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Soudan

Dernière ligne droite pour essayer de débloquer la situation

Un des 7 000 soldats envoyés par l'Union africaine au Darfour. L'UA a proposé un plan de paix. Reste aux parties en conflit à l'accepter.(Photo: AFP)
Un des 7 000 soldats envoyés par l'Union africaine au Darfour. L'UA a proposé un plan de paix. Reste aux parties en conflit à l'accepter.
(Photo: AFP)

Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté mardi une résolution qui prévoit des sanctions individuelles à l’égard de quatre Soudanais. Deux d’entre eux sont des responsables pro-gouvernementaux, et les deux autres sont des chefs rebelles. Tous sont accusés d’exactions commises dans le Darfour. De son côté, l’Union africaine a présenté mardi soir à Abuja un projet d’accord global visant à ramener la paix dans cette région. Le médiateur de l’UA espère que les deux parties en conflit vont accepter ce plan de paix «le plus vite possible».


«On met des sparadraps sur des plaies ouvertes». Jan Egeland, responsable des affaires humanitaires de l’Onu, ne mâche pas ses mots. C’était il y a quelques jours, une déclaration faite à New-York, concernant la situation au Darfour, à l’est du Soudan. Depuis trois ans, un conflit dans cette région oppose les forces gouvernementales soudanaises appuyées par des milices arabes, les Janjawid, à des rebelles qui réclament plus d’autonomie et un partage équitable des richesses nationales. Entre 200 000 et 400 000 personnes ont trouvé la mort et plus de deux millions ont été déplacées, en raison de la guerre civile dans le Darfour. L’Union africaine a envoyé dans cette région une force de paix d’environ 7 000 hommes. «La situation est terrible», affirme Jan Egeland. Et à en croire le coordonnateur des secours d’urgence, les moyens mis en œuvre par la communauté internationale pour régler les problèmes sont loin d’être suffisants.

Ce mardi, l’Onu a pourtant adopté une résolution inédite dans ce conflit du Darfour. Le Conseil de sécurité a ainsi voté par douze voix pour et trois abstentions, un texte qui impose des sanctions individuelles à quatre personnalités soudanaises, accusées d’avoir commis des exactions durant le conflit. Ces sanctions consistent en une interdiction de voyager et un gel des avoirs. Le principe en avait été admis en mars dernier. Là, avec cette résolution 1672, les Nations unies dépassent le cadre des simples déclarations d’intention.

Des sanctions équilibrées, mais jugées insuffisantes

Parmi les quatre personnes visées, deux appartiennent au camp gouvernemental. Il s’agit de Gaffar Mohamed el Hassan, ancien commandant dans l’aviation soudanaise. D’après les informations recueillies par les Nations unies, il aurait coordonné les opérations de l’armée et des Janjawid dans le Darfour entre 2004 et 2006. Egalement visé par les sanctions, Cheikh Moussa Hilal, un des leaders des milices janjawid, accusé d’avoir directement commis des exactions. Il avait déjà été arrêté en 1997 pour le meurtre de dix-sept personnes.

Côté rebelle, deux chefs sont concernés par les sanctions de l’Onu. D’abord, Adam Yacoub Chant, un de cadres de l’Armée de libération du Soudan (ALS), qui aurait violé le cessez-le-feu en juillet 2005 en attaquant les forces gouvernementales. Ensuite, Gabril Abdoul Karim Badri, qui commande le Mouvement national pour la réforme et le développement (NMRD). Il est soupçonné d’avoir enlevé en octobre plusieurs membres de la force de l’Union africaine déployée au Darfour.

Pour l’ambassadeur des Etats-Unis à l’Onu, John Bolton, il s’agit là d’une «première étape importante». Et de laisser entendre que cette liste des personnes frappées par ces sanctions pourrait être allongée. Mais cette satisfaction n’est pas du tout partagée par les Ong oeuvrant au Darfour. Ainsi, l’organisation de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch (HRW) estime que ces sanctions sont des «demi-mesures (…) minables». Interrogé par RFI, Reed Brody, conseiller spécial de HRW regrette «un manque de volonté politique face à un génocide». «La liste a dû être équilibrée : il y a deux personnes du camp du gouvernement et deux rebelles, comme si les atrocités étaient équilibrées, ce qui n’est pas le cas. (…) Il faudrait traduire en justice tout ceux qui sont responsables de ces crimes contre l’humanité».

La paix avant le 30 avril ?!

Simple coïncidence ? Pendant qu’à New-York, le Conseil de sécurité de l’Onu votait les sanctions individuelles, à Abuja, l’Union africaine proposait un plan de paix global pour le Darfour. La capitale nigériane est, depuis plusieurs mois, le théâtre de discussions inter-soudanaises. D’un côté, une délégation du gouvernement de Khartoum ; de l’autre, des représentants des mouvements rebelles. Et entre les deux, le médiateur mandaté par l’Union africaine pour parvenir à un accord de paix. Au-dessus de tous les protagonistes, une horloge. Le temps presse. Théoriquement, les discussions doivent aboutir à un plan de paix, au plus tard le 30 avril. C’est en tout cas l’exigence posée par la communauté internationale.

En dépit des nombreux points de désaccord encore en suspens jusqu’à présent, Salim Ahmed Saleh, le médiateur en chef de l’UA a présenté mardi soir aux délégations un projet d’accord global visant à ramener la paix au Darfour. «L’heure de la décision est venue, a-t-il lancé aux parties en présence. Plus de tergiversation (…) les yeux du monde sont sur vous, le peuple du Darfour vous regarde et l’Afrique vous encourage». Les délégations sont invitées à se prononcer «le plus vite possible» sur ces propositions.

Le chef de la délégation de Khartoum, Majzoub Al-Khalifa, a déjà fait savoir qu’il allait «étudier avec attention le document, l’esprit ouvert, afin d’aboutir (rapidement) à un accord». Côté rebelles, en revanche, pas de déclarations officielles avant une lecture approfondie de ce texte proposé par l’UA. Suivant de près ces discussions inter-soudanaises, le Conseil de sécurité des Nations unies a demandé aux parties en présence à Abuja, par le biais d’un communiqué, «d’examiner en toute bonne foi, les propositions faites par le médiateur».

Pendant ce temps, de nouveaux affrontements se sont produits mardi soir, entre l’armée soudanaise et les forces rebelles, à proximité de la ville de Buram, au sud du Darfour. Aucun bilan de ces dernières violences n’est à ce jour disponible.


par Olivier  Péguy

Article publié le 26/04/2006 Dernière mise à jour le 26/04/2006 à 16:33 TU

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Reed Brody

Conseiller spécial Human rights watch (HRW) à New York

«On aurait voulu que ce soit plus important, qu'il y ait plus de personnes visées (...) il y a un manque de volonté politique face à un génocide»

[26/04/2006]