Israël
Bulletins de santé et nécessités politiques
(Photo: AFP)
De notre correspondant à Jérusalem
Le Parti travailliste a annoncé hier la relance de sa campagne électorale, gelée depuis l’accident d’Ariel Sharon. Au plus mal dans les sondages, Amir Peretz et ses amis doivent se refaire une santé, car le scrutin législatif est dans un peu plus de deux mois. Le parti de gauche voudrait bien faire revenir Shimon Peres au bercail, mais l’ancien prix Nobel de la Paix se voit bien, lui, dans le prochain gouvernement d’Ehud Olmert. « Tant qu’il y a un portefeuille ministériel en vue, il y a une raison de se lever le matin pour Shimon Peres », écrivait il y a peu un analyste israélien. L’ancien diplomate, 82 ans, se serait vu promettre un place de numéro 2 sur la liste de Kadima, le nouveau parti centriste.
Chacun reprend donc son rôle. On retrouve Benyamin Netanyahou, tout frais chef du Likoud, jouant une partition fortement teintée d’opportunisme. Dans une interview cette semaine au New York Times, l’ancien Premier ministre se présente comme « l’héritier le plus direct d’Ariel Sharon ». « Vulgaire et effronté », pour le quotidien Haaretz, qui rappelle que le « bulldozer » n’a pas encore rendu l’âme, et que le fossé idéologique entre « Arik » et « Bibi » s’est creusé avec le désengagement de Gaza. Les proches de Sharon, eux, se disent stupéfiés par l’audace du chef du Likoud, qui tente d’enrayer ainsi la chute de son parti.
Car Kadima continue sa marche « en avant » (traduction du nom du parti en hébreu) : la formation créée par Ariel Sharon il y a un mois et demi a le vent en poupe. Selon les dernières estimations, le parti centriste remporterait 44 ou 45 sièges sur les 120 que compte la Knesset. Mieux que le score record du Likoud version Sharon en 2003 (40 élus) ! Même si le nouveau parti bénéficie pour le moment d’une vague de sympathie liée à l’accident d’Ariel Sharon, ses cadres peuvent se rassurer à la vue d'autres chiffres. Une étude fait apparaître que Kadima, loin de reposer sur les épaules d’un seul homme, correspond à un mouvement de fond de la société israélienne : la plupart des sondés s'y définissent comme politiquement au centre.
Relever le défi des colonies
Pour Ehud Olmert, la voie semble donc grande ouverte jusqu’au 28 mars, date des élections. Il doit désormais passer l’épreuve du pouvoir. Première décision importante du nouveau Premier ministre : il autorisera les habitants de Jérusalem-Est (annexée par Israël) à voter pour les législatives palestiniennes dans moins de deux semaines. La menace d’interdire un tel scrutin avait été brandie par Ariel Sharon pour protester contre la participation du Hamas. Mais Ehud Olmert a dû se plier au principe de réalité. L’administration américaine lui a clairement montré son intérêt à ce que les élections palestiniennes se tiennent. Le Premier ministre par intérim a préféré décrocher son téléphone pour prévenir Condoleeza Rice de sa décision. Pour l’Etat hébreu, il n’aurait pas été bon de s’arc-bouter sur sa position, et d’être montré du doigt en cas d’annulation du scrutin palestinien.
Prochain sujet sensible pour Ehud Olmert : les colons. Adversaires farouches d’Ariel Sharon, « le traître de Gaza », les colons ont annoncé la reprise du combat contre les évacuations, cette fois en Cisjordanie. La première bataille se déroulera au nord de Ramallah, dans la petite colonie non autorisée d’Amona, qui doit être détruite par l’armée israélienne. Les chefs des colons veulent en faire un point de ralliement, appelant des milliers de personnes à s’y rendre. Un défi à la hauteur de la tâche qui attend le successeur d’Ariel Sharon.
par Xavier Yvon
Article publié le 12/01/2006 Dernière mise à jour le 12/01/2006 à 11:44 TU