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Energie

Nouveau record pour le baril de pétrole

Un mineur chinois pousse un wagonnet de charbon. Cette matière première regorge dans le sous-sol de ce pays dont les besoins en énergie explosent.(Photo: AFP)
Un mineur chinois pousse un wagonnet de charbon. Cette matière première regorge dans le sous-sol de ce pays dont les besoins en énergie explosent.
(Photo: AFP)
Comment faire tourner l’économie mondiale avec un baril dont le prix s’envole ? La question se pose chaque fois que le prix du pétrole passe un nouveau cap. Mardi, le prix du baril restait orienté à la hausse après avoir dépassé la veille, et pour la première fois, les 64 dollars sur les marchés américains.

«C’est l’addition des inquiétudes sur la sécurité en Arabie saoudite, des tensions autour du programme nucléaire iranien et de nouveaux problèmes dans les raffineries américaines ». C’est ainsi que Simon Wardell, analyste dans un centre de recherche britannique, résumait la situation alors que le baril de pétrole s’est vendu la nuit dernière à 64,27 dollars.

Les Etats-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni avaient averti le premier producteur mondial de pétrole que des «terroristes» planifiaient de manière imminente des attentats en Arabie saoudite. D’autre part l’Iran, lui aussi membre de l’Opep, lançait un défi aux pays occidentaux en redémarrant son usine d’enrichissement d’uranium d’Ispahan.

Ces risques géopolitiques n’ont pas été les seuls à pousser les cours du pétrole à la hausse. La demande est forte, en particulier aux Etats-Unis. Plusieurs raffineries sont fermées en raison de problèmes techniques ; 3% de la capacité américaine de raffinage est non-opérationnelle alors que l’heure est aux provisions de fuel pour l’hiver prochain.

Une politique nationale de l’énergie

Au moment où le prix du baril atteint de nouveaux sommets, avec des répercussions sur le prix de l’essence aux Etats-Unis et ailleurs, le président Bush a tout récemment signé la loi sur l’énergie. Cette loi, et c’est une première, donne un cadre général à la politique du pays tout entier en matière d’énergie. Elle était en projet depuis longtemps. Les Démocrates la bloquaient, ne voulant pas cautionner une probable exploitation de gisements pétroliers et gaziers dans un parc naturel en Alaska.

En tout cas, pour le président américain cette nouvelle loi «doit réduire la dépendance des Etats-Unis vis-à-vis des importations d’énergie. Je suis sûr qu’un jour, les Américains considéreront cette loi comme un pas essentiel vers une nation plus sûre et plus prospère, moins dépendante de sources d’énergie étrangères», a affirmé le président américain dans son discours, prononcé dans une usine de fabrication de composants pour panneaux solaires.

Le président Bush a renouvelé son appel au développement de programmes de charbon propre et à la construction de nouvelles centrales nucléaires pour aller vers l’indépendance énergétique du pays. Les Etats-Unis n’ont pas construit de nouveau réacteur nucléaire depuis 1979. L’accident de Three Mile Island a donné un coup d’arrêt à tous les projets. Le nucléaire représente actuellement un cinquième de l’énergie américaine, contre 50% pour le charbon.

Exporter de l’uranium ou de l’uranium enrichi

Le Brésil, qui a gelé sa filière nucléaire, envisage lui aussi de revoir son programme. Sept nouvelles centrales pourraient être construites dans les années à venir. Comme l’AIEA lui a donné l’autorisation d’enrichir de l’uranium pour ses deux centrales nucléaires (Angra I et Angra II), le pays envisage de se lancer dans l’exportation d’uranium enrichi d’ici une dizaine d’années. C’est ce qu’a annoncé Sergio Rezende, ministre brésilien des Sciences et des technologies. Le Brésil est l’un des pays au monde qui possède les plus grandes réserves d’uranium. Le ministre n’a pas précisé quels pays pourraient être intéressés par cet uranium enrichi. Les deux centrales produisent 4,3% de l’énergie du pays dont la consommation repose surtout sur l’énergie hydraulique.

L’Australie, qui possède 40% des réserves mondiales d’uranium, annonce pour sa part que des discussions sont en cours avec Pékin pour lui fournir de l’uranium. «L’accord va instaurer des garanties pour assurer que les livraisons australiennes d’uranium à la Chine sont exclusivement consacrées à des objectifs pacifiques», a indiqué Alexander Downer, ministre australien des Affaires étrangères. «La Chine est le deuxième consommateur mondial d’énergie et sa demande va connaître une forte croissance. Les projets de la Chine pour faire face à cette demande incluent une multiplication par quatre de la production d’énergie nucléaire d’ici 2020», a précisé le chef de la diplomatie australienne.

Cette volonté australienne de développer ces exportations d’uranium se heurtera peut-être à l’opposition des Aborigènes. Car le gisement se trouve dans les Territoires du nord, notamment dans le parc national de Kakadu, classé au patrimoine mondial de l’humanité. Les Aborigènes ont une réserve à proximité. Le gouvernement leur a donné depuis peu un droit de regard sur les mines.

Le cas de la Chine

Le ministre australien l’a rappelé, la Chine a déjà une production d’électricité d’origine nucléaire et compte agrandir son parc. Pour le moment, le charbon reste la principale source d’énergie de ce pays. Des spécialistes connaissant bien la Chine le disent : son sous-sol est une immense réserve de charbon. La ressource est à disposition dans ce pays dont les besoins en énergie explosent. Ils ont augmenté de plus de 15% en 2004. Cette demande, on le sait, a pesé sur le prix du baril de pétrole. Elle favorise également le développement de l’extraction sauvage de charbon. Un accident dans une mine montre une fois encore dans quelles conditions les mineurs chinois exploitent les gisements. Ouvertures sauvages de mines, puits dangereux, filons non sécurisés, des ouvriers-paysans risquent leur vie pour extraire un charbon qui trouve facilement preneur, étant donné la demande en énergie. Le charbon représente encore les deux tiers de la consommation énergétique du pays.

Les dirigeants chinois redoutent que le manque d’énergie handicape la croissance économique. Le nucléaire est donc relancé. Dans le même temps, les compagnies pétrolières mènent une politique d’acquisitions agressive dans le secteur pétrolier. En achetant des sociétés concurrentes, ces compagnies sécurisent en partie l’approvisionnement en pétrole de la Chine. Autosuffisante jusqu’en 2003, elle est devenue le deuxième consommateur mondial de pétrole juste derrière les Etats-Unis.      

Les transports

Le recours au charbon propre (la combustion rejette moins de gaz à effet de serre) et à l’énergie nucléaire (elle n’en émet pas) sont en augmentation. A lui seul, le charbon classique, ressource polluante et à l’image vieillotte, représentait en 2002 le quart de la consommation mondiale d’énergie. Malgré ses défauts, la houille pourrait bien encore se tailler des parts de marché. D’abord parce que les réserves sont de l’ordre du siècle alors que pour le pétrole on parle de décennie. Ensuite, l’utilisation est beaucoup plus souple que le nucléaire qui demande la construction d’équipements lourds. De toute façon, charbon ou nucléaire, ces deux secteurs ne peuvent rien pour les transports. Ils restent totalement dépendants du pétrole. La moitié du pétrole consommé dans le monde l’est par les transports.


par Colette  Thomas

Article publié le 09/08/2005 Dernière mise à jour le 09/08/2005 à 17:28 TU