Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Irlande du Nord

Les Protestants participeront au gouvernement régional

Le révérend Ian Paisley (g) et le président de Sinn Fein Gerry Adams (d) avant leur premier face-à-face. 

		(Photo : AFP)
Le révérend Ian Paisley (g) et le président de Sinn Fein Gerry Adams (d) avant leur premier face-à-face.
(Photo : AFP)

Ian Paisley du Parti unioniste démocratique et Gerry Adams du Sinn Fein sont d'accord pour former un gouvernement régional qui rassemblera catholiques et protestants.

La composition devrait en être connue d'ici le 8 mai prochain.

Une décision historique, obtenue grâce à un ultime coup de pouce de Tony Blair.


Le révérend Ian Paisley, chef de file du principal parti protestant de la province d'Ulster, le Parti unioniste démocratique (DUP), a finalement réussi à convaincre ses coreligionnaires d’adhérer à l’idée d’un gouvernement d’union avec l’ennemi d’hier, le Sinn Fein.

Conjuguer les extrêmes

Les deux partis ont jusqu’au 8 mai pour se mettre d’accord sur les noms des 12 ministres qui composeront le gouvernement. Celui-ci verra siéger pour la première fois, côte à côte, des catholiques et des protestants, aux vues diamétralement opposées : des nationalistes irlandais face à des farouches défenseurs de l'empire britannique.

L’intraitable –jusqu’à aujourd’hui- chef protestant sera vraisemblablement le Premier ministre. Il fêtera ses 81 ans le 6 avril prochain.

Martin MacGuinness, l’actuel président du groupe parlementaire du Sinn Fein, sera vice-Premier ministre.

 «Nous avons encore beaucoup de défis à relever et de problèmes devant nous», reconnaissait Gerry Adams au cours de la conférence de presse commune qui a suivi son premier face-à-face avec Ian Paisley.

Se regardant à peine et respectant une certaine distance physique, les deux hommes ont souligné l’importance historique de cet accord, tout en se référant aux «tragédies du passé», au «souvenir des blessures» et au devoir «de préparer un futur pour tous les Irlandais».

L’un et l’autre ont rappelé leur engagement à soutenir cette nouvelle étape du processus de paix, entamé il y a presque 10 ans, le 10 avril 1998, une date symbolique pour les deux religions chrétiennes ennemies puisqu’il s’agissait du Vendredi Saint (Good Friday).

Une paix difficile à construire 

Les accords du Good Friday prévoyaient le partage du pouvoir entre catholiques et protestants ainsi que la création d’institutions semi-autonomes, dont une assemblée, un gouvernement et des organes de coopération avec la République d’Irlande.

Ratifié par 71% des Nord-Irlandais, le traité n’a cependant jamais pu se concrétiser face à l’intransigeance des uns et des autres : l’Armée républicaine irlandaise (IRA) traînant à entamer son désarmement, les ministres du DUP refusant de siéger tant que celui-ci ne serait pas accompli.

En moins de trois ans, Londres suspendra quatre fois le fonctionnement des institutions avant de le faire définitivement en octobre 2002, suite à une affaire d’espionnage au sein du gouvernement, impliquant le Sinn Fein. L’infiltration était connue des services britanniques depuis longtemps. Choqués, les Unionistes exigèrent une réponse forte de leur allié traditionnel.

De nouvelles élections eurent lieu en 2003 qui confirmèrent la montée des partis extrémistes aux dépens des partis modérés. Il y eut encore d'autres incidents avant que l’IRA donne l’ordre à ses militants d’abandonner la lutte armée en 2005.

Le 13 octobre, le premier ministre britannique, Tony Blair et son homologue irlandais, Bertie Ahern annoncent que les Unionistes acceptent de partager le pouvoir avec le Sinn Fein, et que ce dernier reconnaîtra la légitimité de la police irlandaise, considérée comme partiale par les militants catholiques.

Une enquête rendue publique quelques semaines plus tard établira comment dans le passé, la police irlandaise a couvert une dizaine de meurtres commis par des paramilitaires protestants ainsi qu’un attentat contre les bureaux du Sinn Fein en 1997. Gerry Adams parviendra cependant à arracher un vote favorable des militants à cette reconnaissance des forces de l'ordre irlandaises, fin janvier 2007.

Enfin, le 7 mars dernier, une nouvelle Assemblée d’Irlande du Nord sort des urnes : sur les 108 sièges, les Protestants du DUP obtiennent 36 sièges. Le Sinn Fein, 27 sièges. Les protestants modérés, 18 et les catholiques modérés, 16. Le seul parti biconfessionnel, l’Alliance, en gagne 7.

Le petit «plus» de Tony Blair

Deux éléments ont aidé à emporter la décision du Parti unioniste démocratique :
- un pactole supplémentaire de 1,47 milliard d’euros promis par Tony Blair, en plus du budget de 35 milliards d’euros pour les quatre années à venir, à l’Assemblée régionale si un accord était trouvé à la date du 26 mars, avant minuit. Dans le cas contraire, l’Assemblée était dissoute, et les députés élus le 7 mars dernier n’auraient pas perçu d’indemnités.
- un moratoire de Londres sur la perception des taxes sur l’eau en Ulster : les Irlandais du Nord considèrent que cette mesure relève des autorités locales.

En trente ans, le conflit civil irlandais aura causé la mort de 3 270 personnes et d'environ 900 militaires, toutes forces confondues.

par Marion  Urban

Article publié le 26/03/2007 Dernière mise à jour le 26/03/2007 à 12:37 TU