécurité des hauteurs. Le souvenir du 26 décembre hantait tout le monde ; craignant de ne pas avoir le temps de se mettre à l’abri, certains se réfugiaient dans les mosquées qui, trois mois auparavant, avaient résisté aux vagues ; d’autres rejoignaient l’aéroport, également épargné lors de la précédente catastrophe. Une femme tombe à genoux et prie ; son enfant pleure ; les Achenais surveillent le niveau des rivières qui, ils le savent, peuvent monter très rapidement en cas de raz-de-marée.

Trois mois après le tsunami, les systèmes d’alerte sophistiqués ne sont pas encore mis en place. Nul besoin : l’expérience suffit. Au lendemain de Noël 2004, le manque d’éducation des populations, qui ignoraient les signaux annonciateurs de tsunami, avait été désigné comme l’une des raisons de ce terriblement lourd bilan à Aceh. Mais trois mois plus tard, personne n’ignore qu’un séisme de cette magnitude, 8,7 sur l’échelle de Richter, peut provoquer un raz-de-marée. «Le tremblement de terre lui-même a servi d’alerte la plus efficace», souligne auprès de l’AFP Budi Waluyo, de l’agence indonésienne de météorologie et de géophysique.

Des vagues de moindre ampleur

«Juste après le tremblement de terre, on ne savait pas vraiment quoi faire, alors on a suivit le flot de gens qui sortaient de la ville pour gagner les hauteurs», raconte une membre de la Croix Rouge, à Banda Aceh. Avec ses collègues et d’autres Achenais, elle attend, une heure, deux heures. Le signal ne vient pas ; la police avait, depuis le dernier tsunami, placé des bouées au large pour détecter de possibles raz-de-marée. En cas de danger, des feux de détresse seraient lancés, signal d’évacuer la ville. Rien. «Trois heures après les secousses, on a estimé que le danger était passé et l’on est rentré», poursuit-elle. Vers 4 heures du matin, le calme était revenu à Banda Aceh.

Un tremblement de terre de cette magnitude a bien engendré de grosses vagues, bien que nettement moins puissantes, donc moins destructrices et meurtrières, que trois mois auparavant. Des vagues de faible ampleur ont été détectées plus tard sur les îles Cocos, entre l’Indonésie et l’Australie. Sur l’île de Simeulue, au Sud d’Aceh, une vague de trois mètres a frappé les côtes ; sur la côte de Sumatra, à Singkil, la mer a pénétré jusqu’à l’intérieur de la ville, inondant certains hôtels. Mais les dégâts qui ont été répertoriés – port très endommagé, hôpital détruit, bâtiments à terre, ponts brisés – ont d’abord été dus aux secousses elles-mêmes. C’est l’île de Nias, plus au Sud, tout près de l’épicentre, qui a le plus souffert.

Dès la nuit de lundi à mardi, les télévisions indonésiennes parlaient de dizaines de victimes ; au matin, les autorités confirmaient qu’au moins 300 personnes avaient péri. Mais ce bilan pourrait s’alourdir vue l’ampleur des dégâts : le vice-président indonésien a avancé le chiffre de 2 000 morts. Lignes électriques et téléphoniques coupées, ponts détruits, bâtiments en ruines ; le bilan sur l’île de Nias reste spéculatif.

Les équipes des ONG présentes pour participer à l’effort de reconstruction et l’aide d’urgence à Aceh, ont commencé à convoyer du personnel et du matériel médical. Mais, douze heures après les secousses, il était encore impossible de connaître le nombre de victimes dans cette île isolée du reste du monde, à dix heures de navigation des côtes de Sumatra.

par Solenn  Honorine

Article publié le 29/03/2005 Dernière mise à jour le 29/03/2005 à 12:51 TU

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Michel Campillo

Géophysicien et sismologue

«L'énergie libérée par ce nouveau séisme a été de dix, quinze fois plus faible qu'en décembre dernier.»