Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Grippe aviaire

Une ordonnance à deux milliards de dollars

Le Premier ministre chinois Wen Jiabao a annoncé mercredi que son pays allait participer à hauteur de 10 millions de dollars. Le montant global de promesses de dons atteint 1,9 milliard de dollars.(Photo : AFP)
Le Premier ministre chinois Wen Jiabao a annoncé mercredi que son pays allait participer à hauteur de 10 millions de dollars. Le montant global de promesses de dons atteint 1,9 milliard de dollars.
(Photo : AFP)
La réunion organisée à Pékin à l’initiative de la Chine, de la Banque mondiale et de l’Union européenne pour réunir des fonds afin de lutter contre la grippe aviaire a atteint son objectif. Les promesses de dons des participants ont été à la hauteur des espoirs et ont même dépassé le montant estimé nécessaire par les organisations internationales pour mener à bien un plan d’action mondial sur trois ans, soit 1,5 milliard de dollars. Ce sont près de deux milliards de dollars qui devraient donc être disponibles (1,9) pour développer la surveillance, l’alerte, l’information des populations, la prise en charge des foyers, la constitution de stocks d’antiviraux.

Tant d’argent pour une épidémie humaine encore virtuelle, c’est inédit. Cela montre que la menace de la grippe aviaire est prise très au sérieux par la communauté internationale. La forte participation à la conférence de Pékin (17,18 janvier) en est d’ailleurs un autre indicateur. Quatre-vingt-neuf Etats ont envoyé des représentants ainsi qu’une vingtaine d’organisations internationales. Et ils n’ont pas fait le déplacement pour rien puisqu’au bout du compte 1,9 milliard de dollars ont été promis : 900 millions sous forme de prêts, un milliard sous forme de subventions. Aucun calendrier pour le déblocage des fonds n’a, en revanche, été établi à Pékin.

Les Etats-Unis apportent la contribution la plus importante avec 334 millions de dollars promis. L’Union européenne devrait, quant à elle, donner 120 millions de dollars sans compter les contributions individuelles des Etats membres. La France s’est engagée à débloquer 32 millions, la Grande-Bretagne 35,5 millions, l’Allemagne 27,7. Au total, la contribution européenne devrait atteindre 260 millions de dollars. Le Japon a promis 159 millions de dollars, la Russie 44,9, l’Australie 41,7. Le pays hôte de la conférence, la Chine, a pour sa part annoncé une contribution au financement du plan mondial à hauteur de 10 millions de dollars.

«Il n’y a pas de temps à perdre»

Cette mobilisation des bailleurs de fonds répond aux appels lancés depuis plusieurs mois par les organisations internationales concernées par la grippe aviaire : l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Elles n’ont, en effet, eu de cesse de mettre en garde contre le risque de voir l’épizootie se transformer en épidémie humaine si le virus H5N1 venait à muter et devenait transmissible entre humains. Ce type d’évolution est susceptible de survenir à n’importe quel moment. C’est la raison pour laquelle le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a déclaré à l’ouverture de la conférence de Pékin : «Il n’y a pas de temps à perdre. Assurons-nous que nous sommes prêts». Un message relayé par le président de la Banque mondiale, Paul Wolfowitz, qui a expliqué que «tous les pays partagent la responsabilité de combattre la maladie».

Pour éviter le pire, il n’y a pas de recette miracle mais un certain nombre de précautions à prendre et de mesures à mettre en œuvre à l’échelle nationale et internationale. Le premier niveau d’intervention se situe dans le contrôle de la propagation de l’épidémie animale «à la source», c’est-à-dire dans les élevages de volailles. Pour y parvenir, il est indispensable d’aider les Etats touchés à mettre en place des systèmes de détection, d’alerte et d’intervention fiables et rapides. Le plan de lutte contre la grippe aviaire prévoit donc d’agir dans ce sens, par exemple en mettant à la disposition des pays des fonds pour indemniser les éleveurs de volailles et les inciter à signaler tous les cas de maladie, ou en les aidant à développer des services vétérinaires efficaces et à mettre en œuvre les dispositions nécessaires pour éradiquer les foyers animaux (abattage, confinement, quarantaine…). Des campagnes d’information sont aussi prévues pour sensibiliser les populations aux dangers de la promiscuité entre les hommes et les volailles.

Faire des stocks d’antiviraux

Dans le domaine de la prévention, le plan insiste sur le renforcement de la surveillance épidémiologique, le partage de toutes les informations liées au virus et la coopération en matière de recherche. Mais surtout il prévoit de constituer des stocks de médicaments antiviraux. En l’absence d’un vaccin, qui ne pourra être mis au point que dans les 4 à 6 mois qui suivront l’apparition d’une souche humanisée du virus, les antiviraux constituent la seule ressource pour limiter les effets de la maladie et sa propagation. Si tant est qu’ils soient distribués rapidement aux populations concernées -dans les 48 heures qui suivent la détection- et associés à des mesures d’isolement des malades, de quarantaine de l’entourage. Dans ce domaine, le laboratoire Roche, qui fabrique l’antiviral le plus efficace (Tamiflu), a annoncé son intention de faire un don de trois millions de traitements à l’OMS. Ce stock d’urgence est destiné à être distribué dans les pays où se déclarerait une épidémie.

Cette solidarité internationale est le résultat de la prise de conscience du danger que représente la grippe aviaire. Pour le moment, on ne recense que quelque 150 cas humains pour 80 décès, mais potentiellement une épidémie humaine pourrait provoquer des millions de morts sur tous les continents. En débloquant des fonds pour aider les pays où l’épizootie s’est propagée, les bailleurs ne font pas seulement preuve de générosité. Ils essaient de se prémunir contre une menace. Le commissaire européen à la Santé, Markos Kyprianou, a d’ailleurs estimé qu’il ne s’agissait pas «de charité» mais «d’autodéfense». Il est vrai que selon une étude de la Banque mondiale, le coût d’une épidémie humaine s’élèverait à 800 milliards de dollars.


par Valérie  Gas

Article publié le 18/01/2006 Dernière mise à jour le 18/01/2006 à 17:32 TU

Dossiers

(Conception : Bourgoing / RFI)