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France

Chirac veut mobiliser contre les discriminations

Après trois semaines de crise dans les banlieues, le président Chirac s'est adressé directement aux Français, dénonçant la «discrimination» et constatant «un malaise profond» de la société française. (Photo : AFP)
Après trois semaines de crise dans les banlieues, le président Chirac s'est adressé directement aux Français, dénonçant la «discrimination» et constatant «un malaise profond» de la société française.
(Photo : AFP)
Jacques Chirac s’est adressé, lundi soir, aux Français. Le président de la République a ainsi tenté de couper court aux critiques de ceux qui lui reprochaient de ne pas être intervenu significativement depuis les début des émeutes en banlieue, il y a près de trois semaines. Le chef de l’Etat a envoyé un message de fermeté aux responsables des violences, rappelant le caractère incontournable du respect de la loi républicaine. Mais il a aussi appelé tous les citoyens à lutter contre les discriminations.

Treize minutes pour convaincre. Jacques Chirac s’est livré à l’exercice rôdé mais néanmoins risqué de l’allocution télévisée, sans contradicteur, directement face aux Français. Comme à son habitude, le président avait choisi une mise sobre, costume sombre et cravate assortie. Il avait aussi chaussé des lunettes qu’on ne lui avait pas vues depuis bien longtemps. Critiqué par l’opposition mais aussi par des membres de la droite (UDF) pour sa «discrétion» sur la question des violences urbaines qui se déroulent depuis le 27 octobre, le chef de l’Etat est donc descendu dans l’arène pour montrer qu’il était toujours là et qu’il avait compris l’importance de la crise traversée actuellement par la France.

Jacques Chirac a voulu apparaître comme le garant des valeurs de la République et à ce titre, il a clairement mis en garde tous ceux qui ne respectent pas les lois et s’attaquent «aux biens ou aux personnes». Le président a rappelé que les auteurs des violences seraient «poursuivis et punis». Il a aussi insisté sur la responsabilité des familles des jeunes qui ont participé aux émeutes en déclarant qu’elles «devaient prendre leurs responsabilités». Promettant même à celles qui s’y refusent d’être «sanctionnées, comme la loi le prévoit».

«Un malaise profond»

Si le discours du président a donc mis les choses au point sans état d’âme sur le caractère inacceptable des émeutes, il a aussi tenté de prendre en compte les raisons qui expliquent cette explosion de violence soudaine et prolongée. Jacques Chirac a estimé qu’il s’agissait «d’une crise de sens, une crise d’identité» qui révèle «un malaise profond». En faisant ce constat, le chef de l’Etat a sans doute voulu montrer qu’il entendait certes rétablir l’ordre mais aussi s’attaquer aux racines du mal. Et c’est pourquoi il s’est adressé directement aux jeunes des quartiers défavorisés, qui se sentent exclus de la société, en leur disant qu’ils étaient «tous des enfants de la République, quelle que soit leur origine».

Dans la bouche du président de la République, de tels mots ne sont pas anodins. Reste qu’il leur faut tout de même se traduire en actions concrètes. De ce point de vue, Jacques Chirac a rappelé que des choses avaient été faites (plan d’urbanisation, zones franches pour les entreprises…), et qu’il comptait bien mettre en œuvre d’autres mesures pour améliorer la situation. Il a d’ailleurs annoncé la création d’un service civil volontaire dont l’objectif sera de permettre une meilleure intégration des jeunes issus de l’immigration. Après la disparition du service militaire, l’idée de mettre en place un autre système susceptible de faciliter la mixité sociale et les contacts entre jeunes de toutes origines avait déjà été évoquée. Jacques Chirac a donc choisi de mettre en place cette mesure qui devrait concerner, a-t-il annoncé, «50 000 jeunes en 2007».

Changer de regard

Mais le chef de l’Etat a aussi insisté sur la nécessité de combattre les discriminations dont sont victimes au quotidien les jeunes des quartiers, de changer de regard sur eux. Il en va de la responsabilité de chacun et notamment des partis politiques, des syndicats, des entreprises, des associations et des médias qui doivent participer à cet effort. Jacques Chirac a d’ailleurs annoncé qu’il allait rencontrer les directeurs des grands médias pour les sensibiliser à cette question. Si le président a de nouveau refusé l’instauration d’un système de «quotas» qu’il juge inéquitable, il semble donc mettre en peu d’eau dans son vin concernant la discrimination positive en estimant que les médias doivent refléter la France telle qu’elle est.

Jacques Chirac est apparu plus convaincant et concerné que lors de sa très brève intervention à l’issue du conseil de sécurité intérieure, organisé il y a huit jours, qui avait surtout montré sa nervosité et son malaise. Reste que sur le fond, les critiques n’ont pas tardé. Elles mettent toutes en avant la vanité des paroles du chef de l’Etat qui propose le même discours sur la fracture sociale depuis 1995, date de sa première élection. Et elles insistent sur l’inefficacité de la politique gouvernementale dans ce domaine dont les violences urbaines sont l’expression la plus visible.


par Valérie  Gas

Article publié le 15/11/2005 Dernière mise à jour le 15/11/2005 à 10:17 TU

Audio

Isabelle Chenu

Journaliste à RFI

«Pour parler du malaise des banlieues, le président français a su trouver les mots.»

Annick Lepetit

Porte-parole du PS

«Les actions qui sont proposées, sont en complète contradiction avec la politique menée depuis trois ans et demi. »