Liban
Faible mobilisation syndicale
(Photo: AFP)
Un millier de personnes a manifesté ce mardi à Beyrouth répondant à l’appel de la principale organisation syndicale du pays qui proteste contre le plan de réformes que le gouvernement de Fouad Siniora se prépare à présenter à la conférence internationale, prévue le 25 janvier prochain à Paris pour réduire la dette publique du pays. L’opposition, qui a entamé le 1er décembre dernier un sit-in en face du siège du gouvernement, souhaite faire de cette journée le point de départ d’une nouvelle série de manifestations. Elle promet une «escalade» du mouvement de contestation susceptible de paralyser la vie économique du pays et menace de renverser le gouvernement Siniora, soutenu par l’Occident.
Il y avait presque autant d’éléments des forces de l’ordre que de manifestants devant l'annexe du ministère des Finances chargée des impôts. Un impressionnant dispositif de sécurité, avec la participation de l’armée et de la police, a bloqué les accès vers les quartiers résidentiels de la capitale libanaise, alors qu’un millier de manifestants se sont rassemblés à la demande de la Confédération syndicale des travailleurs du Liban pour demander le retrait du plan de réformes du gouvernement. La CGTL, principale organisation syndicale du pays, qui revendique 200 000 adhérents, s’élève contre la création de «nouveaux impôts» et contre les projets de privatisation de secteurs vitaux de l’économie tels que l’électricité, l’eau et le téléphone.
Le chef de la Confédération, Ghassane Ghosn, a dénoncé un plan de réformes «mijoté par la Banque mondiale en vue d’appauvrir les Libanais» et veut poursuivre, ce mercredi, avec un autre rassemblement devant le ministère de l’Energie. Ce leader syndical promet un bras de fer avec le gouvernement n’excluant pas que son organisation syndicale puisse décider une grève générale. Selon le quotidien al-Akhbar, proche de l’opposition, l’escalade contre le pouvoir devrait durer «trois semaines, aboutissant à une grève générale ouverte». Une hypothèse à laquelle certains observateurs ne croient pas, car elle risquerait, selon eux, d’aboutir à un schisme au sein de la CGTL, où certains reprocheraient à Ghassane Ghosn, qui est aussi membre du parti social national syrien PSNS, d’être trop proche de Damas. L’action de la CGTL «s’inscrit dans une bataille politique, sous la bannière de revendications socio-économiques» estime pour sa part le quotidien libanais As Safir.
L’opposition libanaise a décidé de soutenir les manifestations syndicales et considère qu’elles constituent une escalade dans le mouvement de contestation. Depuis le 1er décembre dernier, menée le mouvement chiite Hezbollah et le parti chrétien, Courant patriotique libre (CPL) dirigé par le général Michel Aoun, l’opposition organise un sit-in, campant jour et nuit, face à la colline du Sérail, le siège du gouvernement, dans le centre de Beyrouth. Elle exige la formation d’un cabinet d’union nationale, au sein duquel sa présence serait renforcée, et des élections législatives anticipées. Mais la majorité parlementaire anti-syrienne refuse d'accorder à l'opposition une minorité de blocage au sein du gouvernement, l’accusant d’être inféodée à la Syrie et de vouloir bloquer la création d'un tribunal international pour juger les auteurs de l’assassinat, en 2005, de l'ancien Premier ministre, Rafic Hariri.
Des réformes avant la conférence
Le plan de réformes, que le gouvernement de Fouad Siniora vient d'annoncer en ce début d'année, est venu accroître le mécontentement social à la crise politique déjà existante. Le gouvernement prévoit une hausse de la TVA à 12%, puis à 15%, contre 10% actuellement, pour financer le remboursement d’une partie de la dette du pays estimée à 41 milliards de dollars (environ 180% du PIB), ainsi que la privatisation de certaines institutions publiques telles que l'Electricité du Liban ou les télécoms et une réforme fiscale, dans le but, selon lui, de relancer la croissance économique. Un programme de réformes que le Premier ministre libanais va présenter à la conférence internationale des donateurs, prévue le 25 janvier à Paris. Cette conférence appelée Paris III, devrait permettre aux autorités libanaises d’obtenir de l’aide pour la reconstruction après le conflit dévastateur de l’été dernier et la crise politique qui se prolonge depuis la démission de cinq ministres chiites le 11 novembre dernier.
Dans ce contexte, beaucoup d’observateurs se demandent si la conférence des donateurs pourra se tenir le 25 janvier comme prévu. La France se veut confiante. Ce mardi, Paris a estimé que cette contestation «n’est pas de nature à mettre en cause le programme de réformes» du gouvernement libanais qui «servira très largement de base à la conférence de Paris III» a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Mattéi, qui a souligné que cette initiative visait à «aider le Liban à sortir de ses difficultés», et a assuré ne «pas avoir le sentiment qu’il y ait une opposition très large au principe même de la conférence».
par Elisa Drago
Article publié le 09/01/2007 Dernière mise à jour le 09/01/2007 à 18:57 TU