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Union des Comores

Sambi s’attaque à la corruption

Le président Ahmed Abdallah Sambi, élu le 14 mai dernier. «<em>J'ai hérité d'une situation économique et financière très critique</em>» a-t-il annoncé le 6 juillet dernier, lors de la célébration du 31ème anniversaire de l’indépendance. 

		(Photo : AFP)
Le président Ahmed Abdallah Sambi, élu le 14 mai dernier. «J'ai hérité d'une situation économique et financière très critique» a-t-il annoncé le 6 juillet dernier, lors de la célébration du 31ème anniversaire de l’indépendance.
(Photo : AFP)
Les nouvelles autorités de l’Union viennent de lancer leur première campagne anti-corruption. Des barons de l’ancien régime, dont l’ex-ministre des relations extérieures, Abdou Soefo, sont mis en examen. Sambi veut tenir sa promesse d’une justice «indépendante, transparente et équitable ».

Ayant trouvé « les caisses du trésor public vide » à son arrivée au pouvoir, le président Ahmed Abdallah Sambi est plus que jamais convaincu de la nécessité de moraliser les mœurs politiques et de lutter contre la corruption. Une promesse faite à ses électeurs, qui aura l’avantage d’éclairer l’opinion nationale sur la mauvaise gouvernance passée. « J'ai hérité d'une situation économique et financière très critique » a-t-il annoncé le 6 juillet dernier, lors de la célébration du 31ème anniversaire de l’indépendance. Une situation qui l’oblige à dresser le bilan des années Azali sans tarder. Dès le lendemain de son investiture, il a mis en place des commissions de contrôles des administrations publiques et des sociétés d’Etat, pour faire le point sur la gestion financière relative aux exercices budgétaires allant de l’année 2004 aux cinq premiers mois de l’année 2006, et ce, en attendant l’arrivée d’une expertise étrangère en matière d’audits. Ces commissions ont révélé au grand jour un certain nombre d’affaires de détournement de biens publics.

S’engageant à ne pas intervenir dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire et prêchant pour une « tolérance zéro » contre « ceux qui ont spolié le pays », Sambi a par ailleurs donné un signal fort à ses concitoyens, en publiant, à titre préventif, une liste de 36 personnalités, appartenant à l’ancien régime, interdits de sortie de territoire, jusqu’à la fin des enquêtes en cours. Une première affaire, impliquant l’ancien ministre des relations extérieures, Abdou Soefo, pour détournements de fonds a  d’abord éclaté, à la suite d’une plainte contre « x » déposée par le nouveau ministre des Finances. Une seconde affaire concernant un détournement de mobilier d’Etat a suivi, entraînant deux condamnations d’anciens ministres, ainsi qu’une interpellation d’un ancien Premier ministre, Hamada Madi Bolero. Ce dernier, quelques jours plus tôt, s’exprimait d’une manière provocatrice sur le plateau d’une télévision locale contre ce qui ressemblerait à une forme d’inquisition de la part du nouveau pouvoir : « Je les défie » disait-il, en sous-entendant que personne ne pouvait l’arrêter. Depuis, il a été écroué.

La suspicion s’installe

D’autres affaires attendent d’être instruites. Une des commissions d’investigation s’interroge actuellement sur la revente à l’étranger de trois cargaisons de pétrole (un don de la Libye) par deux barons du régime Azali. Le Trésor public, les douanes, les impôts, la Société comorienne des hydrocarbures, l’Office national d’importation et de commercialisation du riz, la Société nationale d’eau et d’électricité, ainsi que les Sociétés nationales des postes et des télécommunication, sont tous passés au peigne fin ces jours derniers. La suspicion s’installe peu à peu. « Il suffit qu’un haut responsable soit mis en examen pour que l’opinion le déclare aussitôt coupable, analyse un juge. Or, il s’agit d’instructions lourdes, qui risquent d’être longues. Les Comoriens ont longtemps eu l’impression qu’être responsable au niveau de l’Etat voulait dire s’enrichir au détriment du citoyen. Il se trouve que pour la première fois, quelqu’un leur assure que l’Etat peut et doit sévir. Du coup, ils ne se retiennent plus. Alors que les enquêtes n’ont donné que très peu d’éléments concrets pour l’instant dans la plupart des affaires ».

La démarche des « sambiistes » a été, il y a peu, remise en question par le CRC, le parti du président Azali, qui la considère comme une « chasse aux sorcières » déguisée, basée sur des « pratiques arbitraires, consistant à priver un citoyen d’un droit constitutionnel comme celui de la libre circulation sur la base d’un préjugé, voire même d’une délation ». Azali lui-même trouve la démarche quelque peu condamnable et démagogique. Il n’a pas raté l’occasion de rappeler ironiquement à ses concitoyens que Sambi n’est pas le premier président à se positionner contre la corruption. Le discours, selon lui, n’a pas toujours été transcrit en actes. Ce qui semble ne pas être tout à fait le cas avec les premières arrestations de ce début de règne. Reste à savoir si l’arsenal juridique en place pourra réellement suivre.

par Soeuf  Elbadawi

Article publié le 15/07/2006Dernière mise à jour le 15/07/2006 à TU