Cameroun
Coup de balai anti-corruption
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De notre correspondant à Yaoundé
«On va voir ce qu’on va voir», dit un lecteur devant un kiosque du centre-ville où sont agglutinés des dizaines de citadins qui lisent et relisent les manchettes des journaux. Cameroon Tribune, le quotidien gouvernemental annonce en «petite une» de son édition de mercredi : «Trois anciens DG interpellés». Les quotidiens privés en font leurs sujets-phares. Le Messager publie trois photos au–dessous desquelles on peut lire : «Aux arrêts». Mutations titre «Frémissement : Ondo Ndong, Gilles R. Belinga et Joseph Edou arrêtés !». Quant à
La capitale s’est réveillée comme elle s’était endormie la veille : entre doutes et espoirs. Très tôt le 21, des éléments encagoulés du Groupement spécial d’opération (GSO), une unité d’élite de la police, ont «cueilli» à leurs domiciles trois anciens directeurs généraux de sociétés d’Etat, une dizaine d’ex-hauts cadres de ces structures publiques. Parmi les plus connus : Emmanuel Gérard Ondo Ndong, ex-patron du Fonds spécial d’équipement intercommunal (Feicom), sorte de «banque des communes», dont un «audit institutionnel» avait déjà, en 2005, alimenté toutes sortes de controverses autour d’une présumée atteinte aux principes de la gouvernance ; Joseph Edou, ci-devant directeur du Crédit foncier du Cameroun (DFC), établissement de crédit spécialisé dans le financement de l’habitat social ; Gilles Roger Belinga, ancien directeur de
«Il faut maintenant que les procès se tiennent rapidement»
Un communiqué du vice-Premier ministre rendu public ce jour, précise que : «des informations judiciaires sont ouvertes contre un certain nombre de responsables présumés auteurs de détournements de deniers publics, de corruption, de faux et d’usage de faux au préjudice de l’Etat et de certains établissements publics.» Début d’un feuilleton qui n’a pas laissé indifférents des personnalités dont la corruption est la tasse de thé. «Mieux vaut tard que jamais. Nous souhaitons que les procédures aillent jusqu’au bout et que si ces personnes sont coupables, on confisque leurs biens. Il faut aussi espérer qu’enfin un cadre institutionnel cohérent sera mis en place de sorte à prévenir les actes de corruption financière et morale», avance Pauline Biyong, figure bien connue de la société civile, membre du Comité de pilotage du Programme national de gouvernance, sorte de boussole de l’action du gouvernement. Une préoccupation partagée par Babissakana, expert financier, patron du cabinet Prescriptor, de bonne réputation. «C’est ce qu’on attendait depuis longtemps. Il faut maintenant que les procès se tiennent rapidement, et qu’on rétrocède aux propriétaires légitimes, les biens qui devront être confisqués si ces responsables sont coupables», avance-t-il. «Il était grand temps de restaurer la crédibilité largement entamée de l’image du Cameroun», résume pour sa part Henriette Ekwe, vice-présidente de le branche camerounaise de l’ONG de lutte contre la corruption, Transparency International.
Selon toute probabilité, l’opération entamée mardi devrait se poursuivre dans les prochains jours. L’enjeu est clair : le gouvernement qui espère franchir en avril prochain, le point d’achèvement de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE, synonyme de réduction substantielle de la dette du pays), envoie là un signal très attendu des bailleurs de fonds, en premier lieu le Fonds monétaire international (FMI), dont une mission vient de séjourner à Yaoundé.
par Valentin Zinga
Article publié le 22/02/2006 Dernière mise à jour le 22/02/2006 à 18:31 TU