Proche-Orient
Réunion tripartite: pas de progrès
(Photo : AFP)
Le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas se sont entretenus en présence de la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice, ce lundi à Jérusalem, en vue de relancer des négociations de paix au point mort depuis près de sept ans. La réunion tripartite n'a donné aucune avancée concrète. Cependant, pour la première fois depuis des années, les trois dirigeants ont discuté d’un futur Etat palestinien, mais aussi de la nécessité pour tout gouvernement palestinien de reconnaître Israël. Cette rencontre est intervenue à la veille de la réunion du Quartet pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Russie, Union européenne, Onu), prévue le 21 février à Berlin.
«Le président (Mahmoud Abbas) et le Premier ministre (Ehud Olmert) ont discuté de leurs vues concernant l'horizon diplomatique et politique et comment cela pourrait conduire à la réalisation de la vision du président Bush pour deux Etats», a déclaré Condoleezza Rice à l'issue de la réunion qui s’est tenue, sous haute surveillance, dans un hôtel de Jérusalem.
D’autres rencontres de ce genre avaient déjà eu lieu depuis la rupture du processus de paix israélo-palestinien, en 2001. Mais, c’est la première fois que la question du futur Etat palestinien est évoquée à haut niveau depuis la réunion de Camp David en 2000, organisée par l’ancien président américain, Bill Clinton. Lancée en 2003, la Feuille de route, dernier plan de paix parrainé par les Etats-Unis et leurs partenaires au sein du Quartet, prévoyait la création d’un Etat palestinien indépendant fin 2005.
Dans une interview au quotidien palestinien de Rammalh, Al-Ayyam, avant cette réunion tripartite, la secrétaire d’Etat américaine a affirmé «ne pas savoir» si un Etat palestinien verrait le jour pendant le mandat du président Bush qui s’achève fin 2008.
La formation du futur gouvernement palestinien a dominé la rencontre de ce lundi. Les trois dirigeants ont discuté de la nécessité de reconnaître Israël. Ehud Olmert et Mahmoud Abbas «ont discuté de la position du Quartet selon laquelle tout gouvernement de l'Autorité palestinienne doit s'engager à ne pas recourir à la violence, reconnaître Israël et accepter les accords passés, les engagements, y compris la Feuille de route», a déclaré la secrétaire d'Etat américaine, à la fin de la réunion qui a duré plus de deux heures.
Fermeté de Olmert
Sur cette question de la reconnaissance d'Israël, le Premier israélien s’est montré ferme. Il a réaffirmé son refus de négocier avec un gouvernement palestinien qui ne reconnaîtrait pas «l’existence d’Israël comme Etat juif». Devant les membres de sa formation politique, Kadima, juste après la réunion, Ehud Olmert a ajouté que l’autre exigence posée, avant une négociation avec tout gouvernement palestinien, était la «libération immédiate de Gilad Shalit», le soldat israélien enlevé en juin dernier par des groupes armés palestiniens, dont le Hamas. Ehud Olmert a aussi défendu la voie du dialogue avec Mahmoud Abbas, considérant que «la rompre serait une grave erreur». Le ministre israélien de l'Intérieur, Roni Bar-On a été plus explicite. Ce proche de Ehud Olmert a affirmé à la radio militaire que «l'accord de La Mecque constitue une tentative assez naïve pour blanchir le Hamas aux yeux de la communauté internationale». Roni Bar-On a aussi expliqué pourquoi il faut dialoguer avec Abbas. Selon lui, «il ne faut pas boycotter Mahmoud Abbas sinon cela le pousserait dans les bras du Hamas, mais il faut continuer à faire pression sur lui».
Les pressions augmentent sur le président palestinien, alors que la formation du futur gouvernement palestinien est toujours en préparation. Le Quartet exige que ce gouvernement reconnaisse explicitement Israël. L’accord signé le 8 février, à La Mecque, en Arabie Saoudite, entre Mahmoud Abbas, chef du Fatah, et le leader du Hamas, Khaled Mechaal, ne fait pas mention d’une reconnaissance d’Israël, mais il stipule, néanmoins, que le gouvernement palestinien s'engagera à «respecter» les accords conclus par l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), y compris ceux signés avec Israël. L’OLP et Israël s’étant mutuellement reconnus lors des accords d’Oslo, en 1993, cela équivaut à une reconnaissance implicite de l’existence d’Israël. Jusque-là, le Hamas, qui dirige le gouvernement palestinien depuis mars de l’année dernière, après la victoire aux élections législatives de janvier 2006, a refusé de reconnaître l’existence d’Israël, malgré les pressions internationales. Les Etats-Unis et l'Union européenne ont suspendu leur aide financière au gouvernement palestinien dirigé par le Hamas, qu'ils considèrent comme une organisation terroriste.
Le Hamas dénonce un «chantage» américain
Dans un communiqué publié ce lundi à Gaza, le Hamas, par la voix de son porte-parole, IsmaÏl Radouane a «rejeté les pressions et le chantage exercés par l’administration américaine sur l’Autorité palestinienne» et l’a appelée à «reconnaître le gouvernement palestinien et à ne pas lui poser d’obstacle». Pour sa part, le Premier ministre palestinien Ismaïl Haniyeh, a «regretté que l’administration américaine se comporte toujours selon la logique de l’isolement et du boycott qui a démontré sa faillite».
Cette rencontre de Jérusalem pourrait marquer le début d’une série d’autres réunions tripartites. En effet, Condoleezza Rice a affirmé que les deux dirigeants, israélien et palestinien, «ont réitéré le désir d’une participation et d’un leadership américains afin de faciliter les efforts visant à surmonter les obstacles, rallier un soutien régional et avancer vers la paix» et qu’ils ont convenu de se rencontrer de nouveau «prochainement».
Condoleezza Rice avait, dimanche, rencontré séparèment Ehud Olmert et Mahmoud Abbas. Elle avait alors écarté toute avancée dans l’immédiat, étant donné les profondes divergences persistant entre Israéliens et Palestiniens. «Si on demande aux uns et aux autres de courir à ce stade, je pense que quelqu'un va tomber et cela ne sera pas une bonne chose», avait-elle déclaré, avant la réunion tripartite à Jérusalem.
Paris, qui souhaitait que cette réunion tripartite permette de faciliter un «dialogue constructif» entre Israéliens et Palestiniens et de définir «un horizon politique» pour les Palestiniens, se veut optimiste. Selon le ministère français des Affaires étrangères, la réaffirmation de l’engagement pour une solution à deux Etats constitue «un premier pas vers la relance du processus de paix» israélo-palestinien.
par Elisa Drago
Article publié le 19/02/2007 Dernière mise à jour le 19/02/2007 à 16:09 TU