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Culture

Beaubourg à Metz, le compte à rebours est lancé

Le Centre Pompidou de Metz, c’est parti. On pose, ce mardi en Lorraine (est), la première pierre du CPM, en présence de Renaud Donnedieu de Vabres, le ministre français de la Culture. L’antenne régionale de Beaubourg doit ouvrir ses portes au public en 2008. En attendant le Louvre II à Lens, dans le nord de la France et le MUCEM, le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille. Le musée «hors les murs»: un concept qui a de l’avenir.

 

Le Centre Pompidou-Metz des architectes Shigeru Ban et Jean de Gastines. 

		(Photo : AFP)
Le Centre Pompidou-Metz des architectes Shigeru Ban et Jean de Gastines.
(Photo : AFP)

Ni tubulures ni couleurs criardes. Le CPM a beau être le petit frère de Beaubourg, il n’en est pas le clone. A l’option «usine à gaz», les Lorrains ont préféré la touche exotique du «chapeau chinois» posé sur quatre piliers. Le blanc pour le toit, le verre pour les façades : le bâtiment conçu par les architectes japonais Shigeru Ban et français Jean de Gastines est résolument placé sous le signe de la transparence, de l’ouverture. Plutôt de bonne augure pour ce poisson pilote de 5 000 m2, première expérience française de décentralisation culturelle organisée par un établissement national. C’est Jean-Jacques Aillagon qui a réactivé cette vieille marotte si chère à André Malraux , le père des Maisons de la Culture. A l’époque, en 2003, Jean-Jacques Aillagon occupe la rue de Valois avec la double casquette de ministre de la Culture et de la Communication. Sur sa feuille de route, «un grand projet d’action territoriale», selon l’appellation alors en cours. Projet qui comprend, entre autres, la décentralisation des musées au nom du rééquilibrage entre Paris et les régions.

Hors la culture, point de salut

Lutter contre l’inégalité culturelle est un leitmotiv chez Jean-Jacques Aillagon. En 1997, alors qu’il dirige le centre Pompidou, il entame une politique de diffusion «hors les murs» avec des prêts et des dépôts d’œuvres dans les musées de province. Du provisoire au pérenne, huit ans plus tard, le pas est franchi : le ministre décide d’inscrire cet embryon de délocalisation dans la durée. Voire dans le dur, puisque Beaubourg aura son double. Un grand musée d’Art moderne auquel il ne reste plus qu’à trouver un écrin. En janvier 2003, le choix est fait : Ce sera Metz, capitale de la Lorraine. Une région frappée par la désindustrialisation. Mais sa situation géographique, aux confins de la Belgique, du Luxembourg et de l’Allemagne a sans doute joué en sa faveur. Sans oublier l’arrivée, l’an prochain, du futur TGV-Est qui mettra la ville à 1 h 30 de Paris. Le site du CPM se situe d’ailleurs près de la gare. «L’offre culturelle est devenue un facteur incontournable de développement d’une ville ou d’un territoire», reconnaît Jean-Marie Rausch, le maire divers droite de cette agglomération de 200 000 habitants. 

Effet Bilbao

Le Centre Pompidou. 

		(Photo : Office du tourisme de Paris / Photographe : Fabian Charaffi / Architecte : Renzo Piano et Richard Rogers)
Le Centre Pompidou.
(Photo : Office du tourisme de Paris / Photographe : Fabian Charaffi / Architecte : Renzo Piano et Richard Rogers)

Sa référence, son modèle, c'est le musée Guggenheim à Bilbao, excroissance de l’original new-yorkais au pays Basque espagnol. Plus de sept millions de visiteurs entre son inauguration en 1997 et 2004 : toutes les attentes sont permises. Il n’est qu’à se rappeler le bonheur de Guy Delcourt, maire de Lens, quand, en janvier 2004, sa ville fut désignée pour accueillir en 2009 un Louvre-bis, sur la lancée de l’exemple messin. «Un miracle», selon l’élu socialiste. Le plus grand musée de France qui s’implante au pied des terrils, c’est l’espoir, en effet, de sortir le Pas-de-Calais, ex-région minière, du marasme économique et culturel. Du coup, la fièvre gagne. Ainsi de Marseille, dans le sud de l’Hexagone, où s’ouvrira en 2010 le Musée des cultures d’Europe et de Méditerranée (MUCEM) en partenariat avec le Musée national des arts et traditions populaires de Boulogne, près de Paris.

Extension à tout crin

 

Le musée du Louvre et la pyramide du Louvre. 

		(Photo : Office du tourisme de Paris / Photographe : David Lefranc / Architecte : Leoh Ming Peï)
Le musée du Louvre et la pyramide du Louvre.
(Photo : Office du tourisme de Paris / Photographe : David Lefranc / Architecte : Leoh Ming Peï)

Pour toucher le pactole, faut-il encore mettre la main à la poche. Tant pour le Louvre II que pour le CPM, la construction et le fonctionnement des deux établissements sont entièrement à la charge des collectivités territoriales (Département, région, ville). Coût du Centre Pompidou de Metz : près de 40 millions d’euros. Qui dit investissement dit, du même coup, autonomie. L’intérêt de ces dédoublements ne vaut, en effet, que si les antennes régionales cultivent leurs différences. Pas question de n’y montrer que les œuvres emmagasinées dans les réserves du Louvre ou de Beaubourg. C'est tout le sens des déclarations de Laurent Le Bon, le futur directeur du CPM : «Nous présenterons des expositions thématiques. Tout sera mis en œuvre pour provoquer la surprise, pour stimuler l’intérêt du public». Et, au bout du compte, pour redorer l’image des musées parisiens. Ici et ailleurs. Le Louvre n’ambitionne-t-il pas de s’implanter à Abu Dhabi, dans le Golfe, alors que dans le même temps Beaubourg rêve d’installer un nouveau site à Shanghaï, en Chine ? Affaire de prestige... quand le «label culture» peut, aussi, rapporter gros.



par Elisabeth  Bouvet

Article publié le 06/11/2006 Dernière mise à jour le 06/11/2006 à 11:53 TU