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Grippe aviaire

Faut-il vacciner les poulets ?

Elevage de volaille à Boucieu-le-Roi, dans le sud de la France. (Photo: AFP)
Elevage de volaille à Boucieu-le-Roi, dans le sud de la France.
(Photo: AFP)
L’Union européenne vient d’autoriser deux de ses membres, la France et les Pays-Bas, à lancer des campagnes de vaccination préventive sur les volatiles d’élevage. Il aura fallu deux jours aux experts vétérinaires réunis à Bruxelles pour prendre cette décision. Il est vrai que les avis sont très partagés, dans les Etats européens et dans la communauté scientifique, sur l’utilité du recours à cette mesure alors que les élevages français et néerlandais ne sont pas touchés pour le moment. Dans l’Union européenne, à l’exception de deux poules en Autriche, le H5N1 n’a été détecté que sur des oiseaux sauvages.

C’est un oui sous conditions que vient de rendre l’Union européenne. Les demandes déposées par la France et les Pays-Bas pour procéder à la vaccination d’une partie de leurs volailles d’élevage ont été acceptées. Mais du coup, ces deux pays se voient interdire l’exportation des volatiles vaccinés vivants ou de leurs oeufs, que ce soit vers les autres membres de l’UE ou vers les pays tiers. La viande et les produits dérivés des volailles ne sont, en revanche, pas soumis à cette mesure. Cette restriction a été apportée pour éviter tout risque de propagation du H5N1 par des animaux vaccinés, donc protégés, mais néanmoins porteurs du virus.

Car tout le débat sur l’utilisation de la vaccination comme moyen de lutte contre la propagation de la grippe aviaire est là. Les vaccins empêchent les animaux de tomber malades et permettent donc de réduire la concentration du virus dans l’environnement. Mais il existe une possibilité qu’un volatile ayant reçu le sérum, tout en étant immunisé, soit capable de contracter et transmettre le virus à ses congénères, sans que l’on puisse déceler ce phénomène. Cela a déjà été observé. La vaccination ferait donc courir le risque de masquer la présence du virus dans une population animale. Du coup, la propagation de la maladie serait certes ralentie mais pas stoppée. Et des foyers d’infection pourraient resurgir malgré tout. Ce problème est accentué par le fait que l’immunisation n’est pas immédiate. Les vaccins le plus souvent utilisés nécessitent, en effet, au moins deux injections à environ trois semaines d’intervalle [cela varie en fonction de l’espèce animale et du virus] avant d’être efficaces.  

Une mesure complémentaire 

C’est notamment pour cette raison que l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) recommande, jusqu’à présent, l’utilisation de la vaccination surtout dans les pays où la grippe aviaire est endémique et où les autres mesures de protection, l’abattage en premier lieu, n’ont pas permis d’éradiquer le virus dans les élevages. Le Vietnam et la Chine, qui font partie des pays les plus touchés par l’épizootie, ont ainsi eu recours à la vaccination généralisée. Au Vietnam, environ 70% des volailles d’élevage ont été vaccinées en 2005. En Chine, les autorités ont décidé de vacciner les 14 milliards de volailles élevées sur leur sol. La vaccination d’urgence peut aussi être mise en œuvre dans un périmètre situé autour d’un élevage où le virus a été détecté. Dans les deux cas, il s’agit toujours d’une mesure complémentaire dans le sens où elle ne dispense pas d’abattre les volailles des élevages contaminés, de surveiller les mouvements des animaux et de mettre en oeuvre des mesures d’hygiène.

Les pays de l’Union européenne ne se trouvent pas dans cette situation puisque, pour le moment, le H5N1 n’a été détecté que sur des oiseaux sauvages et sur deux poules en Autriche. L’objectif des vaccinations est donc, pour la France et les Pays-Bas, qui se trouvent être deux gros producteurs de volailles de l’UE, d’agir préventivement afin d’éviter à des populations de volatiles domestiques situées sur des zones à risques de contracter le virus. Le plan français prévoit de mener une vaccination préventive ciblée sur 900 000 oies et canards des élevages de trois départements (Loire-Atlantique, Vendée, Landes) où transitent les oiseaux migrateurs. Les Pays-Bas veulent, quant à eux, pouvoir vacciner les volatiles qui ne pourront pas être confinés. Cinq millions de volailles sont, en effet, élevées en plein air dans le pays. 

Des «oiseaux sentinelles» 

Si l’Union européenne a finalement donné son feu vert à ces campagnes de vaccination préventive, malgré les réticences de plusieurs Etats comme l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark ou le Portugal, c’est aussi parce que les plans français et néerlandais prévoient des mesures de contrôle et de surveillance pour éviter une transmission silencieuse du virus. Ils envisagent, par exemple, d’introduire dans les élevages des «oiseaux sentinelles» qui ne seront pas vaccinés pour pouvoir être alertés d’une éventuelle apparition de la maladie. Ils préconisent, d’autre part, la mise en place d’un suivi virologique pour s’assurer qu’aucun oiseau vacciné n’est porteur sain du virus H5N1. 

Les campagnes de vaccination sont entièrement à la charge des Etats. L’autorisation de Bruxelles était nécessaire mais elle n’est pas assortie d’une aide financière. En France, cela devrait coûter 1,6 million d’euros. Au-delà même du débat scientifique sur les inconvénients de la vaccination des volailles, le budget nécessaire pour la mettre en œuvre en fait de toute manière une mesure inaccessible pour de nombreux pays en développement.


par Valérie  Gas

Article publié le 22/02/2006 Dernière mise à jour le 22/02/2006 à 15:59 TU

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(Conception : Bourgoing / RFI)