Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Egypte

La déroute de l’opposition légale

Mohammed Mehdi Akef, leader des Frères musulmans, le 9 novembre 2005.Photo : AFP
Mohammed Mehdi Akef, leader des Frères musulmans, le 9 novembre 2005.
Photo : AFP
Le Parti national démocrate (PND) au pouvoir a remporté 26 sièges et les Frères musulmans 5, au terme du premier tour des élections législatives égyptiennes qui se déroulaient mercredi dans le Grand Caire et en Moyenne-Egypte. Un second tour est prévu le mardi 15 novembre pour les 133 sièges qui reste à pourvoir dans cette première tranche des élections. Deux autres tranches de scrutin se dérouleront fin novembre et début décembre.

De notre correspondant au Caire

Descente en enfer pour l’opposition légale, ascension pour les Frères musulmans, rétrocession du septième au cinquième ciel pour le pouvoir et toujours beaucoup d’abstention (plus de 75% des citoyens concernés ne se sont pas rendus aux urnes). Cette exégèse des résultats du premier tour de la phase initiale des élections législatives se fonde sur les chiffres « définitifs » annoncés ce vendredi, après moult contradictions, par le ministre de la justice.

Pour les partis d’opposition légale, le dépit est à son comble. Ils s’étaient pourtant rassemblés dans un collectif baptisé « Front national pour le changement » (FNC). Mais aucun de ses 114 candidats présentés au premier tour n’est passé. Cette défaite concerne même des figures de proue comme Mounir Abdel Nour, du parti libéral Wafd et chef de file de l’opposition parlementaire (islamiste et indépendants compris). Cette opposition comptait une quarantaine de députés sur les 454 (444 élus et 10 nommés par le Président) de l’Assemblée du Peuple. Même cas de figure pour Ayman Nour, le chef du parti libéral Ghad. Il avait décidé de faire cavalier seul, après avoir été second à l’élection présidentielle. En fait, ce sont quasiment tous les cavaliers de l’opposition qui ont été décapités au premier tour.

L'opposition évoque des fraudes

Pour expliquer cette débâcle, l’opposition évoque des «falsifications et irrégularités massives pratiquées par le pouvoir». Même chant du muezzin du coté des Frères musulmans dont le guide suprême, Mohammed Mehdi Akef, a dénoncé «une falsification douce mais plus insidieuse». Lors des élections de 2000, la confrérie s’était plainte de l’intervention musclée de la police qui avait empêché ses sympathisants d’accéder aux bureaux de vote. Cette fois, l’opposition reconnaît que la police est restée neutre. En revanche, les critiques portent sur l’établissement des listes électorales et sur les opérations de dépouillement du vote. C’est là que la plupart des irrégularités se seraient passées, selon l’opposition et selon des organisations de la société civile qui ont observé le scrutin.

Quoiqu’il en soit, les Frères musulmans (« indépendants » sur le papier mais bien affichés comme membres de la confrérie) ont réussi à faire élire cinq candidats dès le premier tour, soit 16% des sièges attribués. Cela constitue un exploit, au regard des 10% de sièges dont disposait l’opposition au sein de l’assemblée sortante. Mieux, 42 candidats de la confrérie sont encore dans la course au second tour et beaucoup d’entre eux sont en tête.

Quelle stratégie pour les candidats indépendants ?

Du côté du Parti national démocrate, au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, on se félicite de la victoire. Cela dit, les stratèges du parti ont convoqué des cellules de réflexion. Motif : le score obtenu (26 des 31 sièges pourvus dès à présent) reste en deçà des objectifs fixés avant le scrutin. Si l’on prend en considération le fait que les ténors du parti sont déjà passés, il ne fait pas de doute que les 97 candidats du PND en ballottage devront ferrailler dur pour l’emporter. Même dans l’hypothèse où tous ces candidats étaient élus, le parti n’aurait « que » 75% des députés de la première tranche, alors qu’il disposait de plus de 90% des sièges de l’Assemblée sortante. Mais les optimistes, la vieille garde du parti, ne partagent pas cette analyse. Pour eux, le score est meilleur que celui des élections de 2000. Les candidats officiels du PND avaient alors obtenu moins de la moitié des sièges. Cette relative défaite s’était transformée en victoire grâce l’afflux massif des candidats indépendants qui étaient venus grossir les rangs du parti au pouvoir. Aujourd’hui, on compte 120 candidats indépendants encore en lice. Avant les élections, le PND avait annoncé qu’il n’intégrerait aucun ralliement de candidat indépendant. Au vu des résultats annoncés hier, il n’est pas sûr que le parti au pouvoir se montre aussi inflexible pour la suite des votes.

Un second tour est prévu le mardi 15 novembre pour les 133 sièges qui reste à pourvoir dans cette phase initiale des élections. Deux autres tranches de scrutin se dérouleront fin novembre et début décembre. Théoriquement, le nouveau parlement entamera ses travaux le 13 décembre.

par Alexandre  Buccianti

Article publié le 12/11/2005 Dernière mise à jour le 11/11/2005 à 16:21 TU