XIe Sommet de la Francophonie
La vie du français en Europe - République Tchèque, Slovaquie : l’attrait grandissant de la langue
République tchèque : Brezen 2006, Frankofonni turné
« C’est la première fois que les Tchèques participent aussi activement à l’organisation de la tournée de la chanson francophone, tant financièrement qu’en termes de mobilisation », raconte Olivier Gillet, le délégué de la Communauté française de Belgique et de la Région wallonne en République tchèque. Il attribue le succès de la session de mars 2006 au concours actif de Pavel Svoboda, le vice-ministre des Affaires étrangères, soulignant que ce dernier a récemment suivi des cours de français.
Depuis six ans, les partenaires institutionnels et culturels francophones se regroupent pour organiser les Journées de la Francophonie en République tchèque, une manifestation qui se déroule sur l’ensemble du mois de mars. « Initiative unique et aventure collective, elle reflète bien et confirme l’attrait grandissant pour la langue et la culture francophone dans ce pays. » Manifestations littéraires, cinématographiques, plastiques et musicales ont lieu dans tout le pays, organisées en région par les Alliances françaises de Brno, de Bohême du Sud – Ceské Budejovice, de Liberec, d’Ostrava et de Pzlen, par le Centre français d’Olomouc, par les clubs franco-tchèques de Hradec Kralové, de Kladno, de Pribram et de Zlin, et par l’université de Hradec Kralové…
Cette année, le ministère tchèque des Affaires étrangères, la Ville de Prague, les ambassades de Canada et de Suisse, la Délégation Wallonie-Bruxelles, la Maison de Bourgogne et l’Institut français de Prague ont organisé une tournée de la chanson francophone. Des artistes de tous horizons ont conjugué les styles sur près de quinze scènes – chansons à textes, rock, pop, hip-hop –, notamment le Suisse Michel Bülher, la Canadienne Fabiola Toupin, la Belge Karin Clerq, le groupe français Lool, la formation tchèque Prago Union ou encore le rappeur sénégalais Awadi, Prix RFI Musiques du Monde 2003. Une brochure attrayante, tirée à 15 000 exemplaires, témoigne de la richesse de la programmation : certaines manifestations étaient organisées par le festival Afrique en créations, d’autres soutenues par les ambassades de Roumanie, d’Albanie, de Bulgarie... Un rendez-vous qui pourrait bien devenir incontournable.
Slovaquie : quand l’économie fait apprendre le français
« Depuis son entrée dans l’Union européenne, environ 70 entreprises françaises se sont implantées en Slovaquie, ce qui porte leur nombre à 310 aujourd’hui. » Edouard Meyer, de la mission économique française de Bratislava, énumère les noms des sociétés dont la plupart semble avoir suivi l’installation de l’unité Peugeot PSA dans la ville de Tmava. « La réputation de l’ancienne Tchécoslovaquie s’est construite sur son industrie métallurgique. Après sa scission avec la République tchèque en 1993, la Slovaquie avait beaucoup à offrir à l’Ouest. » Concrètement, il s’agissait de transformer les usines d’armement en chaînes de production automobile ou de nouvelles technologies. La politique libérale « à la Tony Blair » menée jusqu’à présent par le gouvernement slovaque lui permet d’afficher un taux de croissance annuel de 6 %.
L’arrivée des entreprises européennes a réveillé le goût des langues des jeunes Slovaques qui y ont vu des opportunités d’emploi plus avantageuses, et pouvant à terme les emmener à la découverte de l’Ouest. « Jusqu’à la chute du Mur de Berlin, la langue russe était obligatoire dans le cursus de l’Education nationale, l’allemand était toléré, du fait de la proximité de l’Autriche et de l’Allemagne, explique l’un des responsables de l’Institut français de Bratislava. Aujourd’hui, l’anglais tient la pôle-position. Mais de nouveaux cours de langues sont apparus : italien, espagnol, polonais, ukrainien. » Désormais, le français talonne le russe en nombre d’étudiants, et pourrait même le dépasser grâce à l’apport des entrepreneurs francophones.
« Peugeot PSA a un programme de formation initiale et permanente incluant des cours de français, ouvert à tous ses employés, du technicien au cadre, soit environ 2 500 personnes, précise Catherine Walterski, secrétaire générale de l’Institut et du service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France ; et comme le constructeur automobile a entraîné dans son sillage des sociétés sous-traitantes françaises, comme Faurecia ou Gefco, leurs employés sont venus grossir les rangs des étudiants. » La petite école primaire française de Bratislava, qui ne comptait que 9 élèves il y a trois ans, compte aujourd’hui 89 enfants de parents francophones, venus avec leurs employeurs. Un niveau collège en relation avec le Centre national de l’enseignement à distance (CNED) sera inauguré à la rentrée scolaire 2006.
Témoin vivant de ce nouveau type d’échange, Lubomir Jancok (« celui qui embrasse la paix » en slovaque), étudiant en sciences politiques et fondateur de l’association Pont Francophone : « En neuf mois, nous avons organisé une trentaine d’évènements. Nous nous sommes rendus au Parlement européen à Strasbourg et avons établi des relations avec l’Ecole nationale d’administration. » Interprète occasionnel pour la Société des Amis de Talleyrand (le ministre de Napoléon a séjourné à Presbourg – ancien nom de Bratislava – avant d’y signer le traité de paix éponyme), le jeune homme exerce aujourd’hui ses talents auprès du sidérurgiste Arcelor.par Antoinette Delafin, Marion Urban
Article publié le 19/09/2006 Dernière mise à jour le 19/09/2006 à 19:04 TU