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Santé-Afrique

L'Afrique se soigne mieux

«<em>La Santé des populations – Rapport sur la santé dans la Région africaine</em>» est le premier rapport de l’OMS consacré à la santé des 738 millions de personnes vivant en Afrique. 

		(Photo : oms.org)
«La Santé des populations – Rapport sur la santé dans la Région africaine» est le premier rapport de l’OMS consacré à la santé des 738 millions de personnes vivant en Afrique.
(Photo : oms.org)
Un rapport de plus, pourrait-on être tenté de dire, sur la santé en Afrique. Et pourtant, il s’agit curieusement, du premier du genre jamais publié par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur la santé des 738 millions de personnes vivant dans la région. Dans ce document on découvre que l’Afrique est en train de trouver des solutions africaines à ses problèmes de santé. Bien qu’un frémissement vers le progrès soit sensible, constate l’OMS, l’Afrique reste le continent le plus touché par des maladies aussi dévastatrices que le sida, le paludisme ou la tuberculose. Selon la définition de l'OMS, la région africaine exclut le Maroc, la Tunisie, la Lybie, l'Egypte, le Soudan, Djibouti et la Somalie. 

D’un bout à l’autre du continent, les signes d’amélioration sont tangibles. L’Ouganda, considéré comme un modèle africain dans la lutte contre le VIH, est ainsi parvenu à traiter 50 % de ses patients séropositifs avec des antirétroviraux. Cet objectif, impensable il y a cinq ans à peine, a été atteint grâce à un programme original qui a consisté à former les infirmières pour qu’elles accomplissent, à la place des médecins trop rares, certains actes qui leur étaient jusque-là réservés. Dans la même logique, des agents de santé sont également retournés à l’école pour relayer les infirmières.

Pallier le manque d’effectifs

D’autres pays comme le Botswana ont investi dans des programmes de soins communautaires à domicile. Pour pallier le manque d’effectifs médicaux, des professionnels de la santé dispensent des formations de base à des membres de la famille de malades du sida. Les agents de santé communautaires leur apprennent comment soigner leur parent malade, éviter la contamination des autres membres de la famille par le virus et vérifier que le malade prend ses médicaments tous les jours. Chaque mois, la famille reçoit des fournitures médicales de base ainsi que des vivres. En cas de problème, la famille doit se rendre dans le centre de santé dont elle dépend.

Il est bien connu qu’il y a plus de médecins malawites dans la ville anglaise de Manchester que dans tout le Malawi. Cet exode des personnels médicaux concerne presque tous les pays africains et chacun tente de trouver une parade, sans succès jusqu’à présent. Diverses solutions ont été tentées : permettre aux soignants d’exercer dans le secteur privé tout en travaillant dans le public, augmenter les salaires, améliorer les conditions de travail, etc. Certains ont même proposé de retenir les certificats des diplômés jusqu’à leur retour au pays. Mais qu’elles soient incitatives ou répressives, aucune de ces mesures n’a encore été convaincante.

Tout en reconnaissant le droit de ces personnes à émigrer, les gouvernements tentent de sauvegarder leurs intérêts mutuels, notamment en instaurant des échanges bilatéraux de spécialistes. Ainsi, le Malawi a obtenu du Royaume-Uni une aide de 176 millions de dollars américains pour les six prochaines années. Un peu plus de la moitié de cette somme sera consacrée aux ressources humaines pour la santé. Le reste servira à augmenter les salaires en début de carrière et à rémunérer infirmières et médecins venus d’autres pays, le temps de former de nouveaux personnels malawites.

Des progrès malgré tout

Au palmarès des succès africains relevés par l’OMS, figurent la lèpre et la poliomyélite qui sont en passe d’être éradiquées. Autre avancée remarquable, l’onchocercose a été éliminée en tant que problème de santé publique et la lutte contre la dracunculose (maladie du ver de Guinée) a permis de réduire de 97 % le nombre de cas ces vingt dernières années. Concernant les maladies évitables de l’enfant, le nombre de décès par rougeole a diminué de plus de 50 % depuis 1999. Dans 37 des 46 Etats de la région, la vaccination contre la rougeole atteint ou dépasse les 60 %. Une autre réussite, souligne l’OMS, est l’amélioration de l’accès aux soins prénatals. De nombreux pays africains ont atteint le taux relativement élevé de 70 % des femmes d’Afrique sub-saharienne bénéficiant au moins d’une consultation prénatale. Certains pays ont élargi l’indication de ces consultations, les utilisant pour fournir, en plus de la préparation à la naissance, des dépistages pour le virus du sida, la tuberculose et le paludisme.

Tous ces succès ne parviennent pas cependant à occulter l’immense problème de la santé en Afrique. Ce que reconnaissent d’ailleurs les auteurs du rapport de  l’OMS. «Dans une grande partie de la région africaine, il n’y a pas eu d’améliorations ou très peu en matière de santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant depuis la fin des années 80. Dans certains endroits, une partie des progrès faits après l’indépendance a été anéantie», admet l’OMS. Ainsi, le sida continue à dévaster l'Afrique où vit 11 % de la population mondiale mais où l'on compte 60 % des personnes vivant avec le VIH. Plus de 800 000 Africains reçoivent maintenant un traitement efficace contre le virus alors qu’ils étaient huit fois moins en décembre 2003. Mais cela n’empêche pas qu’au moins 90 % de la population séropositive, ignore porter le virus souvent à cause du coût et de la disponibilité des tests de dépistage. Mais selon les experts, le fait que les antirétroviraux soient désormais disponibles à une plus grande échelle, devraient encourager davantage de personnes à demander un dépistage.

Reste que le paludisme, malgré des politiques publiques plus offensives, tue encore chaque année plus d’un million de personnes dont plus de 90 % d’Africains. Reste aussi que les mères et les enfants du continent présentent le plus haut risque de mortalité lors de la grossesse et de l’accouchement. Reste encore que la tuberculose associée au VIH, non seulement ne recule pas, mais tue plus que jamais. A tout cela s’ajoute le nombre de maladies non transmissibles telles que l’accident vasculaire cérébral, le diabète, le cancer et les cardiopathies, généralement considérées comme des maladies de l’Occident, mais de plus en plus courantes en Afrique. Ce double fardeau pèse sur une Afrique dont les systèmes de santé sont rarement à la hauteur. Un défi à relever, pour le Dr Luis Gomes Sambo, directeur du bureau régional de l’Afrique de l’OMS, qui appelle les gouvernements africains et leurs partenaires «à mieux coordonner la prestation des soins et à faire en sorte que les fonds soient utilisés de façon responsable au profit des Africains». Une manière de laisser entendre qu’ils ne le seraient pas à ce jour.

par Claire  Arsenault

Article publié le 20/11/2006 Dernière mise à jour le 20/11/2006 à 17:06 TU