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France-Chine

La politique du donnant-donnant

Des accords commerciaux importants ont été signés à l'occasion de la visite du Premier ministre chinois Wen Jiabao.(Photo: AFP)
Des accords commerciaux importants ont été signés à l'occasion de la visite du Premier ministre chinois Wen Jiabao.
(Photo: AFP)
La Chine a commandé 150 Airbus à l’occasion de la visite en France du Premier ministre, Wen Jiabao, au cours de laquelle il a été reçu par le président de la République, Jacques Chirac, et le chef du gouvernement, Dominique de Villepin. A ce très gros contrat qui porte sur plusieurs milliards d’euros, s’ajoutent d’autres accords commerciaux avec le groupe Eurocopter, Alcatel ou Total. La France et la Chine ont décidé de renforcer leur «partenariat stratégique global» signé en 1997 et de mettre leurs relations économiques sous le signe du «donnant-donnant».

Paris veut profiter de la croissance du marché chinois. Pékin voudrait bien bénéficier du savoir-faire français. Chaque pays étant conscient de ce qu’il a à gagner, un terrain d’entente semble avoir été trouvé pour développer encore la coopération économique entre les deux pays. En commençant par le secteur stratégique de l’aéronautique. Si Wen Jiabao s’est rendu, dès son arrivée en France, à Toulouse, pour visiter l’usine d’assemblage Airbus, ce n’est pas par hasard. C’est avec cet avionneur que le Premier ministre chinois a signé le contrat le plus important de sa visite de 4 jours dans l’Hexagone. Celui-ci porte sur l’achat de 150 Airbus de la famille A320 pour un montant, d’après les prix catalogue de ces appareils, de près de 10 milliards d’euros. Il s’agit d’une commande «ferme», selon Noël Forgeard, le patron du groupe EADS, la maison mère d’Airbus. Ce qui signifie qu’il n’est pas question de simples intentions d’achat pour tout ou partie de cette commande, comme cela peut arriver quelquefois à l’annonce de tels accords.

En échange de ce contrat inédit puisqu’il s’agit de «la plus grosse commande individuelle d’Airbus», le Premier ministre chinois avait obtenu, la veille, la signature d’un accord de coopération industrielle avec l’avionneur qui prévoit notamment la réalisation d’une étude de faisabilité pour implanter, en Chine, une chaîne d’assemblage final pour les appareils monocouloirs (A320). Il a aussi réussi à signer avec une autre filiale d’EADS, Eurocopter, un contrat qui prévoit le développement conjoint d’un hélicoptère civil de 6 tonnes. Ce type de collaborations présente un grand intérêt du point de vue de la Chine puisqu’il s’accompagne d’un transfert de technologie, susceptible de permettre à ce pays de développer sa propre industrie. Une condition sine qua non pour qui veut négocier avec Pékin.

L’embargo sur les armes : «un anachronisme»

Cet échange de bons procédés a fait dire au président d’Airbus, Gustave Humbert : «Nous allons renforcer notre coopération industrielle, mais d’autre part nous allons vendre plus d’avions là-bas. On peut donc dire que c’est donnant-donnant pour les salariés, pour notre entreprise et aussi pour les Chinois». Wen Jiababo a lui aussi fait part de sa satisfaction en affirmant que «la coopération sino-française dans l’aéronautique ne se limite plus à l’acquisition d’avions mais est entrée dans une phase de coopération technologique et de développement».

Pékin a d’autant plus lieu de marquer son contentement que Paris continue à relayer sa revendication de lever l’embargo sur les ventes d’armes, instauré par l’Union européenne à la suite de la répression du mouvement démocratique de la place Tiananmen en 1989. Dominique de Villepin, le chef du gouvernement français, a d’ailleurs réaffirmé à l’issue de son entretien avec Wen Jiabao, à Paris, que cet embargo représentait «un anachronisme». Une analyse que son homologue chinois n’aura pas manqué d’apprécier, d’autant plus que les représentants français sont restés très discrets concernant la question des droits de l’homme en Chine.

Une croissance à faire pâlir

Il est vrai que l’enjeu est de taille. La croissance chinoise a de quoi faire pâlir et porte la promesse de débouchés très importants pour les prochaines années. Dans le secteur aéronautique, par exemple, la Chine aura besoin de 1 600 à 2 600 nouveaux appareils dans les 20 ans qui viennent. Cela fera de ce pays, le deuxième marché après les Etats-Unis. Et Airbus espère bien grignoter une part plus importante de ce gâteau en rattrapant son concurrent américain Boeing, qui détient actuellement 60 % du marché chinois.

L’aéronautique n’est pas le seul secteur alléchant. Les communications ou les transports sont amenés à se développer de façon tout aussi rapide. Et la visite de Wen Jiabao aura aussi permis aux Français de poser des jalons dans ces domaines. Dominique de Villepin a annoncé la signature d’un protocole d’accord en vue de la construction d’une ligne ferroviaire à grande vitesse pour un montant de 150 millions d’euros. Un contrat a, d’autre part, été signé avec le groupe pétrolier Total pour créer un réseau de stations-service dans la région de Shanghai. Et enfin, Wen Jiabao a conclu un accord avec Alcatel concernant la fabrication d’un satellite de communication. Reste le secteur du nucléaire, sur lequel la Chine fait jouer la concurrence, notamment entre les Etats-Unis et la France, avant de choisir qui construira les quatre centrales dont elle a besoin.


par Valérie  Gas

Article publié le 05/12/2005 Dernière mise à jour le 05/12/2005 à 18:03 TU