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Univers

Les astronomes ceinturent la planète

Le radio télescope de Dwingeloo composé de plusieurs radars.(Photo: Colette Thomas/RFI)
Le radio télescope de Dwingeloo composé de plusieurs radars.
(Photo: Colette Thomas/RFI)
L’une des plus importantes installations au monde en matière d’astronomie se trouve au nord des Pays-Bas. Cette installation vient de se moderniser, l’occasion de la visiter et de faire le point sur les programmes de recherche européens dans le domaine de l’astronomie.
De notre envoyée spéciale à Dwingeloo

Localisation de Dwingeloo, aux Pays-Bas.
(Carte: UE Astronomie)
Dwingeloo est un télescope composé de plusieurs radars. Qu’importe le temps qu’il fait, ce télescope ne craint pas les nuages. Ce qu’il capte, ce sont des ondes radio. Sur deux kilomètres, des paraboles alignées  regardent le ciel et surtout l’écoutent. Sur place, il faut d’ailleurs éteindre son portable afin de ne pas faire d’interférence, pour ne pas gêner la réception. Le télescope de Dwingeloo est un mélange d’optique, de radio, et d’ondes radio. Ici, explique l’un des responsables du site, «on est dans la gamme des très grands équipements. Mais c’est moins cher à faire que l’optique».

La distance entre les paraboles compte pour la résolution des images. Ces grandes oreilles cherchent à entendre ce qui se passe dans le ciel en captant des sons, inaudibles par l’oreille humaine, sur différentes bandes, différentes fréquences. Les informations recueillies, décryptées, passées à la moulinette des ordinateurs, permettent de voir des molécules, des atomes, des gaz, et d’imaginer comment les galaxies sont interconnectées.

Mélanger de la lumière entre télescopes très éloignés

A quelques kilomètres du radio télescope de Dwingeloo, les bureaux du JIVE (Joint Institute for VLBI in Europe) sont installés en pleine campagne, en fait dans un parc naturel. Le JIVE est le lieu de travail et de rencontre pour les astronomes qu’ils soient ou non familiers de cette technologie sonore d’observation de l’espace, le VLBI (Very Long Baseline Interferometry). L’interférométrie à très longue base consiste à mélanger de la lumière entre télescopes très éloignés. Dans les bureaux du JIVE, parviennent des données du monde entier que les astronomes doivent décrypter.

« Plutôt que de construire un énorme télescope qui coûte cher, plusieurs petits sont connectés à distance » explique Michel Blanc, coordinateur du projet Europlanet, qui s’intéresse à Mars et Mercure, aux comètes, aux planètes géantes en faisant de la coopération entre agences spatiales. «Il suffit de rassembler les données pour avoir l’équivalent d’un télescope géant». Les oreilles de Dwingeloo ont donc des correspondantes en Chine, au Japon, en Afrique du Sud, aux Etats-Unis, à Porto Rico, en Pologne. Les signaux reçus par tous ces radio télescopes permettent, si tout le monde travaille en même temps sur la même fréquence, d’avoir une information d’ensemble, de voir ce qui se passe dans l’univers.

Revenir très en arrière dans l’univers

Au moment de notre visite à Dwingeloo, le JIVE faisait un saut technologique en passant de la bande magnétique, sur laquelle était réceptionnées les données, à la fibre optique, aux super-ordinateurs et à Internet. Les chercheurs qui analysent les informations pourront s’éloigner du QG hollandais qui fonctionne 24 heures sur 24. Certains redoutent même d’être rivés à l’écran de leur ordinateur. L’image de l’astronome observant les étoiles au bout d’une lunette par temps clair semble aujourd’hui dépassée.

Prendre la mesure des étoiles, des trous noirs, du big bang, voilà le travail des astronomes, que ce soit à l’aide de la radio astronomie ou par d’autres moyens. Plusieurs programmes de recherche bénéficient du soutien de l’Union européenne comme l’ALMA (Atacama Large Millimetre Array), en cours de construction au nord du Chili. Installées sur une montagne déserte dans un environnement très pur (mais pas très animé pour les chercheurs comme l’un d’entre eux l’a fait remarquer…), 64 antennes paraboliques vont observer l’univers froid, la formation des galaxies, des planètes, les émissions de poussières et de molécules, «very very back in the universe (très très en arrière dans l’univers)», explique Roberto Gilmozzi, l’un des responsables de ce programme. C’est encore une histoire de fréquences pour essayer de détecter de l’eau, «un composant important de la chimie interstellaire».

La galaxie NGC 5055 a été découverte grâce au radio télescope.
(Photo: Astron.nl)
Depuis Galilée, il y a plus de trois siècles, la taille des télescopes n’a pas cessé d’augmenter ainsi que leur sensibilité. Maintenant il faut fabriquer des télescopes encore plus grands pour accroître la sensibilité des informations captées. Il est également nécessaire de rassembler des technologies différentes pour que l’ensemble des connaissances soient plus vaste. Le JIVE voudrait maintenant installer des radio télescopes sur d’autres planètes pour étendre encore plus loin ses explorations de l’univers. Plusieurs programmes regroupent chaque fois une bonne dizaine de pays. Ces programmes sont financés par l’Union européenne et par les Etats-Unis notamment.

Installer des télescopes sur d’autres planètes

The Extremely Large Telescope (ELT) est à l’étude. Ce nouveau télescope optique devrait permettre de prendre des images de planètes situées hors du système solaire et de se faire une idée de la composition de leur «atmosphère». The Square Kilometre Array (SKA) sera l’équivalent radio de l’ELT et tendra l’oreille vers les galaxies en cours de formation. Les astronomes du monde entier, qui ont désormais la possibilité de travailler en réseau devraient bénéficier des informations fournies par ces équipements. Il s’agit déjà «d’une incroyable masse de données. Il faut les stocker et les analyser et avoir les mêmes standards pour communiquer», indique encore un astronome présent à Dwingeloo, dans les locaux du JIVE, qui est en fait hébergé par ASTRON, la fondation hollandaise pour la recherche en astronomie.

Les retombées

L’Union européenne, qui participe au financement de tous ces projets, en attend des retombées pour l’industrie. Les équipements existants ont déjà donné lieu à des innovations technologiques. La fabrication des paraboles a nécessité une ingénierie très sophistiquée et a imposé aux ingénieurs de prendre des mesures toujours plus précises. Les systèmes de navigation comme Galiléo doivent beaucoup à l’astronomie. Les images à haute résolution réclamées par les astronomes ont fait naître des caméras numériques. Les signaux radar, toujours plus sensibles, ont trouvé des applications dans la radio et la télévision mais aussi dans le domaine de la défense et de la sécurité. La nouvelle génération de télescopes aura besoin d’ordinateurs encore plus puissants. Le public en profitera quelques années plus tard. L’astronomie et les innovations qu’elle impose aident à marquer des points dans la compétition économique mondiale.  

 


par Colette  Thomas

Article publié le 16/07/2005 Dernière mise à jour le 16/07/2005 à 12:44 TU