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France

Un paysage social en demi-teinte

Le rapport de l'Insee révèle essentiellement un léger repli de l'emploi et une timide reprise économique en 2004.(Photo : INSEE)
Le rapport de l'Insee révèle essentiellement un léger repli de l'emploi et une timide reprise économique en 2004.
(Photo : INSEE)
Chaque année depuis neuf ans, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) établit un état des lieux du pays. L’édition 2005-2006 de «France, portrait social», montre d’abord qu’en 2004, l’emploi a encore diminué, perdant 15 000 postes, mais de manière moins marquée qu’en 2003. Conséquence de cette fragilisation du marché, le nombre de personnes occupant un emploi temporaire, 3 millions, est reparti à la hausse.

La part des personnes ayant un emploi à temps partiel, reste stable après une tendance à la baisse depuis 2000. Près de 30% d’entre elles, soit 1,2 million d’actifs, n’ont pas souhaite ce temps partiel ; ces sous-emplois concernent cinq fois plus de femmes que d’hommes. Ce sont surtout les secteurs du nettoyage, du gardiennage, des soins aux personnes mais aussi de l’enseignement qui sont pourvoyeurs de ce type d’emplois créant des salariés pauvres.

Malgré un léger repli de l’emploi, les salaires progressent plus vite en 2004, 2,8%, qu’en 2003 avec 2%. Mais, la moitié de la population française dispose de revenus mensuels inférieurs à 1 254 euros par personne. L’Insee a toutefois noté un recul de la pauvreté, qui est en régression, affirme-t-elle, depuis 1998. On compte encore cependant 7,1 millions de personnes qui survivent avec au mieux 752 euros par mois, correspondant à 60 % du niveau de vie moyen des Français. En même temps, la capacité d’épargne des ménages les moins favorisés est passée de 10% en 1995 à moins de 5% en 2004 pendant que celle des familles les plus aisées grimpait de 30% à 35%.

La France comptait en 2004, 62,4 millions d’habitants. Avec 797 000 naissances et 518 000 décès, soit 42 000 de moins qu’en 2003, année de la canicule, elle affiche un accroissement naturel record depuis vingt ans. Les Français vivent aussi de plus en longtemps: les enfants nés en 2004 ont ainsi une espérance de vie de 76,7 ans pour les garçons et de 83,8 ans pour les filles. Un gain au-delà des attentes, affirme l’Insee.

La naturalisation augmente les chances d’emploi

Hasard du calendrier, l’étude de l’Insee qui se penche particulièrement sur l’emploi des immigrés est publiée au moment où la France est secouée par des émeutes dans les quartiers sensibles. Ce travail s’intéresse notamment au rôle facilitant de la naturalisation pour les immigrés dans la recherche d’emploi. Les deux auteurs, Denis Fougère et Mirna Safi rappellent qu’en 2004, 4,5 millions de personnes immigrées c’est-à-dire nées étrangères à l’étranger, âgées de 18 ans ou plus, résidaient en France métropolitaine. Parmi elles, 41% ont acquis la nationalité française. En 1999, cette proportion n’avait été que de 37%.

Le premier effet positif pour un immigré qui acquiert la nationalité française, est d’élargir considérablement la palette d’emplois disponibles. Notamment parce que tous les postes exigeant la nationalité française deviennent de ce fait accessibles. De plus, expliquent les auteurs, «on peut supposer que la nationalité française permet de contourner des formes de discriminations à l’embauche, que plusieurs études empiriques ont mises en évidence». Cependant relèvent-ils, les candidats d’origine maghrébine ont moins de chance que les autres de décrocher un entretien et à fortiori une embauche.

Cette «prime» à l’emploi que procure la naturalisation est inégalement distribuée. Ce sont les immigrés qui ont le plus de difficultés à s’insérer sur le marché de l’emploi qui en bénéficient le plus. Le rapport de l’Insee qui porte sur 21 000 immigrés durant la période 1968 à 1999, montre par exemple que les femmes sont plus avantagées par cette «prime» que les hommes. L’effet est ainsi maximal chez les femmes turques suivies par les femmes originaires du Maghreb. Mais cet avantage varie aussi en fonction du pays d’origine et du diplôme. La naturalisation elle-même est d’ailleurs souvent liée au niveau d’éducation. A propos des émeutes des banlieues défavorisées, Mirna Safi ne fait pas de lien formel avec les données de l’étude. Ici, précise-t-elle, il s’agit d’immigrés alors que les émeutes concernent avant tout une immense majorité de jeunes Français issus de l’immigration.


par Claire  Arsenault

Article publié le 10/11/2005 Dernière mise à jour le 10/11/2005 à 19:03 TU

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Mirna Safi

Chercheuse Insee spécialiste de l'intégration des populations immigrées

«La naturalisation augmente la probabilité d'accès à l"emploi des immigrés.»

Christel Colin

Chef de la division Etudes sociales de l'Insee

«2004 apparaît comme une année en demi-teinte avec une reprise économique chahutée.»