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Culture

Vite, vite, la bibliothèque numérique européenne

(Source : BNF)
(Source : BNF)
La Bibliothèque nationale de France lance sa version de la future bibliothèque numérique européenne, lestée de quelques 12 000 ouvrages issus de ses propres rayons mais aussi des Bibliothèques nationales de Hongrie et du Portugal. Une précipitation qui attire les critiques mais qui se veut aussi un message de ralliement à destination des bibliothèques et des Etats européens pour contrer les appétits du grand-méchant-loup, Google.

Jean-Noël Jeanneney, le directeur de la BNF, a joué la conjonction de plusieurs événements, culturel ou numérique, pour annoncer l’ouverture du site internet Europeana. Ce site est présenté comme «la contribution française à la bibliothèque numérique européenne» au moment où la fête de l’internet débute (le 19 mars) ainsi que le Salon du livre de Paris (le 23 mars).

Faisant fi de l’état des projets des autres bibliothèques européennes et des financements, il faut que LA bibliothèque numérique européenne bouge. Traduit par l’auteur de l’essai Quand Google défie l’Europe*, cela donne «il faut éprouver le mouvement en marchant».

Un portail clair et une entrée directe pour 12 000 ouvrages

Jean-Noël Jeanneney n’allait pas quitter son poste de directeur de la BNF -il part à la retraite en avril prochain- sans avoir montré ce que les Français pouvaient faire avec Europeana : un portail simple, aéré, sobre, aux rubriques différenciées par couleurs, où l’internaute entre directement dans ce qu’il cherche, avec un mot-clé.

Les «classes du savoir» (les matières, selon la terminologie des bibliothécaires) sont clairement affichées. Les livres mis en ligne sont ceux qui remportent la palme de la consultation sur Gallica, le site de la BNF : à savoir, les œuvres de la littérature des 18ème et 19ème siècle, d’histoire, de philosophie, des sciences et techniques ou de médecine. On trouve également les biographies des écrivains, des hommes politiques ou des artistes et une panoplie de dictionnaires.

Près de 12 000 titres, en huit langues, sont déjà sur les étagères virtuelles : 7 000 en provenance de Gallica, 4 000 renvoient à  la Bibliothèque nationale hongroise et 1 000 à la Bibliothèque nationale portugaise. D’ici juillet, on nous l’a promis, il y aura 100 à 120 000 livres et documents en ligne, dont une chronologie de la francophonie.

La navigation est facile, quoiqu'un peu nerveuse et brusque pour ces premières heures, comme si l’impatience était le maître-mot de l’ouvrage. Des astuces : le consultant  peut sélectionner les documents qui l’intéressent et les intégrer à un compte personnel et marquer les pages avec des «étiquettes».

Des projets de numérisation encore dispersés

Europeana n’est pas seulement une facette de ce que pourrait être demain la bibliothèque numérique européenne. C'est aussi un message lancé aux 25 Etats et aux 46 bibliothèques qui ont déclaré leur flamme au projet du Conseil de l’Europe, consistant à regrouper les œuvres du patrimoine européen, ou tout du moins d’intégrer cette notion dans leurs travaux de numérisation respectifs. L’objectif final est de rendre 6 millions d’ouvrages accessibles à distance en 2010.

Actuellement, chacun travaille au rythme des soutiens financiers nationaux, régionaux ou des contributions privées. Certains comme la Bibliothèque de l’université Complutense de Madrid, l'une des universités les plus prestigieuses du pays, ou The British Library ont choisi de s’allier carrément à des sociétés informatique, des éditeurs de logiciels ou au «flibustier» Google, comme le directeur de la BNF qualifie le moteur de recherche. Les méthodes commerciales du géant de l’informatique ont en effet déjà fourni matière à procès pour les éditeurs et les auteurs et grandement hérissés les acteurs de la vie culturelle et autres militants de la diversité.

The European Library, qui, dans un premier temps, offrait l’unité visée et visible sur le net, est restée une simple banque de consultations de notices bibliographiques, fournies par 19 bibliothèques.

 Combien ça coûte ?

Le sujet de la BNUE (bibliothèque numérique européenne) mobilise en tout cas les internautes français, qui sont aussi des contribuables. Les critiques se concentrent sur la célérité avec laquelle les dirigeants de la Bibliothèque nationale de France se sont lancés dans le projet, en mettant en doute la disponibilité des moyens financiers à long terme.

Le budget affecté aux travaux de numérisation pour l’année 2007 se monte à quelques 10 millions d’euros, «reconductibles, puisque cette somme provient des taxes sur les appareils de reprographie», insiste Agnès Saal, la directrice générale de la BNF. La subvention permettrait de soutenir un rythme de numérisation de 100 000 œuvres pendant quelques années. L’objectif étant de verser 500 000 titres au catalogue de la bibliothèque numérique européenne.

Charge à Europeana de traverser les tempêtes politiques.

*Editions Mille-et-une nuits. 2005.



par Marion  Urban

Article publié le 22/03/2007 Dernière mise à jour le 22/03/2007 à 11:37 TU