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Ethiopie

Un général de brigade déserte avec ses hommes

Un militaire éthiopien à la frontière avec l'Erythrée où se sont réfugiés les déserteurs. Le bras de fer continue.  

		(Photo: AFP)
Un militaire éthiopien à la frontière avec l'Erythrée où se sont réfugiés les déserteurs. Le bras de fer continue.
(Photo: AFP)
150 militaires éthiopiens, dont un général de brigade, Kemal Gelchu, se sont enfuis vers l’Erythrée mardi, ou ils ont rejoint le Front de libération oromo (OLF), principal mouvement clandestin d’opposition au régime du Premier ministre, Meles Zenawi, dont la réélection en 2005 est largement contestée. Cette désertion massive risque d’aggraver considérablement la tension entre les gouvernements d’Addis Abeba et d’Asmara à cause des disputes frontalières.  

150 soldats éthiopiens ont déserté, mardi. Ils ont franchi la frontière pour se réfugier en Erythrée, où ils ont rejoint les rebelles du Front de libération oromo. Des diplomates en poste à Addis Abeba, ainsi que des sources proches de la Mission des Nations unies pour l’Ethiopie et l’Erythrée (Minuee), citées par l’AFP, ont confirmé, jeudi, ces informations, tandis que le Front de libération oromo se félicitait du fait que «de nombreux membres des forces armées du régime de Wayane [éthiopien] avaient franchi la frontière pour rejoindre l’OLF».

Le ministère éthiopien de la Défense confirme la désertion du général de brigade, Kemal Gelchu, suggérant que cet officier n’avait pas reçu la promotion qu’il attendait et qu’«il savait que sa tentative de promouvoir la discorde dans les rangs des forces armées allait être dénoncée». De son côté, le gouvernement érythréen a saisi l’occasion de ces désertions pour clamer victoire, affirmant que «outre l’opposition massive qui se manifeste en Ethiopie, des soulèvements ont aussi été observés dans les rangs des forces armées éthiopiennes». Il s’agit en tout cas de la première désertion d’un officier supérieur.

Le général Gelchu entend combattre Addis Abeba

Le général Gelchu commandait la 18ème division de l’armée nationale. A partir d’Asmara (Erythrée), il a déclaré à la chaîne britannique BBC, qu’il avait l’intention de combattre le gouvernement éthiopien parce que, dit-il, «la force est le seul langage que les autorités d’Addis Abeba peuvent comprendre». Il a aussi affirmé qu’il n’a pas l’intention de communiquer de secrets militaires aux Erythréens et qu’il souhaite, surtout, que la paix puisse revenir en Ethiopie afin, dit-il, «que ses différents peuples puissent bénéficier d’une situation juste, ce qui inclut les Oromo ».

Les 73 millions d’Ethiopiens comptent 40% d’Oromos et 32% de Tigréens. Le Front de libération oromo, qui était à l’origine un mouvement séparatiste, est devenu un acteur majeur de la contestation au régime de Meles Zenawi, qui est au pouvoir depuis 1995 et qui est soutenu par une coalition, le Front démocratique et révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF), dominée par le Front de libération du peuple tigréen (TPLF) qui revendique la victoire aux élections contestées de mai 2005.  

La désertion des soldats éthiopiens intervient à un moment délicat dans les relations entre les gouvernements d’Addis Abeba et d’Asmara. L’Erythrée a obtenu l’indépendance de l’Ethiopie en 1991. Les deux Etats n'arrivent pas à se mettre d’accord sur le tracé de leur frontière commune, ce qui s’est déjà traduit entre 1998 et 2000 par une guerre qui a provoqué près de 70 000 morts. La tension persiste, d’autant plus que le gouvernement éthiopien refuse de retirer ses troupes de certaines zones revendiquées par les Erythréens, en dépit d’une décision internationale.

Le gouvernement d’Asmara s’est plu à indiquer que le général Kemal Gelchu avait traversé la frontière à Badmé, une localité qui a cristallisé la querelle en souveraineté entre les deux voisins. La désertion des militaires éthiopiens intervient en outre au moment où l’armée éthiopienne, d'après de nombreux témoignages, est engagée depuis plusieurs mois en Somalie contre les Tribunaux islamiques qui ont pris le contrôle de la capitale Mogadiscio début juin et derrière lesquels, justement, Addis-Abeba voit la main d’Asmara.



par Antonio  Garcia

Article publié le 11/08/2006Dernière mise à jour le 11/08/2006 à TU