Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Arts

Heinz Berggruen: mort d'un grand collectionneur d’art moderne

Heinz Berggruen devant le tableau de Picasso <em>Dora Maar aux ongles verts </em>lors de l'inauguration de l'exposition consacrée à sa collection d'oeuvres de l'artiste espagnol,&nbsp;par le Musée national Picasso, à Paris, en septembre 2006. 

		(Photo : AFP)
Heinz Berggruen devant le tableau de Picasso Dora Maar aux ongles verts lors de l'inauguration de l'exposition consacrée à sa collection d'oeuvres de l'artiste espagnol, par le Musée national Picasso, à Paris, en septembre 2006.
(Photo : AFP)
Le nom de Heinz Berggruen restera attaché à ceux des plus grands maîtres de la peinture du XXe siècle : Van Gogh, Cézanne, Klee, Matisse, Braque, Miro, et, surtout Picasso, dont il a constitué en plus de cinquante ans une exceptionnelle collection. Une collection qu’abrite désormais le Musée Berggruen à Berlin, sa ville natale où il était retourné vivre en 1996, après avoir vécu à Paris où il s’était installé après la Seconde Guerre mondiale et avait ouvert sa première galerie en 1947. Deux ans plus tard ce sera la rencontre déterminante avec Picasso, dont il va vendre, puis collectionner l’œuvre.

La façade du musée Berggruen à Berlin. &#13;&#10;&#13;&#10;&#9;&#9;(Photo : Staatliche Museen zu Berlin)
La façade du musée Berggruen à Berlin.
(Photo : Staatliche Museen zu Berlin)

«Heinz Berggruen et sa collection, un miracle pour Berlin» : ces mots sont de Peter-Klaus Schuster, le directeur général des musées d’Etat de Berlin, dans son introduction au catalogue de l’exposition que le musée national Picasso de Paris a consacrée, de septembre 2006 à janvier 2007, à la collection particulière de Berggruen. Il a raison: la ville peut s’enorgueillir d’accueillir dans ce qui est devenu le musée Bergggruen, dans une ancienne caserne royale rénovée pour l'occasion, juste en face du  château de Charlottenbourg, 85 Picasso,  52 Klee et 14 Matisse – sans oublier des tableaux de Georges Braque, des sculptures d’Alberto Giacometti et quelques spécimens d’art africain - rassemblés sous l’intitulé «Picasso et son temps». De somptueux spécimens de cet art qualifié de «dégénéré» sous le nazisme, qui avait contraint Heinz Berggruen à s’exiler aux Etats-Unis en 1936. Il prendra la nationalité américaine et combattra l’Allemagne nazie dans les rangs de l’armée américaine. C’est outre-Atlantique que Berggruen commence son activité de collectionneur – c’est à San Francisco, en 1940, qu’il découvre Paul Klee et achète une aquarelle de l’artiste allemand. Mêlée au milieu artistique de l’époque il rencontre à New York l’artiste mexicaine Frida Kahlo, avec laquelle il a une liaison. 

La guerre terminée, celui qui avait fait des études de lettres à Grenoble et Toulouse, choisit de s’installer en France, d’abord comme attaché culturel américain  auprès de l’Unesco, puis comme marchand d’art et galeriste. Il ne retournera à  Berlin qu’en 1996. «Je reviens à Berlin, le lieu de mon enfance, dira-t-il lors de l’inauguration de sa collection, dans l’intention de contribuer spirituellement à la reconstruction morale de mon bon vieux pays, qui pendant douze sombres années a banni l’art que j’aime en le qualifiant de dégénéré». Et quand on lui demandait pourquoi il avait choisi de céder sa collection à Berlin plutôt qu’à Paris où il avait passé la plus grande partie de sa vie, il répondait modestement que sa collection serait passée inaperçue dans la capitale française déjà si riche en art moderne, ajoutant qu’«à Berlin, c’est différent, la ville a besoin de rattraper le temps perdu».   

La passion Picasso

Catalogue de l'exposition Picasso/Berggruen au Musée national Picasso de Paris. &#13;&#10;&#13;&#10;&#9;&#9;DR
Catalogue de l'exposition Picasso/Berggruen au Musée national Picasso de Paris.
DR

«Les métamorphoses sans limites de Picasso  en font aux yeux de Berggruen l’artiste du XXe siècle par excellence», écrit Peter-Klaus Schuster. D’où la passion du collectionneur à rassembler toutes les formes et toutes les périodes de la création artistique du maître espagnol, des périodes bleue et rose aux ultimes toiles (Picasso meurt en 1973), avec un intérêt marqué pour les époques cubiste et surréaliste. Au total, une collection personnelle de plus d’une centaine d’œuvres dont une importante partie est donc au musée de Berlin, et dont le public parisien a pu se faire une idée avec l’exposition «Picasso/Berggruen, une collection particulière», l'an dernier au Musée national Picasso. Une idée aussi des liens d’amitié entre les deux hommes, au fil d’une abondante correspondance. Une amitié dont témoigne aussi cette dédicace «Pour mon ami Berggruen» que, quatre ans avant sa mort,  Picasso a apposée sous sa signature au bas d’une splendide gravure de 1935, La Minotauromachie, «au crayon, en faisant comme toujours une faute à mon nom»,  fait remarquer Heinz Berggruen pour ceux qui ne s’en seraient pas aperçu …

Celui qui un jour échangea huit toiles de Matisse contre une seule, Le Jardin public de Van Gogh, a publié en 1997 ses souvenirs sous le titre J’étais mon meilleur client (l’Arche éditeur).

C’est à Paris, que s’est éteint Heinz Berggruen, le 24 février 2007 à 93 ans.



par Danielle  Birck

Article publié le 26/02/2007 Dernière mise à jour le 26/02/2007 à 15:30 TU

Audio

Musée Picasso : la collection de Heinz Berggruen

«L'exposition compte plus de 120 oeuvres. Avec des pièces maîtresses de la Période bleue, la Période rose, le Cubisme...»

[28/09/2006]