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Grippe aviaire

La Côte d’Ivoire touchée à son tour

Les vendeurs de poulets braisés dans les «maquis» d'Abidjan redoutent une baisse de la consommation des volailles, en raison de la grippe aviaire.(Photo : AFP)
Les vendeurs de poulets braisés dans les «maquis» d'Abidjan redoutent une baisse de la consommation des volailles, en raison de la grippe aviaire.
(Photo : AFP)

La grippe aviaire progresse en Afrique. Le nouveau pays touché est la Côte d’Ivoire où plusieurs cas de volailles atteintes du virus H5N1 ont été enregistrés, dans le district d’Abidjan. L’annonce en a été faite à Paris, par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE). Dans la capitale ivoirienne, les autorités gouvernementales préfèrent parler de «suspicion», en attendant une éventuelle confirmation du laboratoire de référence de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) basé en Italie. Avec la Côte d’Ivoire, sept pays sont, à ce jour, touchés par la grippe aviaire. Sur place, les acteurs de la filière avicole commencent à s’inquiéter.


Seydou tient un «maquis», une petite gargote à ciel ouvert dans le quartier populaire de Marcory, dans le sud d’Abidjan. La spécialité de son établissement, c’est le poulet braisé. Les pièces de volailles sont ainsi cuites sur une sorte de grand barbecue, en bord de rue. Ce «maquis» fonctionne plutôt bien, à en croire Seydou, interrogé par l’AFP. Il vit de ce commerce depuis des années. Alors pour lui, comme pour tous les vendeurs de poulets braisés ou grillés, l’annonce de la présence de la grippe aviaire en Côte d’Ivoire, ça n’est pas bon pour les affaires. «Je laisse cuire mes poulets pendant longtemps, au moins trente minutes», précise-t-il d’emblée, comme pour rassurer la clientèle.

Et pourtant, c’est bien dans ce quartier de Marcory qu’a été découvert un des deux foyers de grippe aviaire recensés en Côte d’Ivoire. L’information a été rendue publique ce mercredi par l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), installée à Paris. Le communiqué précise que «sept poulets et neufs canards de basse cour, élevés en liberté» ont été atteints par le virus H5N1. Il s’agit donc bien de cas de grippe aviaire sous sa forme hautement pathogène. Les oiseaux contaminés ont été trouvés à Marcory et à Treichville, deux quartiers populaires d’Abidjan.

Le gouvernement attend une confirmation

La présence du virus aurait été détectée pour la première fois le 25 avril dernier, puis confirmée par l’Institut Pasteur à Paris, avant d’être rendue publique par l’OIE. Pour autant, d’ultimes analyses doivent encore être effectuées dans un laboratoire spécialisé en virologie, basé à Padoue en Italie. Ce laboratoire est un établissement de référence pour l’OIE et pour l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). La réponse est attendue dans les prochains jours.

Pour les autorités d’Abidjan, tant que ces résultats en provenance d’Italie ne sont pas obtenus, il est prématuré de parler de grippe aviaire en Côte d’Ivoire. «Il s’agit simplement d’une suspicion», a ainsi déclaré Alphonse Douaty, ministre de la production animale et des ressources halieutiques. Cela dit, le ministre a appelé «à la vigilance de toute la population, des opérateurs économiques et des professionnels de la filière avicole, afin de circonscrire cette menace».

D’ores et déjà, le gouvernement a annoncé la mise en œuvre de mesures préventives, sur l’ensemble du district d’Abidjan. Concrètement, il s’agit d’«équipes mobiles de surveillance épidémiologiques et sanitaires», chargées de patrouiller dans les quartiers. Autre mesure : la mise à disposition de numéros de téléphone pour que la population puisse joindre les services vétérinaires en cas de découverte de cas suspects.

Si les autorités se veulent rassurantes, l’inquiétude vis-à-vis d’une épidémie de grippe aviaire demeure pour de nombreux Ivoiriens. Ce jeudi, le quotidien L’Inter prédit ainsi que les habitants «ne se feront pas prier pour tourner le dos aux poulets, pintades, canards et autres, (pour éviter) de contracter cette maladie redoutable». Déjà, la méfiance s’était développée depuis quelques semaines, en fait depuis que des cas de grippe aviaire ont été signalés dans plusieurs pays africains (Egypte, Soudan, Nigeria, Niger, Cameroun et Burkina Faso). «Il y a des échanges d’animaux vivants transportés par camions ou par vélos, explique Bernard Vallat, directeur général de l’OIE, sur RFI. Et c’est très probablement, en Afrique, la voie la plus importante de diffusion du virus». Pour cet expert, interrogé par RFI, «la surveillance des frontières est impossible, compte tenu des possibilités de passer en de multiples endroits avec des oiseaux».

Un cruel manque de moyens

Dès lors, comment faire face à ce qui semble être une inéluctable progression de la grippe aviaire en Afrique ? Il faut donner davantage de moyens aux services vétérinaires nationaux, d’après Bernard Vallat de l’OIE, afin de «bloquer (…) et d’éliminer le virus là où il se trouve, y compris dans les villages». Mettre en quarantaine, puis abattre les animaux infectés et ceux exposés. Première difficulté, dans de nombreux cas : identifier les volailles concernées. Deuxième difficulté : faire admettre le principe d’abattage, alors que ce type d’élevage de volailles constitue une source importante de revenus pour des milliers de familles. C’est pourtant ce à quoi se sont résolus des pays comme le Niger ou le Burkina. Mais il a fallu en contrepartie, prévoir des indemnisations pour les éleveurs victimes de l’épizootie. Le montant de ces indemnisations se chiffre en millions de FCFA. Autre recommandation émanant de l’Institut Pasteur : «élever les différentes espèces animales séparément, en évitant tout contact entre les volailles et les porcs». Mais cela suppose que les éleveurs ont suffisamment d’espace disponible, et donc de moyens, ce qui est loin d’être systématiquement le cas…

A l’instar de la Côte d’Ivoire, de nombreux pays africains semblent être assez vulnérables à la propagation du virus. A ce jour, sept pays sont touchés : le Nigeria, l’Egypte, le Niger, le Cameroun, le Burkina Faso, le Soudan et donc maintenant la Côte d’Ivoire. Lundi dernier, une conférence consacrée à la pandémie de la grippe aviaire s’est tenue au Malawi. Les participants ont tous fait le triste constat que l’Afrique manque de fonds et de moyens techniques et humains pour faire face à la maladie.


par Olivier  Péguy

Article publié le 27/04/2006 Dernière mise à jour le 27/04/2006 à 18:13 TU

Les liens

WEB

Organisation mondiale de la santé animale
Le site de l'OIE propose un dossier spécial consacré à la grippe aviaire
Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture
Le site de la FAO prpose un dossier spécial consacré à la grippe aviaire
Institut Pasteur
Le site de l'Institut Pasteur propose un dossier spécial consacré à la grippe aviaire
Organisation mondiale de la santé
Le site de l'OMS propose un dossier spécial consacré à la grippe aviaire

Dossiers

(Conception : Bourgoing / RFI)

Audio

Bernard Vallat

Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE)

«Il faut des mesures d’urgences tout en investissant sur les services vétérinaires nationaux pour les rendre plus denses pour pouvoir bloquer le virus là où il se trouve.»

[27/04/2006]

Bernard Vallat

Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE)

«Les échanges commerciaux d’animaux vivants, de poulets vivants, qui sont transportés par des camions, des vélos, sont probablement la voie la plus importante en Afrique pour la diffusion du virus.»

[27/04/2006]