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Italie

Berlusconi : 24 heures pour convaincre

Silvio Berlusconi doit réussir à regagner la confiance de tous les partis de la coalition qu'il dirige pour espérer conserver son poste de chef de gouvernement.(Photo : AFP)
Silvio Berlusconi doit réussir à regagner la confiance de tous les partis de la coalition qu'il dirige pour espérer conserver son poste de chef de gouvernement.
(Photo : AFP)
Contraint de présenter mercredi sa démission, Silvio Berlusconi, chef du gouvernement italien, peut encore espérer terminer son mandat s’il parvient à former une nouvelle équipe ministérielle soutenue par l’ensemble des composantes de sa coalition. Si ce n’est pas le cas, il devra se résoudre à quitter ses fonctions et devra convoquer des élections anticipées.

La presse italienne n’est pas tendre ce jeudi avec Silvio Berlusconi, un magnat de la communication à la tête d’un empire audiovisuel. Après avoir retardé cette décision le plus possible, le chef du gouvernement italien s’est résolu à présenter mercredi sa démission au président de la République Carlo Azeglio Ciampi, qui lui a fixé un délai d’environ quarante-huit heures pour mener des consultations politiques en vue de la formation d’un nouveau gouvernement. «L’homme qui lundi encore assurait qu’il ne ‘se plierait pas aux rites politiciens’ fait une volte-face grotesque et accepte de se saborder dans la plus pure tradition du petit théâtre politique», écrit La Repubblica, en allusion aux rites institutionnels qui ont accompagné pendant des décennies de l’après-guerre italien les innombrables changements de gouvernement.

Ce quotidien orienté à gauche, qui n’a jamais nourri de sympathies à l’égard du chef de la coalition de centre-droit à la tête du pays depuis quatre ans, s’étonne logiquement des manœuvres politiciennes dans lesquelles est empêtré le Cavaliere, un homme qui a maintes fois répété vouloir terminer sa législature avec la même équipe gouvernementale. Or, il n’a pas réussi à empêcher le départ la semaine dernière de quatre membres de son équipe appartenant à l’Union des démocrates-chrétiens (UDC). Quatre démissions de ministres centristes auxquelles se sont ajoutées celles de deux représentants du nouveau Parti socialiste italien qui occupaient les fonctions de ministre et de secrétaire d’Etat. Or, sans l’appui de ces deux composantes de la coalition au pouvoir, Silvio Berlusconi ne possède plus de majorité au sein des deux chambres du pouvoir législatif.

Les raisons de ces défections sont à chercher dans la déroute électorale qu’a connue la coalition de Silvio Berlusconi début avril et qui s’est traduite par la perte de six des huit régions qu’elle contrôlait. De plus, les résultats d’une nouvelle élection régionale partielle qui s’est déroulée dimanche dans la Basilicate ont encore renforcé le triomphe de l’opposition qui dirige désormais seize des vingt régions italiennes. Un échec électoral après lequel plusieurs dirigeants de la coalition avaient demandé à Silvio Berlusconi de revoir profondément son programme politique, de manière à éviter un nouveau revers dans quelques mois lors des élections législatives. Et la menace de fronde politique ne venait pas simplement de la composante centriste puisque l’Alliance nationale (AN) se disait également prête à retirer ses ministres. Son chef Gianfranco Fini avait d’ailleurs durement critiqué lundi la décision de Berlusconi de ne pas présenter sa démission, en estimant qu’elle rendait «plus difficile la relance du gouvernement».

Un processus de déclin

Le chef du gouvernement n’a donc pas eu d’autre choix que celui de se plier aux exigences de ces deux partis. «Maintenant que je dois donner vie à un nouveau gouvernement, je ne peux plus me soustraire à une crise de gouvernement formelle», a déclaré mercredi Silvio Berlusconi devant les sénateurs. Et il a admis pour la première fois lors de cette intervention que les résultats des élections régionales avaient fragilisé l’action de son équipe: «La coalition qui a remporté les élections de 2001, recevant le mandat direct et explicite des électeurs pour gouverner, traverse maintenant une période de difficultés». Un discours dont il a profité pour attaquer la Constitution italienne, responsable, selon lui, de ce type de la situation actuelle. «Dans les démocraties occidentales les plus avancées (…), le Premier ministre qui est directement élu par le peuple peut changer d’équipe gouvernementale quand c’est nécessaire, sans en passer par de longues crises», a regretté Silvio Berlusconi.

Son défi est de réussir à ressouder sa coalition autour d’un programme politique et économique fédérateur, une tâche difficile en raison du caractère hétérogène de la coalition qu’il dirige. En plus de l’UDC et de l’AN, celle-ci comprend Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi, et la Ligue du Nord, un mouvement populiste et xénophobe à la tête duquel se trouve Umberto Bossi. Avec la dégradation de la situation économique dans le pays -dont le PIB de devrait croître selon les prévisions de croissance de l’Union européenne que de 1,2% cette année-, les tensions et les dissensions n’ont cessé d’augmenter ces derniers mois entre les dirigeants des différentes composantes. «Il y a quinze ans que l’Italie croît sensiblement moins que la moyenne européenne», confiait récemment au Monde l’économiste Mario Deaglio. Une tendance inquiétante sur laquelle se basent certains observateurs pour affirmer que l’Italie connaît un processus de déclin.

Le chef du gouvernement italien va donc devoir se montrer particulièrement persuasif pour réussir à former une équipe «Berlusconi-Bis» qui devra ensuite obtenir la confiance du Parlement. Une mission d’autant plus difficile qu’il ne dispose que d’un délai de temps très limité. En cas d’échec, il devra quitter ses fonctions et sera contraint de demander l’organisation d’élections législatives anticipées. Et il connaîtrait alors le même sort que Romano Prodi, l’un de ses prédécesseurs à ce poste, contraint de démissionner en 1998 après avoir perdu la majorité au sein du parlement. Sept ans après, Romano Prodi, chef de file de l’opposition, est revenu en force sur la scène politique italienne et fait partie des favoris pour s’installer dans le fauteuil de chef du gouvernement.


par Olivier  Bras

Article publié le 21/04/2005 Dernière mise à jour le 21/04/2005 à 16:14 TU

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Thierry Parisot

Journaliste à RFI

«En 2001 Silvio Berlusconi avait fait beaucoup de promesses notamment dans le domaine économique… Il a déçu même ceux qu’il l’ont porté au pouvoir.»

Anne Le Nir

Correspondante de RFI en Italie

«La déconfiture de Silvio Berlusconi n'est pas l'effet du hasard.»

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