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Angola

L’épidémie de choléra s’aggrave

Maladie de la misère, le choléra semble s'être propagé à partir de Luanda.(Photo : AFP)
Maladie de la misère, le choléra semble s'être propagé à partir de Luanda.
(Photo : AFP)
L’Angola fait face, en ce moment, à une grave épidémie de choléra qui a tué plus de 900 personnes dans plusieurs villes du pays. Les organisations humanitaires affirment que la situation a atteint des niveaux extrêmes. Il faudra du temps et de grands efforts pour contenir la progression de l’épidémie dans un pays, maintenant en paix, où la pauvreté est flagrante, malgré ses grandes richesses en pétrole et en diamants.

L’épidémie de choléra qui frappe l’Angola gagne du terrain jour après jour. Le dernier bilan officiel de la maladie, présenté le 28 avril à Luanda, indique que le choléra a déjà tué 948 personnes, dans plusieurs villes et régions du pays. Un total de 21 000 cas ont été détectés et, selon les chiffres établis par les autorités sanitaires et par les organisations internationales d’assistance, l’épidémie s’est considérablement aggravée. Il y a deux semaines le nombre total de cas n’atteignait même pas les 9 000, dont 413 décès.

Les premiers cas de l’actuelle épidémie avaient été signalés il y environ deux mois. En moyenne le choléra provoque 25 morts par jour, comme si le pays continuait à subir les effets meurtriers de la guerre civile dont il est sorti en 2002, lorsque les forces gouvernementales ont obtenu la reddition des rebelles de l’Union pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita), suite à la mort de leur chef, Jonas Savimbi, après 27 ans de combats.

Aujourd'hui, l’Angola doit faire face une fois de plus, à une épidémie cyclique plus grave que les précédentes. En 1987, le choléra avait en effet provoqué près de 1 500 morts. Mais vu l’actuelle progression du nombre de cas enregistrés depuis dix semaines, nul ne sait si le point culminant de l'épidémie en cours est atteint.

Comme partout ailleurs, le choléra est, fondamentalement, une conséquence du délabrement des conditions de vie dans les zones urbaines, notamment dans la capitale. La ville de Luanda, avec sa proche banlieue, est surpeuplée. Sa population est estimée à environ trois millions d’habitants (près d’un quart de la population totale du pays) dont beaucoup vivent dans des bidonvilles. Il s’agit pour la plupart d’anciens réfugiés venus de plusieurs provinces éloignées, qui ont fui les combats entre 1975 et 2002.

La plus grave épidémie depuis la fin de la guerre

Des habitants de la capitale que nous avons pu contacter considèrent que le choléra est «un scandale, un mal sournois, grave et structurel. Une conséquence évidente du manque d’infrastructures basiques, notamment les égouts. Le réseau de distribution d’eau potable date de la colonisation qui s’est terminée en 1975 ». La zone, la plus probable, d’où l’épidémie a pu se déclencher est celle du grand marché de Roque Santeiro «où l’on vend de tout, où circulent des millions de dollars, mais où personne ne fait le moindre effort en termes de nettoyage et d’assainissement». Nos interlocuteurs luandais considèrent que l’épidémie est partie de Luanda vers les autres grandes villes du pays, notamment Benguela et Ndalatando, où l’incidence de la maladie est proportionnellement plus élevée que dans la capitale.

Cette épidémie est la plus grave depuis que l'avènement de la paix en Angola. Elle peut être considérée comme étant paradoxalement une conséquence indirecte du cessez-le-feu. Celui-ci a en effet permis la libre circulation des personnes, un peu partout dans le pays. Dans son dernier communiqué, Médecins sans frontières (MSF) note que le choléra tue en moyenne 25 personnes par jour en Angola. Richard Veerman, chef de mission de MSF à Luanda appelle à réagir pour «empêcher que le bilan en vies humaines prenne des proportions beaucoup plus importantes». Le gouvernement angolais est invité à mettre en œuvre une stratégie nationale afin de contenir la propagation de la maladie et à assurer l’accès aux installations de traitement, tout en garantissant la fournisture gratuite d’eau potable et en améliorant les conditions d’hygiène.

Selon un porte-parole de MSF en Angola, les autorités ont pris des dispositions contre le choléra, «une maladie très simple à traiter qui ne nécessite pas de médicaments chers». Vendredi, le Premier ministre angolais, Fernando da Piedade Dias dos Santos, a annoncé l’attribution d’un montant supplémentaire de 5 millions de dollars pour renforcer le budget des programmes de lutte contre l’épidémie, notamment le groupe technique crée par le président José Eduardo dos Santos. Le chef du gouvernement angolais répond ainsi à un appel formulé par des partis de l’opposition.

Le Premier ministre angolais souligne que «vu la dimension de l’épidémie, l’exécutif a élaboré un plan dont l’objectif est de parvenir à contrôler la situation et a réduire sa létalité». En ce moment le taux de mortalité lié au choléra en Angola est de 5%. Il s'agit de le réduire à 1%. Cet objectif va exiger un effort considérable pour améliorer les conditions d’approvisionnement en eau potable, l'assainissement et la gestion des ordures.

L’Angola ne manque pas de ressources. Le pays est devenu le deuxième producteur de pétrole de l’Afrique subsaharienne, après le Nigeria, avec 1,3 millions de barils de brut par jour. Des technologies d’avant-garde sont utilisées pour extraire ce pétrole, notamment dans les zones de l’offshore profond. Mais l'Angola  doit mettre en oeuvre des moyens suffisants pour que cette épidémie soit vaincue dans les plus bref délais, afin que sa population puisse jouir pleinement des bénéfices de la paix.


par Antonio  Garcia

Article publié le 29/04/2006 Dernière mise à jour le 29/04/2006 à 08:50 TU

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Frédéric Garat

L'épidémie de choléra en Angola

«On n'a pas atteint le pic de l'épidémie»

[29/04/2006]