France
Service civil : faire du neuf avec du vieux
(Photo : AFP)
Les troubles que vient de traverser la France traduisent, pour le chef de l’Etat, une "crise de sens, une crise d'identité et un malaise profond de la société». Pour tenter de tirer les leçons de «ces événements graves», Jacques Chirac a annoncé un grand plan pour un service civil volontaire. Aucune précision n’a encore été apportée sur les détails touchant les jeunes concernés par cette mesure. Mais on sait qu’il s’agit en fait de rassembler et d’amplifier sous cette appellation, un ensemble de mesures et de dispositifs déjà existants.
Le service civil s’adressera à tous les jeunes, garçons et filles. Selon leur affectation, ils pourront être intégrés à partir de 18 ans ou de 15 ans. Exemple, l’initiative «Défense, deuxième chance» lancée cet été par la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie. Elle permet à des jeunes en difficulté de 18 ans à 21 ans, de se former à un métier pendant 1 à 2 ans et éventuellement d’intégrer l’armée, s’ils le souhaitent. Ce plan forme aux métiers de l’hôtellerie, du bâtiment, du bois, de la sécurité et des services à la personne. Avant leur apprentissage, les jeunes volontaires bénéficient d’une remise à niveau en lecture, écriture et calcul. Nourris, logés, ils touchent une allocation mensuelle de 300 euros. Quatre centres devraient être ouverts à la fin de l’année. À terme, plus de 50 sites dont des anciennes bases militaires, ou des casernes, devraient accueillir ces centres. En 2005 ils proposeront 700 places, 6 500 en 2006 et 20 000 en 2007, soit presque la moitié du contingent annoncé.
Volontaire ou obligatoireAutre initiative incluse dans le plan Chirac, les «cadets de la République», créés en 2004 par Dominique de Villepin alors qu’il était ministre de l’Intérieur. Ce programme offre une formation à tout jeune entre 18 et 26 ans, sans condition de diplômes, pour lui permettre de préparer le concours spécifique des gardiens de la paix. Dès le lycée, le candidat peut ainsi se former en alternance aux métiers de la police. Environ un millier de jeunes suivent actuellement cette formation, -ils seront 5 000 en 2007-, pendant laquelle leur est attribuée une allocation de 50% du salaire minimum, soit un peu moins de 600 euros.
L’appellation service civil volontaire sera également apposée au contrat d’apprentissage dans l’emploi (CAE). Créé en mai 2005, ce contrat est destiné aux 15-20 ans en situation d’échec scolaire ou d’exclusion du marché du travail. Rémunérés au SMIC, ces contrats au nombre de 20 000, d’une durée de 6 à 24 mois, concernent les collectivités territoriales et le secteur associatif. L’aboutissement à un emploi stable n’est cependant pas garanti.
Sceptique sur le service civil, Patrick Braouezec, élu communiste de Seine-Saint-Denis d’où sont parties les émeutes, aurait préféré un service civil obligatoire pour tous. «Cela permettrait à des jeunes de différentes origines de vivre ensemble et de se rendre utiles». De son côté, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, rappelle qu’en 2003, il avait en vain proposer un service civique obligatoire. «Un tel service permettrait pourtant d’opérer un brassage social et républicain pour faire partager à tous les valeurs de la République», soutient-il.
Même à droite, l’idée de service volontaire laisse dubitatif. Patrick Devedjian, conseiller de Nicolas Sarkozy, évoque une «idée palliative par rapport à la suppression du service militaire» alors que le porte-parole de l’UDF (centre droit) François Sauvadet, estime «qu’un service civil ne peut avoir de sens que s’il présente un caractère universel et obligatoire. Sinon on voit mal son utilité sociale». C’est Jacques Chirac qui a mis fin au service militaire obligatoire en 1996.
par Claire Arsenault
Article publié le 15/11/2005 Dernière mise à jour le 15/11/2005 à 17:52 TU