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Sans-papiers

Une journaliste inquiétée pour son enquête

Sans-papiers congolais en France.(Photo: AFP)
Sans-papiers congolais en France.
(Photo: AFP)
Une journaliste de Radio France, Bleuette Dupin a diffusé sur l’antenne de France Bleu Auxerre (une radio locale de Radio France) un reportage concernant une famille originaire de République démocratique du Congo en situation irrégulière. Deux enfants de cette famille sont en cavale pour échapper à une reconduite dans leur pays d’origine. Au motif d'être soupçonnée de les héberger, le domicile de la journaliste a été «visité» par la police. La journaliste a ensuite été entendue comme témoin dans le cadre de l'enquête de police concernant cette disparition des enfants. Pour autant, il ne lui a jamais été spécifié qu'il s'agissait là d’une enquête de flagrance sur ordre du procureur.

Mercredi 24 août au matin Bleuette Dupin, journaliste à France Bleu, est sur son lieu de travail quand, vers 11 heures, son mari est sommé de répondre à de présumés policiers qui sonnent au domicile du couple. Ces derniers le somment de dire «où se trouvent les enfants Batulanga ? ». Dans un premier temps, le mari de la journaliste répond qu’il n’en sait rien puis, les forces de police lui demandant de laisser libre accès à l’appartement, l’inquiété, surpris et interloqué, demande à son tour une pièce justificative. On lui répond alors que «l’uniforme suffit», et Monsieur Dupin oppose une fin de non recevoir aux policiers, puis contacte sa femme à la rédaction pour lui faire part de cette visite impromptue.

Contactée par RFI, Bleuette Dupin explique : «Dix minutes après la première visite, sans lettre du procureur, la police revient en menaçant alors mon mari de forcer la porte et de l’arrêter ‘pour aide au séjour irrégulier’. Mon mari  téléphone au commissariat qui confirme l’intervention, et il me joint à la rédaction pour me tenir au courant de l’évolution de la situation, démuni et interrogatif. Je retourne immédiatement chez moi, accompagnée de mon rédacteur en chef, car j’ai très vite compris, d’après la question des policiers, qu’il pouvait y avoir là un lien avec mon reportage».

«Rien à signaler. Au revoir. Merci»

C’est alors que, se retrouvant face aux quatre policiers la journaliste finit par les laisser entrer chez elle, d’où ils repartiront vite bredouille : «Rien à signaler. Au revoir. Merci». Mais, non satisfaits d’avoir «visité» le domicile, les services de police convoquent Bleuette Dupin et son mari au commissariat où ils seront auditionnés séparément, la journaliste 5 minutes et son mari trois quart d'heures. Bleuette Dupin découvrira alors, en fin de journée que «la police a en fait trouvé le numéro de portable de mon mari enregistré sur celui de la femme Zaïroise que j'avais contactée pour l'interview. En fait, les forces de l’ordre visitaient toutes les personnes étant en contact avec cette femme, y compris les journalistes».

Ceci étant, Bleuette Dupin estime avoir exercé son travail de journaliste de la manière la plus régulière qui soit. Elle a suivi l’itinéraire d’une famille en France depuis 4 ans, et toujours en «situation irrégulière». Il s’agit d’une mère et de ses quatre enfants (âgés de 10 à 15 ans) qui a épuisé tous les recours possibles de demande d’asile. Le 29 juin dernier, le préfet de l’Yonne prend un arrêté d’expulsion. Le 9 août, la femme est convoquée au commissariat de Sens, placée en garde à vue, et assignée à résidence dans un foyer à Migène. Les deux enfants aînés s’enfuient, sans qu’on sache actuellement où ils se sont réfugiés pour échapper à l’expulsion. Pour mener à bien son enquête, Bleuette Dupin a donc rencontré la mère des enfants lundi dernier, ainsi que le directeur du cabinet du préfet, Alain Castagnier, et contacté   le collectif du réseau Education sans frontières (RESF) qui soutient la famille.

Pour l’heure, Bleuette Dupin a contacté les différents syndicats de la profession, et le PDG de Radio France, Jean-Paul Cluzel, a demandé des explications à la chancellerie .


par Dominique  Raizon

Article publié le 25/08/2005 Dernière mise à jour le 25/08/2005 à 17:01 TU