Coupe du monde 2006
Zidane: les adieux du magicien
(Photo : AFP)
Né le 23 juin 1972 à Marseille de parents algériens, Yazid Zidane a 10 ans lorsque l’Algérie bat l’Allemagne lors de la phase finale de la Coupe du monde de football en 1982 à Gijon. A l’instar de nombreux autres jeunes issus de l’immigration, il est fier d’exhiber ses origines algériennes. Il est encore cadet lorsqu’il est remarqué par les dirigeants cannois. C’est dans la douleur qu’il se sépare de ses parents. Son premier match professionnel, il le joue avec Cannes à Nantes (1 – 1). C’était le 20 mai 1989. Il a 17 ans à peine. Et tous ses cheveux.
Zidane est déjà une petite merveille sur le terrain. Il est pétri de talent. Il va vite, dribble tout sur son passage et perd rarement le ballon. Il est aussi plein d’assurance et sa conduite de balle est majestueuse. Parti à Cannes « pour voir », il y reste six ans, bien plus que les six jours initialement prévus.
Largement au-dessus du lot
Le 17 août 1994 à Bordeaux, il joue son premier match international (en amical) avec les Bleus face à la République tchèque. La France est menée lorsqu’il entre sur l’aire de jeu en deuxième période et marque deux fois en trois minutes, arrachant ainsi le match nul pour la France. Il faut voir et revoir ces deux buts, constater sa vitesse d’exécution sur le premier et son missile de la tête sur le second pour comprendre une fois pour toutes que ce jeune-là était largement au-dessus du lot. Le cobra avait frappé juste et fort. D’ailleurs, il ne manifesta rien après ses deux buts pendant que ses partenaires époustouflés lui tombaient dessus pour le célébrer.
La carrière de Zidane est lancée et tout bon observateur du jeu sait qu’il y a du talent, voire du génie dans les pieds de ce joueur qui sait tout faire avec un ballon. Généralement campé au milieu du terrain, il dirige la manœuvre, oriente le jeu, donne le tournis à ses adversaires, offre des balles de but et n’hésite pas à en marquer lui-même, généralement sur des frappes d’une étonnante soudaineté.
Une maigre consolation
Du mois d’août 1994 à juin 96, il joue à Bordeaux où il est épaulé par Christophe Dugarry (son meilleur ami à ce jour, né la même année que lui) et quelques autres. Patron absolu du jeu, il épate supporteurs et spectateurs par son jeu posé et par sa classe. D’août 96 à avril 2001, il joue à la Juventus de Turin puis est transféré cette année-là au Real Madrid.
La Coupe du monde 2002 est catastrophique pour la France. Blessé le 26 mai à la cuisse gauche lors d’un match contre la Corée du Sud, Zidane joue face au Danemark qui domine les Bleus (2 à 0). En ce 11 juin 2002, il est désigné « homme du match ». C’est tout ce que la France a pu glaner lors de cette compétition que tout le monde voulut oublier au plus vite.
Zidane écoeure les Brésiliens
Ils sont plus de 80 joueurs à avoir joué avec Zidane en équipe de France, mais on retiendra surtout les noms de Lilian Thuram, Marcel Desailly, Laurent Blanc, Didier Deschamps, Patrick Vieira, Fabien Barthez ou Bixente Lizarazu. Retenons qu’avant la finale, il a marqué 27 fois sous le maillot de l’équipe de France, qu’il en a été 14 fois le capitaine, qu’il a gagné 64 fois pour 7 défaites et 25 nuls. Demi-finaliste du championnat d’Europe de 1996, il écoeure le Brésil en finale de la Coupe du monde 1998 en France en marquant deux des trois buts d’une victoire claire et nette : 3 à 0.
En août 2004, il annonce sa décision de quitter l’équipe de France ; une sélection à laquelle il avait littéralement offert la Coupe du monde en 1998 dans l’euphorie que l’on sait. Cette décision n’est pas toujours ni comprise, ni acceptée. Face à ceux qui estiment qu’il a rempli son contrat avec les « Bleus », il y a les pourfendeurs qui assimilent sa démarche à un abandon, voire une trahison, dans la mesure où il continue de briller match après match avec le Real de Madrid. Mais Zidane, un brin nostalgique, va revenir en équipe de France (avec Claude Makélélé) pour rencontrer la Côte d’Ivoire le 17 août 2005, soit un an après son retrait des Bleus et après 93 sélections.
La sagesse de savoir partir
Zidane, c’est clair, n’a plus la fraîcheur et l'efficacité d’il y a une petite dizaine d’années et ses exploits sont plus rares que fréquents. Et, curieusement, sa fin de carrière semble correspondre au déclin d’un Real de Madrid totalement méconnaissable malgré ses multiples stars : Ronaldo, Beckam, Roberto Carlos, Raul et autres Robinho. Zinedine Zidane aura eu la sagesse de quitter le football avant que le football ne le quitte, offrant à tous ses admirateurs, les dernières phases de ses roulettes, de ses contrôles orientés, de ses volées foudroyantes, bref, la merveilleuse panoplie de son immense et inoubliable talent.
L’extraordinaire règne de Platini
Avec Zinedine Zidane, s’achève la troisième génération triomphante du football français. La première avait été menée dans les années 50 par l’exceptionnel Raymond Kopaszewski dit Kopa. Il fut numéro un partout où il joua : avec Reims, avec l’équipe de France, avec le Real de Madrid. Vint ensuite, le règne fou de Michel Platini à la fin des années 70- début des années 80. Autant Kopa avait un jeu léché, intelligent et efficace, autant le petit gars de Nancy avait une classe folle. Le fils d’Aldo, porteur du fameux N° 10, frôlait le ballon pour le dévier, jouait comme s’il avait les yeux derrière la tête, évitait les tacles assassins avec une aisance extraordinaire, faisait des ouvertures d’une rare précision, et marquait à répétition sur coups francs. Platini est-il le meilleur joueur français de tous les temps ? Certains l’ont écrit et d’autres n’ont pas osé. Car, si Platini était génial, Zidane lui est magique. D’ailleurs, il n’est ni simple, ni souhaitable de comparer des générations aussi différentes les unes des autres, des talents aussi divers. Aujourd’hui, dans les villes africaines, sur les terrains de fortune, les plages et les aires de jeu improvisées, les enfants fous de ballon ne se font déjà plus appeler Kopa ou Platini. Ils se surnomment Pelé, Maradona, Ronaldo, Ronaldhino, Eto’o et … Zidane. En attendant la prochaine étoile…
par Dave Wilson
Article publié le 08/07/2006Dernière mise à jour le 08/07/2006 à TU