Grippe aviaire
Une alerte est passée, la guerre n’est pas gagnée
(Photo : AFP)
La saison de tous les dangers est presque passée. Mais il ne faut pas baisser la garde, à en croire les organisations sanitaires internationales. Le virus de la grippe aviaire qui est sorti d’Asie au cours de l’hiver et a touché l’Europe puis l’Afrique, pourrait bien revenir l’année prochaine. Et avec lui les risques d’épidémie animale de grande ampleur, mais aussi de mutation vers une forme humaine de la maladie. Les experts de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Union européenne (UE), réunis en Suède ces derniers jours, ont d’ailleurs invité à ne pas diminuer la vigilance contre le H5N1.
Pour le moment, on n’a détecté en Europe, et même en Afrique, que des foyers d’infection localisés. Et c’est un soulagement, car les experts craignaient que l’épizootie ne se propage beaucoup plus. Voire prenne un caractère incontrôlable. Même si on continue à déceler de nouveaux élevages contaminés par le H5N1 en Europe -en Roumanie, par exemple-, la fréquence des cas d’infection est en baisse, selon les experts sanitaires. Cela pourrait signifier un répit, au moins jusqu’au retour des frimas plus propices à la diffusion du virus de la grippe.
L’épizootie n’est pas finie
Avec le recul, les experts ont d’autre part relativisé leurs craintes concernant le rôle des oiseaux migrateurs dans la diffusion du virus. Jusqu’à présent, les volatiles sauvages étaient présentés comme les principaux responsables de la propagation. Mais les tests réalisés par l’association néerlandaise d’ornithologie Wetlands, mandatée par les organisations internationales, sur 7 500 migrateurs de retour d’Afrique n’ont pas permis de déceler un seul oiseau porteur du virus. Même si, bien sûr, cela ne permet pas de généraliser car il s’agit d’une infime proportion d’animaux par rapport à la population totale des volatiles concernés, ces résultats prouvent tout de même que les oiseaux sauvages ne peuvent être les seuls incriminés. Le commerce, surtout illégal, de volailles malades a vraisemblablement représenté lui aussi un vecteur important de propagation du virus.
Dans tous les cas et quels que soient les intermédiaires, les experts estiment inévitable que le H5N1 continue à se propager. En Asie, où l’épizootie a émergé en 2003, des foyers continuent d’apparaître. En Chine, des contaminations animales et humaines sont signalées régulièrement, de même qu’en Indonésie. C’est pour cette raison que l’OMS invite les Etats à poursuivre l’élaboration de plans de préparation pour intervenir dès la détection d’un nouveau foyer, mais surtout réagir le plus efficacement possible si une pandémie humaine se déclarait. Car ce sont bien les craintes d’une épidémie de grippe humaine qui concentrent l’attention des autorités.
Des vaccins pré-pandémiques en préparation
Dans cette optique, l’un des enjeux est de trouver un vaccin efficace. C’est pourquoi les laboratoires pharmaceutiques ont engagé des recherches pour avancer au maximum le processus d’élaboration d’un sérum. Mais les scientifiques restent limités dans leurs travaux car pour trouver la formule définitive, il faudra attendre l’apparition de la souche humanisée. Cela ne les empêche pas de procéder, dans l’intervalle, à toutes les expérimentations possibles à partir des virus animaux. La Fédération internationale de l’industrie du médicament a recensé, au début du mois de mai 2006, 31 prototypes de vaccins humains contre différents virus de la grippe aviaire, dont 22 contre le H5N1.
L’un des vaccins pré-pandémiques les plus prometteurs est peut-être celui du laboratoire français Sanofi-Pasteur. Il a fait l’objet d’une série de tests sur l’homme dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique The Lancet. Ceux-ci ont permis de constater une «réponse immunitaire encourageante». Le sérum administré à une dose pas trop massive (deux fois 30 microgrammes) et en association avec un adjuvant (une substance à base d’aluminium qui multiplie les effets) a provoqué la production d’anticorps chez 67% des volontaires. Il s’agit d’un progrès important car les précédents tests réalisés aux Etats-Unis avaient nécessité une concentration beaucoup plus forte pour obtenir une réaction immunitaire. Ce détail n’en est pas un car, en cas de pandémie, la réduction au maximum du dosage du sérum serait l’une des conditions indispensables pour pouvoir assurer une production à grande échelle. Mais à l’heure actuelle, nous n’en sommes pas là. Pour le moment, les contaminations humaines restent exceptionnelles. L’OMS n’a recensé, depuis 2003, que 207 cas humains dans le monde, parmi lesquels 115 sont décédés des suites de la maladie.
par Valérie Gas
Article publié le 17/05/2006 Dernière mise à jour le 17/05/2006 à 17:24 TU