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Venezuela

Les pauvres votent Chavez

Ambiance de campagne électorale à Caracas, le 2 décembre 2006. 

		(Photo: AFP)
Ambiance de campagne électorale à Caracas, le 2 décembre 2006.
(Photo: AFP)
Au pouvoir depuis 1998, le président vénézuélien Hugo Chavez devrait, selon toute probabilité, être réélu ce dimanche. Il conserve le soutien des défavorisés – près de la moitié des 26 millions d’habitants du pays – dont les conditions de vie se sont sensiblement améliorées depuis 8 ans. Face à lui, Manuel Rosales a réussi à rassembler l’opposition autour de son nom. Pas de quoi, cependant, faire trembler le leader de la « révolution bolivarienne » et chantre du « socialisme du XXIè siècle ».

De notre correspondant à Caracas

Vendredi, dans le métro bondé de la capitale vénézuélienne, deux femmes plaisantent. « Il faudra se lever tôt pour aller voter dimanche ». « Mais de toute façon, on sait déjà qui a gagné ! » Le président Hugo Chavez, candidat à la réélection, est en effet quasi assuré de la victoire. Seule inconnue, l’ampleur de celle-ci, les sondages lui donnant 10, 20, voire 30 points d’avance sur son rival Manuel Rosales.

Ceux qui voteront à coup sûr pour Chavez ? Les classes les plus défavorisées, les habitants des barrios, ces quartiers aux maisons de brique rose accrochées sur les collines des grandes villes du pays. Depuis 2003, les programmes sociaux du gouvernement, les « missions » ont fait beaucoup pour l’amélioration de leurs conditions de vie… et pour la popularité du chef de l’Etat. A El Valle, un quartier du sud de la capitale, Ricardo Gimenez travaille dans un Mercal, une supérette qui propose des produits de base. « Les produits sont achetés par le gouvernement, parfois à des coopératives, et les prix sont moitié moins chers que dans le commerce traditionnel. Des points de vente comme celui-ci, il y en a plus de 10 000 dans le pays ». Sur les rayonnages, du riz, des haricots noirs, de la farine de maïs : l’indispensable pour les familles vénézuéliennes.

A côté du Mercal, un module de « Barrio adentro » – à l’intérieur du barrio –, la mission phare du gouvernement Chavez. Un médecin cubain y apporte les premiers soins à une population jusqu’alors exclue du système. Ils sont ainsi 20 000 médecins et infirmières de l’île à être installés dans les bidonvilles et les zones rurales du pays, dans le cadre d’un échange avec Cuba. La Havane reçoit, en effet, de Caracas, 90 000 barils de pétrole tous les jours.

Une économie suspendue aux cours du pétrole

Une vingtaine d’autres missions ont fleuri dans le pays : alphabétisation, remise à niveau scolaire, formation professionnelle, etc. Le président peut présenter un bilan social plus que flatteur. Restent, toutefois, de gros points noirs sur lesquels le probable nouveau gouvernement Chavez devra insister : l’insécurité (13 000 morts violentes par an), le logement et l’emploi.

Car malgré la manne pétrolière – le Venezuela est le 9e producteur mondial de brut avec près de trois millions de barils par jour –, la moitié de la population stagne dans l’économie informelle. Pour transformer le modèle productif, Hugo Chavez mise sur les coopératives, notamment agricoles, dans les grandes plaines du sud-ouest. Pour le moment cependant, leur apport au PIB demeure très faible et l’économie toute entière reste suspendue aux cours du pétrole.

Le candidat de l’opposition, Manuel Rosales, propose une redistribution directe des recettes de l’or noir. A travers la carte de crédit Mi Negra, il compte reverser un cinquième des pétrodollars à la population pour l’inciter à aller de l’avant économiquement. Une offre raillée par les chavistes et nombre d’économistes, mais qui séduit les opposants lassés des « cadeaux » pétroliers faits aux pays de la région par Hugo Chavez.

Rosales a réussi à fédérer l’opposition

Le programme politique de Rosales s’arrête cependant là. Doté, qui plus est, d’un très faible charisme, il ne séduit pas les franges populaires. Personne n’oublie, non plus, qu’il a cautionné le coup d’Etat du patron des patrons, Pedro Carmona, qui avait chassé durant 48 heures Chavez du pouvoir en avril 2002. Rosales a, en revanche, réussi à fédérer autour de son nom l’opposition politique jusque-là dispersée et exsangue après dix scrutins consécutifs remportés par Chavez et les siens.

Un Chavez qui court personnellement après son troisième mandat. Elu en 1998, il avait été confirmé pour six ans en 2000 après l’approbation en 1999 d’une nouvelle Constitution qui prévoit la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux. Pour autant, 2012 sera-t-elle l’année de la retraite politique pour le leader de la « révolution bolivarienne » ? Rien n’est moins sûr. Conscient que les réformes profondes du Venezuela reposent presque entièrement sur ses épaules, il envisage une révision constitutionnelle soumise à référendum en 2010… plutôt que d’essayer de faire surgir un héritier.

Selon le chantre du « socialisme du XXIe siècle », le Venezuela va entrer dans une nouvelle ère après sa réélection. « Nous allons commencer l’application du Projet national Simón Bolívar (héros de l’indépendance du continent au XIXe siècle) qui sera le projet du Venezuela pour tout le XXIe siècle jusqu’en 2100. » Ce qu’a vécu le pays pendant huit ans, dit-il, n’était qu’une « phase de transition ».

par François  Meurisse

Article publié le 03/12/2006 Dernière mise à jour le 03/12/2006 à 10:01 TU

Audio

Michèle Gayral

Envoyée spéciale de RFI au Venezuela

«Les chiffres indiquent que la pauvreté recule au Venezuela.»

[03/12/2006]

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