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Nucléaire iranien

Téhéran refuse les «noix et chocolats» européens

Le discours du président iranien, comme en signe de provocation, a été prononcé à Arak où l’Iran construit un réacteur nucléaire à eau lourde.(Photo : AFP)
Le discours du président iranien, comme en signe de provocation, a été prononcé à Arak où l’Iran construit un réacteur nucléaire à eau lourde.
(Photo : AFP)

 Avant même que l’Union européenne (UE) ait présenté ses nouvelles propositions, l’Iran les a rejetées par la voix de son président. Mahmoud Ahmadinejad les assimile à des sucreries que l’UE voudrait échanger contre l’ « or » iranien. Les Occidentaux, embarrassés, reportent la réunion prévue à Londres vendredi pour examiner ces « mesures incitatives » visant à convaincre Téhéran de renoncer à enrichir l’uranium.


Le régime de Téhéran avait prévenu, à plusieurs reprises, qu’il refuserait les nouvelles propositions occidentales. Mardi encore, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Hamid Reza Assefi, déclarait que « l'Iran n'est pas intéressé » par les mesures incitatives de l'UE en échange d'une suspension de son enrichissement d'uranium, soulignant que la « décision de l'Iran d'obtenir ses droits » à l'enrichissement d'uranium conformément au traité de non-prolifération (TNP) « est définitive et irréversible ».

Cela n’empêchait pas la troïka européenne (France, Grande-Bretagne et Allemagne) de continuer, avec l’aval des Etats-Unis, à peaufiner son offre. Selon des diplomates, il devait s’agir, pour l’essentiel, de proposer à l’Iran des mesures de coopération, dont une assistance pour l’obtention d’un réacteur nucléaire civil à eau légère. Il était également question que la Russie se charge d’enrichir sur son territoire l’uranium iranien, de façon à écarter tout risque que la République islamique poursuive un programme nucléaire militaire.

Mais mercredi, la façon dont le président iranien à tourné en dérision l’offre européenne pourrait dissiper les dernières illusions sur une possible ouverture iranienne. « Ils [les Européens] disent qu'ils veulent donner des incitations aux Iraniens. Mais ils pensent avoir affaire à un enfant de quatre ans auquel ils disent qu'ils donneront des chocolats ou des noix en lui prenant de l'or en échange », a ironisé Mahmoud Ahmadinejad.

En signe de provocation

Et le leader iranien de brandir à nouveau la menace, comme il l’a déjà fait ces derniers mois, d’un retrait du TNP : « Ne forcez pas les gouvernements et les nations signataires du traité de non-prolifération nucléaire à s’en retirer. » Une façon de s’attirer un soutien renforcé de la Chine et la Russie, deux pays qui, possédant des intérêts économiques et énergétiques en Iran, s’opposent à la politique d’isolement international à son encontre et redoutent que ce pays ne sorte du TNP. Pékin a ainsi dit son intention d’inviter Téhéran, en juin, à un sommet sur la sécurité en Asie centrale.

Le discours d’Ahmadinejad, comme en signe de provocation, a été prononcé à Arak, dans le centre du pays, où l’Iran construit, au grand dam des Occidentaux, un réacteur nucléaire à eau lourde. Or contrairement au système à eau légère, ce type d’installation peut plus facilement conduire à la production d’armes atomiques.

Toutefois, comme si Téhéran entendait ne pas fermer totalement la porte, le porte-parole de la diplomatie iranienne a semblé, peu après, tempérer l’intransigeance présidentielle. « Tant que nous n'avons pas reçu la proposition [européenne], nous ne pouvons pas nous prononcer ».

La France n’a « pas de commentaire à faire »

Les Occidentaux, qui ne parviennent toujours pas à rallier Moscou et Pékin à une résolution onusienne prévoyant des sanctions contre l’Iran, sont en tout cas de plus en plus embarrassés. Quelques heures après les propos de Mahmoud Ahmadinejad, ils ont repoussé la réunion qui devait réunir vendredi à Londres les Européens, les Etats-Unis, la Chine et la Russie pour examiner les mesures proposées par la troïka européenne.

Ce report, selon un porte-parole du Foreign Office, doit « permettre d'en approfondir la préparation. » Elle pourrait se tenir dans les dix jours, « probablement la semaine prochaine », a indiqué à Washington Nicholas Burns, le secrétaire d'Etat adjoint aux Affaires politiques. Le 22 ou le 23 mai, indiquent des sources européennes.

La France, de son côté, semble vouloir ignorer le discours provocateur du président iranien. Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a souligné mercredi que « des propositions » européennes étaient « en cours d'examen et seront présentées le moment venu », affirmant n'avoir « pas de commentaire à faire » sur les dernières déclarations de Mahmoud Ahmadinejad.

Moscou a également prôné la poursuite du dialogue avec l'Iran. « Il faut se concentrer sur la recherche de solutions qui engageraient l'Iran au dialogue », a déclaré le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, rejetant implicitement un éventuel soutien de la Russie à des sanctions contre l'Iran si Téhéran repoussait de nouvelles initiatives.


par Philippe  Quillerier

Article publié le 17/05/2006 Dernière mise à jour le 17/05/2006 à 16:37 TU

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