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Religion

Les religions face à l’actualité

Deux évêques se concertent lors de la réunion de la communauté de Sant Egidio, à Rome, en 2005.  

		(Photo: AFP)
Deux évêques se concertent lors de la réunion de la communauté de Sant Egidio, à Rome, en 2005.
(Photo: AFP)
Le 27 octobre 1986, le pape Jean-Paul II réunissait à Assise des dizaines de représentants des principales traditions religieuses du monde pour lancer un message de paix à l’opinion publique internationale. Depuis, c’est la communauté de Sant Egidio, spécialisée dans l’action sociale et la médiation diplomatique, qui a repris le flambeau en organisant chaque année, en septembre, une rencontre interreligieuse. Cette année, les organisateurs avaient choisi de revenir à Assise. Lundi et mardi, plus de 200 représentants de diverses religions se sont retrouvées pour débattre des grands thèmes d’actualité. Ils ont lancé un message.

De notre envoyé spécial à Assise

De l’imposant bilan du pontificat de Jean-Paul II, une image, plus éloquente que de longs discours, a souvent frappé les esprits : l’image du pape entouré de moines bouddhistes, de rabbins, d’évêques orthodoxes, d’imams devant un immense panneau où le mot «paix» était écrit dans toutes les langues. C’était à Assise, il y a juste vingt ans et, pour célébrer cet anniversaire, les responsables de la communauté de Sant Egidio, qui chaque année ont répété l’événement aux quatre coins de l’Europe, avaient choisi de revenir dans la ville de Saint François.

Venus de 70 pays, plus de 200 représentants de diverses religions se sont ainsi retrouvés, lundi et mardi, pour débattre de quelques grands thèmes qui agitent le monde contemporain. La pauvreté, l’immigration, le rôle de l’Europe face au défi du développement de l’Afrique, l’avenir du Liban, le pluralisme culturel en temps de guerre, le terrorisme, la laïcité. L’objectif premier de ce type de rencontre, c’est de témoigner qu’un dialogue est possible, comme l’affirmait mardi soir le message final de la rencontre: «Nous tous, représentants de religions différentes, avons affirmé la valeur du dialogue, du vivre en paix que nous avons vécu au long de ces jours dans un esprit d’amitié, devenant un modèle et un exemple pour les fidèles de nos communautés». Et le communiqué d’ajouter: «La guerre n’est pas inévitable. Les religions ne justifient jamais la haine et la violence. Ceux qui utilisent le nom de dieu pour anéantir l’autre s’éloignent de la religion pure». Compte tenu des constantes récupérations religieuses de certains conflits, le répéter n’était sans doute pas superflu.

Plus circonstanciés, certains débats ont permis des rencontres très symboliques. Comme celle entre le grand rabbin d’Israël, Yona Metzger, et Ahmed Al-Tayyeb,  recteur de la principale université du monde arabe, Al-Azhar. Le premier condamnant fermement la publication des vignettes contre l’Islam et déclarant, en référence très clair aux propos tenus par le président iranien, «attendre des leaders religieux musulmans qu’ils condamnent tout leader politique musulman que tourne en dérision l’holocauste et demande qu’un Etat soit éliminé». Le second saluant la résistance «inflexible de la communauté de Sant Egidio contre toute philosophie de guerre et toute entreprise de destruction».

Les bornes à ne pas dépasser

Très suivie, une autre table-ronde réunissait dans un théâtre d’Assise des représentants des principales communautés de la société libanaise. Tous unanimes pour saluer l’esprit d’hospitalité manifesté par les habitants lors des récentes attaques israéliennes. «Toutes les communautés ont accueilli les nombreuses personnes déplacées, au-delà de leur appartenance», a ainsi relevé un participant druze, Abbas Halabi, président du groupe arabe islamo-chrétien. «Le seul pont qu’Israël ne pourra détruire, c’est celui de la convivialité», a renchéri Mohammed Sammak, sunnite, conseiller politique du grand mufti du Liban. L’archevêque maronite de Beyrouth d’insister pour sa part sur les faiblesses de l’Etat libanais comme «cause principale de la montée du Hezbollah». Un représentant de la communauté chiite soulignait quant à lui l’enjeu pour le pluralisme que représente le Liban: «les chiites doivent comprendre que le Liban doit vivre, c’est une nécessité pour le monde arabe, c’est le seul pays où chrétiens et musulmans doivent créer une vie commune».

Le pluralisme, c’était bien l’un des grands thèmes de ces rencontres interreligieuses saluées par le pape Benoît XVI qui, dans une lettre adressée aux organisateurs, a invité les croyants à prier pour la paix et a défendu l’esprit  de dialogue, tout en rappelant la nécessité d’éviter l’écueil du syncrétisme et du relativisme. Un message qui, plus qu’un réel soutien enthousiaste, semble davantage constituer un rappel des bornes à ne pas dépasser en matière de foi religieuse. La communauté de Sant Egidio n’en continue pas moins sur sa voie, bordée de quelques succès diplomatiques notamment en Afrique où, grâce à sa médiation, un accord de cessation des hostilités vient d’être signé en Ouganda il y a quelques jours.



par Laurent  Morino

Article publié le 06/09/2006 Dernière mise à jour le 06/09/2006 à 08:19 TU

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Mario Giro

Responsable des relations internationales de la Communauté Sant'Egidio

«En Ouganda, le cadre stratégique a changé et, au bout de 10 ans, la période est bonne pour négocier la paix.»

[29/08/2006]