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Comores

Mayotte attire trop de clandestins

A Mayotte, ces ressortissants comoriens entrés illégalement sont reconduits dans leur pays par les autorités françaises.(Photo: AFP)
A Mayotte, ces ressortissants comoriens entrés illégalement sont reconduits dans leur pays par les autorités françaises.
(Photo: AFP)
L’immigration illégale dans la petite île française de l’Océan indien atteint des proportions inquiétantes : un tiers des 200 000 insulaires sont clandestins, rapporte une mission parlementaire, présidée par le socialiste René Dosière. L’ampleur de la situation force des recommandations urgentes : réagir contre l’emploi clandestin, réajuster la défaillance de comptage de l’état civil et surtout développer la coopération avec les Comores, sous peine d’explosion des services éducatifs, sanitaires et sociaux.

Bordées d’îles réputées «misérables» des Comores et des pays pauvres d’Afrique australe, la petite île de Mayotte se révèle être un « eldorado » très apprécié dans cette région de l’Océan indien. Même s’il reste beaucoup à faire, l’île comorienne s’avère attirante en matière sociale, d’hygiène, de santé ou d’éducation, avec parfois des écarts de 1 à 10 avec les îles voisines. En tout, 45 000 à 60 000 personnes vivant à Mayotte sont clandestins, ce qui correspond au tiers des 200 000 habitants, constatent les parlementaires, après une enquête sur place du 12 au 17 décembre dernier.

Même si les statistiques d'état civil se révèlent défaillantes, comme sont inexistantes celles des Comores, les services de l’Etat français disent avoir enregistré une augmentation préoccupante de la clandestinité depuis 10 ans. Depuis cette date, la démographie insulaire a cru de 50 %, constatent-ils. Et dans 90% des cas, les illégaux sont d’origine comorienne.

Il y a bien une spécificité de l’immigration mahoraise. Les clandestins sont en quête de travail, de soins médicaux ou de services de maternité pour que leur enfant jouisse, peut-être un jour, du «droit du sol». Le tiers des 7 676 bébés nés en 2004, par exemple, l’étaient de mères clandestines. Et le nombre d’actes de reconnaissance de paternité permettant aux enfants d’acquérir immédiatement la nationalité française est passé de 882 en 2001 à 4 146 en 2005.

Pour René Dosière, président de la mission parlementaire, la situation qui est apparue sur l’île devenue française en 1976 s’apparente à un «recours abusif au droit du sol». Ce principe veut qu’une personne née sur le territoire français puisse bénéficier de la nationalité française. Leur présence sature les services mahorais, sanitaires et sociaux, en premier lieu. Elle perturbe aussi l’équilibre économique de l’île puisque l’économie souterraine fleurit avec le concours de la population mahoraise : 10 000 personnes sont des travailleurs illégaux, exploités au travail.

«Mayotte n’a pas vocation à accueillir toute la misère du monde», a-t-il déclaré à la journaliste de RFI Marina Mielczarek.

«Visas obstétricaux»

Faut-il ou non alors remettre en question ce droit du sol sur l’île ? François Baroin, ministre français de l’outre mer, l’avait suggéré en septembre dernier. Mais l’avis du ministre n’a pas été suivi par le député auteur du rapport. En effet, René Dosière estime aujourd’hui qu’il «convient avant tout de se donner les moyens d’appliquer le droit existant».

Ensuite, le socialiste recommande de suivre une série de pistes :

D’abord renforcer le contrôle de l’état civil, dont la tenue des registres reste «confuse». Celui-ci est en effet défaillant par insuffisance des moyens des forces de l’ordre. Les «cadis» ou magistrats musulmans, dont le rôle pourrait être transformé en celui de «médiateurs de proximité», ont longtemps tenu ces registres, et célébré des mariages coutumiers en l’absence d’officiers d’état civil. Par ailleurs, la création rapide pour chaque Comorien d’une pièce d’identité biométrique, infalsifiable, ainsi que la délivrance facile de visas, devraient diminuer le flux d’immigration clandestine dans la région. Les services de l’Etat doivent être mobilisés en ce sens.

Il faut ensuite réguler les conditions d’emploi sur l’île. Les employeurs y exploitent en effet les travailleurs clandestins, en premier lieu dans la construction urbaine. Une coopération avec les îles comoriennes de la région, que ce soit en matière économique et policière, ou sanitaire et scolaire, pourraient avoir des conséquences positives sur cette situation jugée préoccupante.

Le rapport préconise également de construire une maternité moderne sur l’île la plus proche de Mayotte, l’île d'Anjouan. Autre solution : les consulats pourraient délivrer des visas spécifiques pour se faire soigner, dits «visas obstétricaux». «Une femme étrangère pourrait comme cela venir accoucher à Mayotte en s’engageant au retour», explique le rapport qui servira aux travaux d’un comité interministériel sur l’immigration, le 9 février.


par Gaëtane  de Lansalut

Article publié le 03/02/2006 Dernière mise à jour le 03/02/2006 à 19:47 TU

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Didier Quentin

Député UMP de Charente-maritime

«Mayotte n'a pas vocation à accueillir toute la misère de l'océan Indien.»

[03/02/2006]