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Grippe aviaire

Pourquoi le virus passe entre les mailles du filet

La conférence des donateurs, à Pékin, doit étudier les moyens financiers et techniques de lutte contre la propagation de la grippe aviaire.(Photo : AFP)
La conférence des donateurs, à Pékin, doit étudier les moyens financiers et techniques de lutte contre la propagation de la grippe aviaire.
(Photo : AFP)
Identifier les foyers, abattre les animaux malades, mettre en quarantaine ceux des élevages situés à proximité, éventuellement les vacciner, limiter au maximum les contacts non protégés avec les humains… on sait quelle est la marche à suivre pour empêcher la propagation du virus de la grippe aviaire. Pourtant, depuis sa résurgence en Asie en 2003, il n’a pas été possible de le stopper. Et pour cause, le manque de ressources des Etats, les caractéristiques des élevages dans les régions concernées, l’absence d’information des populations, la difficulté à agir sur les oiseaux sauvages qui jouent le rôle de porteurs sains, représentent autant de facteurs difficilement contrôlables qui limitent l’efficacité des mesures de prévention et de lutte. La conférence des donateurs, qui se réunit les 17 et 18 janvier à Pékin, doit examiner les moyens de surmonter ces obstacles.

Protéger l’homme, c’est d’abord réussir à limiter la propagation de la grippe aviaire parmi les volailles. C’est la raison pour laquelle il est indispensable d’intervenir très vite dès qu’un volatile contaminé est identifié dans un élevage, c’est-à-dire dans les 48 heures qui suivent l’apparition de la maladie. Les spécialistes et les autorités des pays concernés par la grippe aviaire le savent. Tout le problème réside donc dans le fait d’avoir les moyens d’identifier les foyers, d’alerter les autorités et d’agir efficacement dans les délais requis.

Dans des pays comme la Chine, la Thaïlande, l’Indonésie, le Vietnam… et même maintenant la Turquie, où la grippe aviaire s’est développée, la structure des élevages et l’absence de services vétérinaires performants sur l’ensemble du territoire ont limité l’efficacité des interventions. Le nombre très important de petites fermes où les éleveurs vivent au milieu de leurs volailles, dans des régions rurales éloignées de tout, constitue une difficulté majeure. D’une part, parce que les paysans sont mal, ou pas, informés sur les dangers de la maladie et les moyens de lutter contre elle. D’autre part, parce que même s’ils sont conscients des risques, ils hésitent toujours à signaler la présence de volailles malades, de peur de devoir tuer l’ensemble de leurs animaux et de perdre ainsi leur source de revenus mais aussi leur nourriture. Cette situation a deux conséquences. Elle participe parfois à retarder le signalement de la grippe aviaire aux autorités sanitaires et fait penser qu’il y a certainement des foyers où la présence du virus est passée, voire passe encore, inaperçue.

Des dizaines de millions de poulets abattus

Cela explique vraisemblablement en partie le fait que les autorités des différents pays n’ont pas pu stopper la diffusion de la grippe aviaire malgré l’abattage de plusieurs dizaines de millions de poulets. Le temps nécessaire pour envoyer des équipes vétérinaires dans des zones reculées est souvent trop long pour permettre de stopper la propagation aux élevages alentours. Lorsque les paysans procèdent eux-mêmes à l’abattage des animaux, ils le font en règle générale sans prendre les précautions d’hygiène indispensables (port d’un masque, de gants, d’une combinaison de protection). Cela augmente du coup le risque de contamination humaine. Jusqu’à présent, en effet, les experts assurent que toutes les personnes contaminées l’ont été à cause d’un contact rapproché avec des animaux malades (inhalation de sécrétions infectées).

Le manque de ressources dont souffrent les Etats touchés par la grippe aviaire est aussi un handicap. Car cette maladie peut être combattue si tant est que les mesures nécessaires soient mises en œuvre de manière rigoureuse. Et pour y parvenir, il est indispensable d’avoir les moyens matériels et financiers adéquats. Par exemple, pour indemniser les éleveurs afin de les convaincre de signaler sans tarder les volailles malades et d’accepter l’abattage de leurs animaux. Mais aussi pour financer la vaccination des poulets dans les élevages situés dans les zones à risques autour des foyers. Il s’agit, en effet, d’une mesure efficace mais coûteuse, complémentaire à l’abattage, la quarantaine et la désinfection, dans les zones où la grippe aviaire devient endémique. L’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) estime que pour le seul Vietnam, une campagne de vaccination massive des volailles coûterait environ 40 millions de dollars. Tous les pays concernés n’ont donc pas les moyens pour mener de tels programmes.

Mobiliser des fonds, coordonner les actions

La surveillance des oiseaux sauvages fait, en outre, partie des moyens de lutte contre la propagation de la grippe aviaire. Ces volatiles jouent, en effet, un rôle majeur dans la dissémination du virus parce qu’un certain nombre d’entre eux sont des porteurs sains. Lors de leurs migrations, il transportent le H5N1 et le transmettent aux oiseaux d’élevages qui développent la maladie. Il est donc nécessaire de surveiller les oiseaux lors de leurs étapes et de procéder à des tests pour identifier la présence éventuelle du virus. Cela nécessite donc de disposer de personnels qualifiés, de moyens techniques et d’agir dans le cadre d’une coopération internationale bien coordonnée pour que l’information soit relayée de manière efficace et rapide.

L’inexorable propagation de la grippe aviaire depuis 2003 et la multiplication récente des cas humains en Turquie ont participé à sensibiliser la communauté internationale. Tous les acteurs semblent aujourd’hui conscients des enjeux liés à cette épizootie, soupçonnée d’être capable de préparer le terrain à une pandémie de grippe humaine. Dans ce contexte, la réunion des donateurs (Etats et organisations internationales) organisée à Pékin, les 17 et 18 janvier, dans l’espoir de réunir 1,5 milliard de dollars destinés à aider les programmes nationaux, donnera une idée de la capacité de mobilisation des participants.


par Valérie  Gas

Article publié le 16/01/2006 Dernière mise à jour le 16/01/2006 à 18:33 TU

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(Conception : Bourgoing / RFI)